Représentants du SNES-FSU : Xavier Hill et Sonia Mollet
Représentants du CSP : Michel Lussault, Sylvie Plane, Denis Paget, Pierre Laporte, Roger-François Gauthier et une chargée de mission dont nous ne pouvons indiquer le nom (nous la prions de nous en excuser).

Michel Lussault nous expose d’abord le cadre :

Le programme sera soumis à l’approbation du CSP le 17 décembre (le lendemain de notre rencontre avec le CSP) et devrait être rendu public à partir du vendredi 18 décembre.
De nombreuses rencontres ont déjà eu lieu, avec l’Académie des Inscriptions et des Belles Lettres, avec les associations disciplinaires, des universitaires. Les organisations syndicales sont donc finalement reçues à leur tour.
Le choix a été fait de ne pas procéder à la rédaction des programmes d’enseignements de complément dans le cadre d’un groupe d’experts disciplinaires mais de les élaborer à l’interne.
Il souligne que ce sont des programmes différents des autres du fait du statut des enseignements de compléments, cadrés par la circulaire dans le contexte de la réforme.
Le CSP a conscience que ce programme sera mis en place différemment dans les établissements en fonction des choix et volumes horaires.
Le CSP avait la volonté de produire des programmes substantiels, de vrais programmes, permettant de donner une légitimité aux disciplines par les contenus à enseigner. Il s’agissait de proposer un programme appétent, dynamique, de façon à ce que les élèves arrêtant leur cursus en fin de 3ème aient des acquis satisfaisants et que ceux qui souhaitent poursuivre au lycée bénéficient d’une base solide.
Le programme a été pensé comme la découverte d’une « troisième langue », au moment où l’élève débute l’apprentissage d’une seconde langue vivante. Il est présenté comme un programme « d’enrichissement » qui ne doit pas être compris comme extra-ordinaire (au sens « pas réservé à un petit nombre »). Le choix a été fait d’entrer dans les apprentissages par la culture littéraire, historique et artistique mais il propose également une vraie découverte des langues anciennes. La volonté de placer le grec en perspective dès la cinquième est affichée.

Sylvie Plane prend ensuite la parole pour rappeler les dilemmes auxquels le CSP s’est trouvé confronté.

S’il a pu être question de séparer l’étude de la langue de celle de la culture (qui aurait été réservée à l’EPI LCA) ce n’est finalement pas le choix qui a été fait car les deux sont intimement liées.
Comment concilier un programme qui soit appétent et donne l’envie de poursuivre l’apprentissage sans faire pour autant un programme de saupoudrage ?
Ménager les professeurs expérimentés, qu’il ne faut pas trop perturber dans leurs pratiques, et donner des repères aux nouveaux collègues. Ainsi, le même principe que pour les programmes du socle a été appliqué : les objectifs sont cadrés, les pistes pédagogiques ne sont pas enfermantes.

Elle justifie certains choix opérés :
Mettre en relation le latin et le grec peut participer à la mise en appétit des élèves, leur donner l’envie d’étudier le grec en classe de 3ème. Il est important, pour des latinistes, d’avoir des ouvertures sur la culture grecque.
Pas de problématisation, mais des grands domaines d’étude qu’il est possible de croiser. La seule contrainte est de traiter les différents ensembles, de façon à éviter le tout civilisation. Ce sera au professeur de construire ses problématiques.
La perspective retenue est l’insistance sur l’alternance entre le sentiment de proximité et celui de mise à distance que l’on peut avoir lorsque l’on se confronte à l’antiquité.
Concernant l’étude de la langue, il fallait trancher entre décider « d’outiller » lourdement les élèves ou faire des choix. Comment les faire ? Il y a le poids de la tradition, le paramètre de la difficulté, celui de la rentabilité. Il est parfois difficile de juger ce qui est « linguistiquement rentable ». Rencontre-t-on si fréquemment les comparatifs et les superlatifs ou les étudie-t-on par tradition ? Dans le programme de grec, il est apparu nécessaire d’ajouter l’observation du participe.

Intervention du SNES

Nous remercions le CSP pour cette rencontre.
Nous indiquons notre soulagement devant ces « vrais » programmes qui ne dynamitent pas nos disciplines, comme on pouvait le craindre en raison des déclarations de la Ministre au printemps, de la présence de l’EPI LCA, de la perte d’une heure par niveau qui réduit considérablement le temps d’apprentissage. Au cours de ces vingt dernières années, elles se sont ouvertes, diversifiées, sortant d’un enseignement presque exclusivement centré sur l’étude de la langue et la traduction. Nous tenons désormais à cette diversité et nous aurions regretté de devoir renoncer à une des composantes de l’étude des Langues et cultures de l’antiquité. Cependant, la réalité de la réforme est là, malheureusement, et la diminution de l’horaire a conduit à des choix.

Pour ce qui est de l’étude de la langue, il était clair pour nous que le programme de 2009 était trop lourd. Nous attirons l’attention du CSP sur la différence de conception dans ce domaine, entre les programmes de français, qui préconisent d’insister sur le système de la langue, et ce programme qui se présente encore comme une liste de points grammaticaux à étudier, de façon très traditionnelle. Nous soulignons qu’il est possible d’aborder les déclinaisons, comme les conjugaisons, non pas de façon verticale, mais en faisant apparaître le système de la langue (pour le latin, par exemple, les désinences similaires dans la déclinaison des noms et celle des pronoms, la construction des temps et des modes verbaux avec les désinences et la suffixation). Cette façon de procéder n’empêche pas la progressivité. Elle permet de comprendre le fonctionnement linguistique et représente également pour les élèves une économie d’apprentissage.
En conséquence, Denis Paget indique qu’il sera mentionné sur le programme qu’il est important de faire apparaître les régularités de la langue.

Nous sommes ensuite interrogés sur le choix de garder les textes authentiques au cœur des apprentissages. Pour nous, travailler avec des textes fabriqués peut permettre de créer des automatismes, ce qui est nécessaire quand on apprend une langue, mais ne représente pas la stimulation intellectuelle du texte authentique. Celui-ci met l’élève en situation d’investigation, face à un contenu plus profond. Il n’est pas question non plus de toujours mettre les élèves en situation de difficulté, sous peine d’en laisser un certain nombre de côté. C’est donc à l’enseignant de savoir placer le curseur. Nous convenons que la formulation choisie par le CSP, « les élèves fréquentent régulièrement des textes authentiques variés, littéraires ou non, appartenant à des époques et à des genres différents » permet la liberté pédagogique nécessaire tout en insistant sur la priorité donnée aux textes authentiques.

Nous abordons la partie « Culture littéraire, historique et artistique ». Nous interrogeons à plusieurs reprises le choix de la priorité donnée à l’approche historique des Langues et cultures de l’antiquité, alors même que les collégiens du cycle 4 ne reviennent pas sur l’histoire antique. Nous n’obtenons pas de réelle réponse. Si la mythologie a été évincée du programme comme objet central d’un domaine d’étude, c’est parce que les élèves l’ont abordée au cycle 3, nous dit-on. Par ailleurs, Sylvie Plane nous indique qu’ici ou là, dans les entrées proposées, il est possible d’y revenir, ce qui est vrai, cet aspect est seulement moins central.

Nous sommes également étonnés par le peu de lien établis avec le programme de français. Si celui-ci se contente de mentionner une fois par niveau la possibilité d’étudier des textes antiques en lien avec les questionnements, les programmes de l’enseignement de complément pourraient, eux, être davantage articulés au programme de français et aborder certains points des grands domaines prévus en LCA en résonance avec les questionnements du français. On trouve, dans le texte, une mention rapide de ces liens, qui nous semblent pouvoir être renforcés. En effet, sans lien avec les contenus d’histoire-géographie, sans articulation avec le français, l’enseignement de complément semble « hors-sol ». Le CSP admet que la formulation peut être reprise de façon à insister davantage.

Nous proposons par ailleurs un certain nombre de pistes pour compléter l’approche littéraire, historique et artistique. Si certaines sont jugées pertinentes, il n’est pas évident de leur trouver une place dans une structure déjà figée et elles sont fréquemment renvoyées aux documents d’accompagnement. On nous indique aussi qu’il n’est pas nécessaire d’entrer dans le détail, les formulations larges suffisent.

Nous faisons remarquer la fréquence (plus importante que dans les autres programmes) de la mention des EPI. Ne serait-il pas possible d’évoquer simplement des pistes d’interdisciplinarité ? Pour le CSP, c’est une question de pragmatisme dans la mesure où l’enseignement de complément n’existe qu’adossé à l’EPI. Nous maintenons pour notre part notre refus de ce dispositif – même si le cas des Langues et cultures de l’antiquité est particulier- qui ne permet pas un réel travail interdisciplinaire et nous indiquons que nous referons cette remarque en CSE.
Nous demandons enfin s’il est probable que le texte fasse l’objet d’une consultation. Il nous est répondu que compte tenu du calendrier, il importe désormais que les professeurs disposent des programmes et qu’il ne faut plus perdre de temps.
Le CSP pense qu’il est possible que ce texte soit soumis en commission spécialisée dès celle de janvier.

Bilan de l’audience

Il n’était pas prévu de toucher au texte davantage qu’à la marge. Cette rencontre intervient à un moment de l’élaboration où il n’est plus possible de participer réellement à la réflexion.
Il est évident que ces programmes ne satisferont pas tout le monde. On peut les juger trop allégés (dans la mesure où l’horaire diminue) et le regretter, bien sûr. On peut juger qu’ils sont trop lourds (le programme de grec, en particulier, semble pléthorique) pour un horaire dont on n’est pas sûr qu’il corresponde toujours à 1h-2h-2h – mais à ce compte-là, leur dimension conséquente permet de mettre en avant la nécessité d’avoir l’horaire complet pour les traiter.
Nous ne mettons donc pas en cause le manque d’ambition de leur contenu. Il est clair qu’un élève qui sortirait de 3ème en ayant acquis ces connaissances et ces compétences serait extrêmement bien outillé pour la suite de sa scolarité dans nos disciplines. Nous apprécions aussi la volonté de remettre le grec en lumière, dès le début de la scolarité en latin. Quel dommage que cette dynamique revendiquée intervienne quand les horaires compromettent l’Enseignement Conjoint des Langues Anciennes !
Pour notre part, nous regrettons surtout le fait que ce programme soit très marqué par un enseignement traditionnel. La grammaire, l’histoire, sont abordées de façon très verticales. La dimension littéraire de nos disciplines ne nous paraît pas suffisamment mise en avant. Si le CSP a affirmé la volonté d’aborder l’apprentissage du latin un peu comme celui d’une « troisième langue vivante », nous nous étonnons de trouver si peu de place pour l’oralisation. Nos critiques à l’égard des programmes de français ne nous empêchent pas de reconnaître qu’il comportait de bonnes intentions : aborder la langue en mettant en avant son système, entrer dans les textes par des questionnements. Il nous semble dommage que les enseignements de complément n’aient pas pris, eux aussi, cette direction ; cela les aurait inscrits davantage dans la modernité. La consultation des organisations syndicales a malheureusement eu lieu trop tard pour que de telles inflexions soient possibles ; elle nous a donné davantage l’impression d’une consultation de courtoisie que d’une réelle association à la réflexion, même si le CSP semble avoir retenu quelques propositions de modifications, à la marge.

Nous proposerons des amendements à ce projet de programme dans le cadre de la commission spécialisée et du Conseil supérieur de l’éducation de janvier.


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