Faire le pari de l’éducabilité de tous, c’est refuser que l’école dans les quartiers en difficulté soit une « école à part », aux ambitions réduites. Mais comment prendre en compte les difficultés sociales et scolaires et permettre à tous les élèves de réussir ? Les pistes de réflexion sont nombreuses, tracées par différents champs de recherche à partir d’expériences de terrain. Sabine Kahn (ULB Bruxelles) montre comment les meilleures intentions peuvent creuser les écarts et évoque les dérives potentielles des activités de projet. Les élèves les moins bons ont ainsi tendance à rester cantonnés dans des tâches de bas niveau. Elle défend– rejoignant les travaux de Bernard Rey – la nécessité d’une médiation entre les univers culturels, d’une explicitation des attendus et surtout la nécessité d’une confrontation récurrente de tous les élèves à la complexité.
Maintenir les exigences
Il est parfois conseillé de donner une forme ludique et séduisante aux dispositifs pédagogiques (façon de présenter, de poser un exercice) pour motiver les élèves. Or ces façons de faire rendent souvent opaques la finalité même de l’apprentissage visé. Les élèves les plus faibles vont dépenser plus d’effort à interpréter le dispositif qu’à travailler le « nœud »du problème (André Tricot, colloque CNESCO2017). Il s’agit donc bien de mobiliser les élèves sur les apprentissages et – comme le soulignait Jacques Bernardin lors du colloque FSU de 2014 sur l’éducation prioritaire – de s’inscrire dans une approche culturelle ambitieuse des programmes pour que le « commun » ne se réduise pas à un repli sur des apprentissages fondamentaux asséchés, à une instrumentalisation courte et techniciste visant l’employabilité, sous la pression évaluative.Pour ce faire, il faut pouvoir prendre en compte la diversité des élèves dans des classes moins chargées, donner du temps aux enseignants pour réfléchir et travailler ensemble,pour mettre en place des pratiques pédagogiques diversifiées en se fondant sur les résultats de recherches scientifiques, d’expérimentations. Les résultats de ces travaux doivent être mis à leur disposition dans le cadre de la formation initiale et continue pour leur permettre en tant qu’enseignants concepteurs de faire des choix éclairés.
« Dossier L’éducation Prioritaire – Supplément au N° 781 du 22 septembre 2018 »


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