
La DEPP (service statistiques du ministère) a publié en janvier 2025 une enquête sur le profil des admis·es aux concours de l’enseignement pour la session 2023. Dans le 2nd degré, les étudiant·es restent majoritaires. Ces données confortent le SNES-FSU dans ses analyses et mandats.
La réforme Blanquer a aggravé la crise d’attractivité
La réforme Blanquer de 2022 a eu des conséquences sur les viviers de candidat·es aux concours et sur les profils des admis·es. Cette réforme a déplacé le concours durant l’année de M2 MEEF. À l’issue de leur parcours de formation, les admis·es possédant un Master MEEF sont placé·es comme stagiaires à temps plein. La session de 2022 a été une année de transition : le nombre d’étudiant·es admis·es a fortement baissé mais parce qu’ils et elles ont eu la possibilité de passer le concours de M1 et non la nouvelle mouture de M2 (cohorte de 2020). Ainsi, la session 2023 est véritablement la première sur laquelle il est possible d’évaluer les conséquences de la réforme Blanquer. Loin d’apporter une réponse à la crise de l’attractivité, elle se place dans la droite ligne des politiques menées par Emmanuel Macron qui aura vu le nombre d’inscrit·es aux concours du second degré diminuer de plus de 36% depuis son arrivée au pouvoir.
Qui sont les candidat·es aux concours?
Les concours externes restent la principale voie de recrutement (77 % des admis·es pour le 2nd degré). Les concours publics attirent principalement les étudiant·es (61 % des admis·es) et les moins de 25 ans représentent 43 % pour les concours publics. Par exemple, au CAPES externes de lettres modernes, 49.8% des lauréat·es sont des étudiant·es INSPE et 23.5% sont des étudiant·es hors INSPE. Pour le CAPES externe de mathématiques, 38% sont des étudiant·es INSPE et 17.3% sont des étudiant·es hors INSPE. C’est donc un vivier dont il faut prendre soin pour éviter qu’il ne baisse davantage dans un contexte de crise d’attractivité et de pyramide des âges désavantageuse dans la fonction publique de façon générale.
Le taux de réussite des candidat·es sous statut d’étudiant·e est meilleur pour le 2nd degré (les élèves de l’ENS : 71 %, les étudiant·es INSPE : 48 %, les étudiant·es hors INSPE : 38 %).
Un âge moyen en hausse
L’âge moyen des lauréat·es des concours du second degré est passé de 29,3 ans en 2013 à 31,1 ans en 2023 (de 27,9 ans à 28,8 ans pour les concours externes et de 36,8 ans à 39 pour les concours internes). Les étudiant·es INSPÉ lauréat·es ont en moyenne 24,6 ans pour les concours externes quand les étudiant·es hors INSPÉ lauréat·es ont en moyenne 28,7 ans. Avec cet âge moyen de plus en plus élevé, les perspectives de carrière s’assombrissent : la réforme des retraites (qu’il faut abroger !) et l’allongement des carrières empêcheront la plupart des enseignant·es de partir à taux plein.
Le rapport ne mentionne pas la baisse du nombre de candidat·es et ses conséquences sur les admis·es. Il ne mentionne pas non plus les années post-admission : les admis·es restent-ils/elles dans l’Éducation Nationale à l’issue de leur année de stage ?
CAPES/Agrégation, des profils différents
Les profils de lauréat·es sont différents entre l’agrégation et le capes : 2 % des admis·es à l’agrégation proviennent de l’INSPE. Cela montre que les possibilités de préparer l’agrégation tout ayant suivi une formation universitaire à l’INSPE sont plus faibles qu’auparavant : c’est l’une des conséquences de la réforme Blanquer. Auparavant, la majorité des programmes concordaient et les étudiant·es pouvaient se préparer aux deux concours. Ce n’est plus le cas. L’INSPE n’a pas de filière spécifique de préparation à l’agrégation contrairement aux Universités. La partie disciplinaire du Master MEEF ne permet pas d’aborder une préparation agrégation sereinement.
Pour le SNES-FSU, il n’est pas possible de créer une rupture au sein du 2nd degré : il faut que les candidat·es puissent se préparer autant à l’agrégation externe qu’au CAPES et qu’ils et elles puissent bénéficier d’une année de report de stage une fois lauréat·es du CAPES.
En cela, le projet de réforme des concours n’apporte aucune solution aux problèmes bien au contraire. Ainsi le SNES-FSU porte une autre réforme des concours pour améliorer notamment les conditions de préparation des candidat·es.
Il faut aider les candidat·es
Pour lutter contre la contractualisation et la paupérisation de l’entrée dans le métier, le SNES-FSU porte l’obligation pour l’État d’investir dans l’aide sociale aux étudiant·es : revalorisation et élargissement des bourses, augmentation du nombre de logements sociaux et étudiants et mise en place d’une allocation d’autonomie pour l’ensemble des étudiant·es.
Pour le SNES-FSU, il est primordial que le Ministère se préoccupe de tous les profils de candidat·es : il doit prévoir des aides financières et des adaptations professionnelles lorsque le ou la candidat·e travaille en parallèle afin d’encourager les candidat·es qui n’ont pas obtenu le concours la première année de le repasser. 16 % des recalé·es à la session de 2022 et qui ont candidaté en 2023 ont été admis·es. Il faut également que le Ministère et les jurys publient systématiquement des listes complémentaires afin de limiter la perte de poste dans le cas des doubles admissions et pour pourvoir l’ensemble des postes ouverts.
Pour retrouver l’attractivité, il faut aussi pré-recruter !
Pour le SNES-FSU, l’un des leviers efficaces pour encourager les étudiant·es à préparer les concours, favoriser la mixité sociale et démocratiser l’accès à nos métiers est le pré-recrutement massif qui consiste en un concours disciplinaire.
Le pré-recrutement permettrait d’améliorer l’accès des étudiant·es des milieux populaires aux métiers de l’enseignement et de l’éducation. Il commencerait à partir de la L1 puis à tous les niveaux, sous statut d’élève-fonctionnaire rémunéré·e et avec un engagement quinquennal à l’obtention du concours. Ainsi, on entrerait plus tôt dans la carrière et ces années sont prises en compte pour la retraite. C’est un levier d’amélioration de la formation, de stabilisation du vivier : les pré-recruté·es n’ayant d’autre obligation que d’étudier. Le master, en premier lieu le master disciplinaire ou de psychologie (mais également le master MEEF totalement remanié) doit faire partie du pré-recrutement.
Bilan
Le SNES-FSU est attaché aux trois voies d’accès aux concours et à la diversité des profils de lauréat·es qui font la richesse de nos métiers et apportent beaucoup aux élèves. Selon les disciplines, les profils de lauréat·es sont très variable : il faut donc impérativement garder cette souplesse dans les concours du 2nd degré pour ne pas aggraver la crise du recrutement dans certaines disciplines. Les étudiant·es qu’ils et elles soient à l’INSPé ou pas, doivent pouvoir préparer et réussir les concours.
La crise de recrutement et d’attractivité que subit l’Éducation Nationale n’est nullement liée à la place du concours dans le cursus mais bien aux conditions de travail et aux salaires une fois le concours obtenu. Quelle que soit la place du concours, les étudiant·es sont toujours nombreux et nombreuses à se présenter aux concours du 2nd degré. Toute réforme de la formation initiale qui ne prendrait pas en compte les profils des admis·es dans le second degré et les particularités des métiers et disciplines serait une erreur stratégique pour le Ministère.L’objectif premier doit être pour notre employeur l’augmentation du nombre de postes ouverts aux concours dans le cadre des recrutements pluriannuels, une revalorisation des salaires, la fin de la politique d’austérité budgétaire et de gestion de la pénurie pour améliorer les conditions de travail.