Le 5 avril, Emmanuel Macron est intervenu pour confirmer le passage des concours d’enseignement au niveau licence pour les premier degré et second degré. Cette annonce vient court-circuiter les discussions entre le ministère et les organisations syndicales, rendues difficiles par la succession des ministres de l’éducation nationale depuis la rentrée 2024.

Le contenu des annonces

Avec cette annonce du concours en L3, le président et le ministère font le choix de la déqualification des métiers du second degré, dissimulée derrière l’urgence de répondre à la crise de recrutement des enseignant·es, CPE et Psy-EN. En effet, il est possible que davantage de candidat·es s’inscrivent aux concours si le niveau de diplôme requis est abaissé à la licence. Mais le vivier important d’étudiant·es ayant déjà un master se dirigera-t-il encore vers ces concours de niveau licence ? Si la conséquence de cette réforme est de créer un nouveau vivier tout en asséchant un autre, le principal résultat sera la déqualification des concours et des métiers.

La disparition des aides spécifiques aux étudiant·es préparant les concours

Le SNES-FSU propose de répondre à la crise de recrutement par une revalorisation du métier ainsi que par des aides financières pour les étudiant·es se destinant aux métiers d’enseignement et d’éducation. C’est la direction opposée que choisit le ministère en entérinant la disparition du dispositif d’AED en pré-professionnalisation qui (malgré l’opposition du SNES-FSU à une entrée par la contractualisation) permet aujourd’hui d’accompagner financièrement les étudiant·es de licence vers les concours. Alors qu’il faudrait généraliser des pré-recrutements dès les premières années de licence pour garantir un vivier important de candidat·es aux concours, le ministère fait le choix de supprimer un dispositif phare du quinquennat de Jean-Michel Blanquer, sans rien proposer à la place.

La rémunération et le statut en M1

La ministre Nicole Belloubet a également mis fin aux doutes qui circulaient en fin de semaine dernière quant à la rémunération des étudiant·es en M1 dans les futures Écoles Normales Supérieure du Professorat. Alors qu’il avait été annoncé depuis le 8 novembre 2023 que l’année de M1 après le concours serait accomplie sous statut d’« élève-fonctionnaire » avec une rémunération de 1400 € nets mensuels, le ministère a confirmé une indemnité ou une gratification de 900 € mensuels. Cette rémunération est inférieure à ce que touchent les actuel·les étudiant·es AED en pré-professionnalisation (plus de 1000 € par mois en L3 et master cumulables avec des bourses), qui pourtant n’ont pas passé de concours. Comment techniquement rémunérer un·e « étudiant·e-fonctionnaire » avec une rémunération si faible ? Avec quel indice de rémunération ?
Au rythme où vont les annonces de reculs, que pouvons-nous attendre de cette année de M1 en ce qui concerne l’avancement de carrière et la prise en compte des années pour la retraite ? Le ministère ose utiliser le terme d’« École Normale », alors allons au bout de l’idée du recrutement avec un réel statut d’« étudiant-fonctionnaire » : une réelle rémunération et une réelle entrée dans la fonction publique !

Les sessions 2025, 2026 et 2027

Les bruits qui circulent au sujet des deux années de transition entre le premier concours à bac+3 dès 2025 et la disparition du concours à bac+5 sont aussi inquiétants. La ministre a confirmé qu’un concours à bac+5 serait conservé en 2025 pour les étudiant·es déjà engagé·es cette année en M1 MEEF. La ministre n’en a pas reparlé dimanche, mais un document ministériel qui a fuité mi-avril laisse apparaître également deux concours à bac+3 et bac+5 en 2026, permettant aux étudiant·es en L3 actuellement de ne pas perdre une année. La question qui se pose est celle de la ventilation des postes entre ces deux « sessions » d’un même concours, aux attendus différents. Si les deux « sessions » de concours sont programmées sur les mêmes dates et que le nombre de postes ouverts pour le niveau bac+5 était très limité, des candidat·es inscrit·e en M2 seraient poussés à choisir le concours bac+3 avec pour conséquence de refaire deux années de master.

Loin de donner les signaux clairs aux étudiant·es d’une réelle revalorisation des métiers et d’un accompagnement financier durant les études, le ministère semble naviguer à vue, et chaque revirement paraît éloigner cette réforme de ses objectifs affichés et soulever davantage d’incohérences.


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