Contrairement à ce que prétend Jean-Michel Blanquer, cette rentrée n’est pas normale. Les conditions sanitaires la rendent exceptionnelles et le Ministre a montré bien peu de préoccupations pour la santé et la sécurité des personnels et des élèves. Mais il montre aussi bien peu de considération pour les conditions de travail des élèves et des personnels. Suppressions de postes, réformes inégalitaires, redéfinition des métiers, le Ministre continue de dérouler son projet. Tout fait sens et s’articule pour dessiner les contours d’un projet éducatif dont l’émancipation de tous par la construction d’une culture commune riche n’est pas la finalité.
En refusant de faire les investissements nécessaires pour que le service public d’éducation puisse fonctionner dans les meilleures conditions possibles pendant cette crise sanitaire, le gouvernement accélère la déstabilisation de l’école publique : école minimale, appuie à la concurrence du privé et du marché, externalisation d’enseignements, tentative de transformation de nos métiers pour s’attaquer aux statuts. Par petites touches, se dessine un projet éducatif clivant et idéologique attaché à développer des élites très bien formées, assortis de dispositifs destinés à promouvoir quelques jeunes des catégories populaires dont on vantera et la volonté et le mérite. Pas de volonté émancipatrice globale, pas de bouleversement de l’ordre social, des personnels réduits à des rôles d’exécutants ! Quand le SNES-FSU exige des moyens et du respect pour les personnels c’est au nom d’une école publique ambitieuse pour tous, partout, tout le temps.
Rentrée 2021 – Blanquer purge le second degré
1800 suppressions d’emplois dans les collèges et lycées ! Le ministère se moque totalement de l’augmentation des effectifs, de la situation sanitaire qui impose particulièrement des mesures pour faire baisser les effectifs par classe à court et moyen terme et de l’état de fatigue des personnels, épuisés par des années de dégradation des conditions de travail et une rentrée hors normes. Cela porte à 7490 le nombre d’emplois supprimés depuis 2018 alors que pendant le même temps les effectifs auront augmenté de près de 68 000 élèves. Et la pression démographique ne va pas baisser alors que les enfants du baby-boom de la fin des années 2000 arrivent au lycée.
Ces décisions budgétaires (faire des économies sur le dos des élèves et des personnels) et idéologiques (augmenter le nombre d’heures supplémentaires pour faire travailler plus pour ne pas gagner plus) sont irresponsables.
Salaires : quelle revalorisation ?
400 millions seraient consacrées à la « revalorisation ». Pour le SNES-FSU c’est notoirement insuffisant. En outre, le Ministre ne cache même plus sa volonté de s’en servir comme prétexte pour redéfinir nos métier : cette refonte du métier rappelle furieusement des tentatives antérieures pour modifier les missions, individualiser davantage les rémunérations et/ou donner plus de poids aux hiérarchies locales Comment peut-il prétendre parler de revalorisation ?
Education Prioritaire : le grand renoncement ?
La liste est longue des attaques contre la politique de l’éducation prioritaire : absence de politique éducative visant à réduire les inégalités, réduction des moyens, prescriptions et injonctions descendantes, professionnalité des personnels malmenée, délabellisation des lycées en 2014, et peut-être celle des REP en 2021. Depuis la parution du rapport Azéma-Mathiot « Territoires et réussite », le ministre évoque le projet de délabelliser les deux tiers de l’éducation prioritaire (les REP) et de diluer les moyens afférents au gré d’une allocation progressive qui prendrait en compte non seulement des critères sociaux mais aussi territoriaux. Dans les lycées, les personnels découvrent qu’ils ont perdu le bénéfice de la clause de sauvegarde.
Collège
Les effectifs par classe ont encore augmenté en collège, même en éducation prioritaire. Alors que les inégalités scolaires se sont creusées pendant le confinement, rien n’a été pensé pour y remédier sinon des dispositifs d’externalisation de l’aide apportée (devoirs faits, extraction de cours des Sixièmes les plus en difficulté pour leur apporter du soutien en français et en mathématiques) peu pertinents. Le temps d’enseignement ne cesse de se réduire au profit d’activités autres (quart d’heure lecture, accompagnement à l’orientation, …).
Certains principaux ont remis en place un fonctionnement limitant le brassage des collégiens sans concertation avec les équipes à la rentrée. L’organisation 1 classe/ 1 salle provoque de telles complications de fonctionnement pour les enseignants et de sécurité pour les élèves lors des interclasses quand ils ne sont pas surveillés que la plupart des collèges sont revenus à une organisation plus traditionnelle.
L’épuisement des collègues y atteignait leur paroxysme. Dans certaines disciplines, les enseignants n’avaient plus accès à leurs salles spécialisées et se sont trouvés démunis pour exercer leur métier.
Lycée/bac
Condamnés à préparer des cours sans connaître précisément le temps alloué pour traiter les programmes, les enseignants sont confrontés à la réalité de groupes aux effectifs pléthoriques avec des élèves rassemblés au gré des choix individuels d’enseignements. Comment traiter des programmes aussi lourds en un temps si contraint par l’échéance de l’examen en mars ? Comment préparer au grand oral alors que rien ne vient en préciser les modalités au-delà du cadrage général préconisé par la note de service du13 février 2020 ?
Le lycée Blanquer, c’est moins d’enseignements avec une formation atomisée en parcours individuels sans cohérence et des emplois du temps éclatés pour tous. Alors que la crise sanitaire imposerait la réduction des effectifs et du brassage, ces précautions sont sacrifiées sur l’autel de la mise en œuvre des réformes du lycée et du bac « quoiqu’il en coûte ». La voie technologique subit de plein de fouet les effets de la réforme du lycée.
L’apologie du numérique éducatif à la sortie de la crise de la Covid, en plus de faire la part belle à la marchandisation de l’école, sert de prétexte à la pérennisation de dispositifs inquiétants pour nos métiers et pour le service public. Rôle accru des régions dans l’orientation réduite à l’adaptation à l’emploi de court terme, complaisances envers l’enseignement privé, pressions sur les personnels pour faire taire les critiques, le bilan est lourd et bien loin d’un système scolaire juste et ambitieux. Le second degré est à la croisé des chemins. C’est l’avenir du service public qui est en jeu.
Agissons ensemble !
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