Les discussions sur les mesures salariales que le gouvernement persiste à appeler « revalorisation » ont repris depuis quelques semaines. Dans une première réunion très générale le 18 janvier, le ministre de l’Éducation nationale s’est borné à reprendre les éléments de langage présidentiels alors même que le SNES-FSU a montré, preuve à l’appui, que les promesses présidentielles relevaient de la tromperie.
Plusieurs réunions vont se tenir jusqu’en mars et porteront sur la partie socle (augmentation des rémunérations sans contreparties) et la partie pacte (le travailler plus pour gagner plus à travers des missions supplémentaires).
- mardi 24 janvier : réunion n°1 sur le socle
- mardi 7 février : réunion n°1 sur le pacte
- mercredi 15 février : réunion n°2 sur le socle
- lundi 6 mars : réunion n°2 sur le pacte
- lundi 13 mars : réunion de synthèse
Dès la première réunion mardi 24 janvier, le SNES-FSU a dénoncé la stratégie du ministre qui persiste à découper les discussions en deux parties distinctes, d’un côté la partie socle, de l’autre côté la partie pacte, alors même que les deux sont liées (cf ci-dessous).
Les hypothèses sur le socle
Le budget 2023 prévoit 635 millions d’euros pour l’application des mesures cette année (de septembre à décembre 2023), et 1,9 milliard en année pleine, sur 12 mois. Le SNES-FSU a estimé que, pour une augmentation de 10 % de tous les personnels, il faudrait 1,2 milliards sur 4 mois et 3,6 milliards sur une année pleine….et ces 10 % ne sont pas suffisants puisqu’ils ne couvrent même pas les pertes de ces dernières années !
Le ministère a présenté deux hypothèses de répartition de l’enveloppe d’1,9 milliards
Le Snes, avec la Fsu, a immédiatement pointé les limites de cette présentation
– les documents ne mentionnent pas les agrégés ! Oubli ou volonté délibérée d’oublier une partie de nos collègues ? Le SNES-FSU a dénoncé la disparition des agrégés des documents et a exigé qu’ils soient concernés de la même façon que les autres catégories par les mesures socle
– les deux hypothèses s’inscrivent dans la suite du Grenelle : le ministère pense les mesures salariales à coup de primes, dans la continuité de la prime d’attractivité lancée par Jean-Michel Blanquer. En pleine mobilisation contre la réforme des retraites, alors que les primes n’entrent pas dans le calcul de la retraite, cette proposition a tout d’une provocation ! Le SNES-FSU a rappelé son exigence de refonte des grilles indiciaires.
– des éléments de comparaison trompeurs et hypocrites ! Le ministère fait ainsi une comparaison avec l’année 2020 pour mettre en avant les prétendus effets de sa politique salariale. Autrement dit, un collègue qui ne serait concerné par aucune mesure en 2023 voit quand même, selon les tableaux du ministère, sa rémunération augmenter. Et par quelle bizarrerie ? Tout simplement car les services ministériels mélangent plusieurs mesures qui n’ont rien à voir avec les concertations en cours, comme le dégel du point d’indice ou la prime informatique ! Tout collègue ayant bénéficié du dégel du point d’indice est donc présenté comme étant augmenté en 2023 dans le cadre des mesures socle ! La recette indigeste du ministère : mélangeons des choux et des carottes et peu importe ce qu’il en sortira dès lors qu’il y a un + quelque part !
– l’hypothèse A revient à concentrer les mesures sur les débuts de carrière mais ne prévoit strictement aucune mesure salariale pour les collègues dans la 2eme moitié de leur carrière, alors même que ces collègues subissent, comme tout le monde, les effets de l’inflation et qu’ils n’ont pas bénéficié des mesures du quinquennat précédent. Pour le SNES-FSU, il est hors de question qu’ils soient les grands oubliés : les mesures salariales (rattrapage et revalorisation) doivent concerner tout le monde, début, milieu et fin de carrière !
– l’hypothèse B revient à un exercice de gestion de la pénurie puisqu’il s’agit de répartir l’enveloppe de 1,9 milliard sur l’ensemble des personnels, avec des montants dérisoires pour une bonne partie des collègues dans leur 2eme moitié de carrière.
-Des propositions ont aussi été faites concernant l’élargissement des possibilités d’accès à la classe exceptionnelle. L’accès automatique à l’échelon spécial de la classe exceptionnelle a aussi été évoqué. Ces propositions vont dans le bon sens mais nécessitent un chiffrage plus précis afin d’en mesurer les impacts concrets.
Socle – Pacte : tout est lié…
Le ministère persiste à ne pas présenter sa vision globale du dossier. Pourtant, à la lecture des tableaux présentés et des déclarations ministérielles et présidentielles, les choses sont claires.
Les mesures « socle », quelles qu’elles soient, conduisent à un aplatissement de la progression de la rémunération passé les 15 premières années de carrière. C’est d’autant plus évident que la prétendue revalorisation se fait à coup de primes qui n’ont rien de pérenne.
Quelle est alors la perspective offerte à des collègues qui souhaiteraient légitimement être mieux payés ? Le pacte et son cortège de missions supplémentaires ! Autrement dit, le ministère fait des choix ciblés avec les mesures socle pour mieux vendre et imposer le pacte. Or, ce dernier est un profond outil de dénaturation de nos métiers : en valorisant les missions supplémentaires, il accroît la charge de travail et décentre le cœur de nos métiers de l’enseignement vers d’autres tâches.
C’est aussi une autre vision de la Fonction publique qui se dessine : il y a là une forme de renoncement à la Fonction publique de carrière dans laquelle la rémunération évolue principalement du fait de la progression de carrière dans le temps, au profit d’une Fonction publique d’emploi dans laquelle la rémunération évolue en fonction du poste occupé et des missions acceptées. Durant toute la campagne présidentielle 2022, et dès 2017, Emmanuel Macron n’a jamais caché son souhait d’attaquer frontalement le statut de la Fonction publique, et si le ministère n’a pas confirmé la possibilité d’imposer le pacte aux nouveaux entrants, les menaces sur nos métiers et nos statuts sont bien là !
Le pacte est aussi un redoutable moyen d’accroître la concurrence entre les personnels, d’individualiser nos métiers. En valorisant les missions supplémentaires, il va aussi contribuer à accroître les inégalités femmes/hommes. En effet, le recours aux heures supplémentaires et aux indemnités est plus favorable aux hommes qu’aux femmes et aggrave les inégalités salariales de genre. La logique du pacte étant de faire travailler plus les personnels, sur la base de missions supplémentaires rémunérées par des indemnités, il est désormais évident, pour qui en doutait encore, que la revalorisation promise par Pap Ndiaye sera une revalorisation masculine…
Les exigences du SNES-FSU
Le SNES-FSU dénonce la logique du travailler plus pour travailler plus et exige
- Une augmentation des salaires sans contreparties pour toutes et tous : professeurs, CPE, PsyEN en début, milieux et fin de carrière (extrait de la déclaration du SNES-FSU au CSE du 26/01 “Le SNES avec la FSU revendique une revalorisation des salaires en début, milieu et fin de carrière sans aucune contrepartie. Cette revalorisation doit concerner tous les corps, pour ce qui est du second degré, les professeurs certifiés, agrégés, de chaires supérieures, les CPE et les psychologues de l’Éducation Nationale”.)
- Un rattrapage des pertes de pouvoir d’achat et une revalorisation des carrières.
- Une loi de programmation pluriannuelle
- Un mécanisme pérenne d’indexation des salaires sur les prix.
- Une augmentation des salaires des AED et des AESH, ainsi qu’un statut de fonctionnaire de catégorie B pour les AESH.
Salaires, retraites, conditions de travail, les trois thématiques sont liées et sont au coeur des mobilisations contre la réforme des retraites. Le SNES-FSU travaille aussi la construction de mobilisation sur des questions sectorielle, en particulier celle des salaires. Dès maintenant, soyons nombreuses et nombreux en grève le mardi 31 janvier contre la réforme Borne des retraites, et rendons aussi visibles nos exigences salariales !