Monsieur le directeur, Monsieur le président, Mesdames Messieurs
Le CSE dans sa précédente séance du 22 mai, s’est exprimé quasi-unanimement contre les nouveaux programmes d’EMC. Des amendements intersyndicaux soutenus par la FCPE ont par ailleurs été votés pour retirer méthodiquement toutes les mentions au SNU et aux classes engagées. Le SNES-FSU a dénoncé ces références, obsessionnelles, au SNU dans les programmes. Elles sont le fruit d’une commande politique, quitte à instrumentaliser sans état d’âme des outils de référence pour les professionnel·les comme le sont les programmes scolaires. Le programme d’EMC ne peut pas promouvoir un dispositif qui est non seulement facultatif et marginal mais qui entre en contradiction avec l’idée même d’une éducation démocratique.
Il faut croire que nous n’avions pas encore tout à fait vu juste en parlant d’obsessions et d’instrumentalisation. Il faudrait bien davantage parler de dirigisme idéologique ! Une idéologie qui imprègne délibérément tous les supports pédagogiques. Le récent sujet d’EMC pour le DNB d’Amérique du Nord est sans conteste une provocation qui en dit long des intentions du gouvernement et du ministère. Faire des sujets de DNB un élément de propagande pour vanter les mérites du SNU, il fallait y penser !
Un jeune public contraint, pour réussir son examen, d’endosser un rôle de zélateur du SNU est inconcevable en terme éducatif mais le ministère et l’inspection l’ont fait ! Nous sommes bien loin de l’esprit critique que les personnels ont pour mission de développer chez leurs élèves. Voilà qui confirme les inquiétudes que toute la communauté éducative a exprimée en CSE concernant le contenu et les orientations des manuels labellisés.
Cette instrumentalisation du champ éducatif et pédagogique à des fins idéologiques sera dénoncée aujourd’hui encore dans ce CSE pour les programmes de français et mathématiques pour les cycles 1 et 2. Intégrer dans ces projets de programmes scolaires, la prise en compte des évaluations nationales est un mélange des genres impensable, proprement inacceptable.
Car agir sur les attendus des apprentissages en vue de contraindre les pratiques professionnelles à exploiter des tests standardisés que toute la profession du CP à la Seconde rejette, met à nu une caporalisation rampante qui retirerait aux personnels la liberté de penser leur métier, liberté déterminante pour tenir compte du réel de la classe et faire réussir l’ensemble des élèves.
Imposition des méthodes, évaluations nationales généralisées sur chaque année du collège, labellisation des manuels, progression et évaluation communes, supports et traces écrites identiques sur toutes les classes du collège comme cela est préconisé dans le dernier vade-mecum destiné aux principaux et principales de collège, mise à disposition d’applications pilotées par l’IA et les neurosciences pour différencier les apprentissages… Mais quelle liberté pédagogique restera-t-il à très court terme aux enseignant.es pour accompagner au mieux les élèves dans leurs apprentissages ?
Pour le SNES-FSU, le « Choc des savoirs » n’est pas seulement une sélection méthodique des élèves autorisé·es ou non à accéder au lycée ou à poursuivre dans le supérieur. Il s’agit aussi d’une attaque majeure contre nos métiers pour requalifier nos missions de conception en missions d’exécutants, répétiteurs, dociles et dépourvus d’autonomie afin de nous faire appliquer des programmes sans ambition, avec les pratiques professionnelles préconisées.
Le projet de réforme de la formation initiale avec le concours en milieu de L3 achève la reconfiguration de nos métiers. En plus d’exigences académiques revues à la baisse compte-tenu des deux ans de formation universitaire en moins, les nouvelles épreuves ne demandent aux candidat.es aucune connaissance de programmes scolaires, aucune ébauche de réflexion sur leur mise œuvre, aucun élément de didactique ou d’épistémologie des savoirs alors qu’ils sont facilement et fréquemment contestés dans la classe.
Cette entreprise de déspécialisation et de déqualification de nos métiers ne fera qu’aggraver la crise de recrutement dans l’enseignement. Qui pourrait en effet se risquer à s’engager dans un métier exposé, sans maîtrise disciplinaire, avec une formation au rabais, désuniversitarisée, et limitée à l’appropriation de guides, vadémécums, et autres « bonnes pratiques » ? De quoi conduire les personnels à être définitivement sous la coupe des hiérarchies.
Le SNES-FSU lutte contre l’ensemble de ces évolutions qui font système pour un second degré moins démocratisant avec des personnels moins qualifiés, moins autonomes, moins reconnus, et toujours pas revalorisés. Il continue de mobiliser sous des formes les plus variées les personnels pour refuser toutes les mesures du « Choc des savoirs », y compris en constituant une majorité au sein des conseils d’administration.
Le SNES-FSU demande le retrait de l’ensemble des mesures du « Choc des savoirs » afin d’éviter la catastrophe annoncée que seront la rentrée et l’année 2024. Le SNES-FSU demande également le retrait des projets de maquettes de CAPES et le report du projet de réforme de la formation initiale.