Formation continue


Depuis 6 ans, le Ministère chante la même chanson et reste sourd à nos revendications syndicales. Ce n’est pas faute de leur avoir rappelé que J.M. Blanquer voulait en faire une « priorité ». Et qu’entre temps, la réforme de G. Attal (100 % des formations hors face à face élèves) a fortement dégradé la qualité des formations et nos conditions de travail.

Les évolutions de la formation continue depuis 2019

En 2019, le Ministère lançait un grand chantier de la formation continue, après un état des lieux bien décourageant à l’occasion des Assises de la formation continue des enseignant·es en mars 2019. Il s’est traduit par la mise en place d’un Schéma directeur triennal de la formation continue. L’un des douze engagements du « Grenelle de l’éducation », présentés en mai 2021, soulignait dans le même esprit que « la formation continue constitue un élément déterminant de l’approfondissement des compétences et de la mobilité professionnelle des personnels ».

À l’échéance du deuxième Schéma directeur, il est difficile d’oublier que Gabriel Attal a sabordé ces belles ambitions à la rentrée scolaire 2023, en imposant qu’à marche forcée, les formations basculent hors temps scolaire. Les EAFC, créées après le Grenelle, sont devenues les maîtres d’œuvre de cette décision.

Bilan du schéma directeur, 2022-2025

Bilan quantitatif

Les éléments chiffrés présentés par la DGRH et la DGESCO pour faire le bilan de la période 2022-2025 ne permettent pas cependant pas d’en mesurer l’effet. Une seule donnée, globale et communiquée lors d’un groupe de travail le 10 février, présente le nombre de « journées stagiaires » : elles seraient passées de 2,18 à 2,22 millions entre 2022-23 et 2023-24.

Mais que recouvre cette augmentation d’1,83 % ? La DGRH et la DGESCO sont bien en peine de dire ce que recouvre ce nombre : à l’heure actuelle, il n’est pas possible de distinguer les formations en présentiel des formations hybrides ou à distance. On peut donc allègrement mélanger les choux et les carottes et compter ensemble une journée de formation en présence d’un formateur ou d’une formatrice, un·e universitaire par exemple, et quelques heures de connexion devant une formation asynchrone à distance. Les services du ministère sont incapables de savoir qui sont les stagiaires concerné·es : s’agit-il d’un public désigné ou non ?

On ne saura rien, pour le moment, du « nombre de personnels formés par rapport à l’ensemble des personnels, par catégorie et par sexe », de la « durée moyenne de formation en jours par personne formée »… données qui figurent pourtant dans les « indicateurs de suivi » qui devaient permettre « de s’engager, de manière efficace et au-delà d’une mesure de la satisfaction des stagiaires, dans une démarche active d’évaluation des réalisations et de leurs impacts, et de favoriser l’ajustement en continu de l’offre de formation aux besoins de l’institution et des personnels » (Circulaire du 11-2-2022, définissant le Schéma directeur 2022-2025).

Bilan qualitatif

Quant au bilan qualitatif du Schéma directeur, il repose sur une enquête faite auprès des EAFC. On nous informe que toutes n’ont pas répondu, et que celles qui l’ont fait n’ont pas toujours répondu à toutes les questions (qui n’ont pas été communiquées aux organisations syndicales). L’on peut s’étonner que l’évaluation relève de l’organisme opérant la formation continue. En « l’absence d’indicateurs dédiés », on saura juste qu’il y a des améliorations en matière d’identification des besoins, d’hybridation de la formation (qu’est-ce que cela peut vouloir dire ?), de territorialisation…

Une absence de donnée fiables qui perdure

Qu’est-ce qui explique une telle situation, que relevait déjà un tout récent rapport de l’IGESR, soulignant « le manque de visibilité de la réalité de la formation continue au sein des académies et au niveau national » ? Il n’existe pas de « tableaux de bord fiables », rappelle l’IGESR. Ce n’est pas faute de les avoir promis, depuis 2019, au fil des présentations des schémas directeurs passés ou à venir, tous les trois ans, ou du Plan national de formation chaque année.

En novembre 2021, la DGRH nous disait y travailler depuis 18 mois, qu’il y avait du retard et que « ça se sera pas rapide ». En février 2025, on attend toujours ce fameux « système d’information » qui doit compiler toutes les données individuelles, des parcours suivis par chaque agent depuis le recueil des besoins.

Le recueil des besoins, justement… Vincent Soetemont, directeur des ressources humaines au Ministère en 2020, le promettait déjà : « nous avons envie de basculer dans une logique de la demande ». En février 2025, la représentante de la DGRH se dit « sensible à l’idée » qu’il faille répondre aux besoins des personnels. Mais plutôt que d’attendre un outil numérique magique qui permettrait d’identifier les besoins de formation, de les satisfaire et d’enquêter sur l’ensemble (ça s’appellerait Virtuo), le Ministère et les Rectorats seraient bien inspirés de s’en remettre au dialogue social, et aux organisations qui représentent les personnels. Le premier Schéma directeur a créé les Conseils académiques de la formation (CAF), mais leur contribution à l’élaboration des plans académiques de formation (PAF) reste erratique. Depuis 2020, DGRH et DGESCO répètent qu’elles y sont attachées, promettant encore en juin 2023 qu’elles pouvaient « envoyer des signaux » en ce sens.

Le bilan du SNES-FSU

Alors que dire, pour finir, du bilan des six dernières années ? Sous couvert d’en faire une priorité, le Ministère a voulu reprendre en main la formation continue, ce qui rend très hypothétique l’objectif de mieux répondre aux besoins formulés par les personnels. Il a imposé les EAFC qui ont sans doute largement déstabilisé l’existant et fait disparaître le paritarisme dans les instances concernant la formation continue. La promesse d’en faire profiter davantage les personnels s’est fracassée sur la primauté donnée au remplacement de courte durée, et l’injonction de se former « hors du temps devant élèves », c’est-à-dire en plus de son temps de travail.

La FSU dénonce cette injonction qui constitue un verrou et réclame que les personnels soient davantage impliqué·es dans la formation continue qui reste le parent pauvre de l’Éducation Nationale.