Présentant une vision caricaturale du collège, la ministre a fait ses annonces sur la réforme du collège. Ce programme pédagogique n’invente rien, et renvoie aux débats de l’inopérant socle de 2005.

Retour aux savoirs « fondamentaux » (faisant l’impasse sur les acquis de la recherche), volonté de distinguer des enseignements « théoriques » et des enseignements « pratiques » interdisciplinaires, introduction de l’accompagnement personnalisé (qui est loin d’avoir fait ses preuves au lycée…), pas de doutes les choix de la ministre renvoient bien à une conception rétrograde du collège.
Najat Vallaud-Belkacem annonce également la généralisation de la LV2 en classe de Cinquième, qui ne pourrait avoir de sens qu’avec le maintien des horaires de LV à tous les niveaux afin que les élèves bénéficient d’un temps hebdomadaire « d’exposition à la langue » suffisant, et que les enseignants ne voient pas leur nombre de classes augmenter.

L’INTERDISCIPLINARITÉ MAGIQUE !
Or, cette mesure se mettrait a priori en place au prix de la diminution du temps d’enseignement en langues vivantes sur les autres niveaux (3 heures en Sixième, horaire globalisé de 5 heures entre LV1 et LV2 en cycle 4), et en supprimant les classes bilangues et européennes.
Quant à l’interdisciplinarité, elle n’est pas une baguette magique permettant de résoudre à elle seule les difficultés scolaires. Elle peut être un outil pour faire réussir les élèves et a son intérêt pour qu’ils fassent du lien entre les savoirs, mais elle ne peut être une fin en soi.
Des points de programmes permettant d’être traités en interdisciplinarité pourraient être identifiés dès la construction des programmes, pour qu’ils fassent culture. En tout état de cause, l’interdisciplinarité nécessite des moyens de concertation et de formation qui ne sont pas programmés.
La réforme proposée sera-t-elle de nature à vaincre la difficulté scolaire touchant 15 à 20 % des collégiens ? Il est permis d’en douter.
Aujourd’hui, les enseignants se battent au quotidien dans leurs classes et les problèmes qu’ils rencontrent sont clairement identifiés : augmentation des effectifs de classes, diminution des moyens pour le travail en groupe, manque de cohérence des programmes, multiplication des réunions et des prescriptions, mixité sociale et scolaire de plus en plus faible, absence de moyens pour la concertation et le travail collectif, formation initiale et continue des enseignants en berne. Ce sont ces sujets qui doivent être pris à bras-le-corps afin de permettre aux élèves de mieux réussir.
Les 4 000 postes créés ne sont pas en nombre suffisant pour permettre une diminution significative des effectifs des classes, et les moyens alloués ne permettent pas de généraliser le travail en groupes.

FAIRE RÉUSSIR TOUS LES ÉLÈVES
Faire réussir tous les élèves passe par de meilleures conditions d’apprentissage, une mise en cohérence des savoirs scolaires, des enseignants formés à des pratiques pédagogiques diversifiées et non par un discours désuet saucissonnant « fondamental » et « accessoire », « théorique » et « pratique ».
Les conseils supérieurs de l’Éducation des 12 mars et 10 avril seront décisifs sur la question du collège, du nouveau socle commun de connaissances, de compétences et de culture, et sur l’évaluation des élèves. Les nouveaux projets de programmes du collège devraient être en consultation à partir du 10 avril.

Sandrine Charrier et Bruno Mer


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