On peut se demander pourquoi la réunion multilatérale du 20 novembre s’est fait aussi longtemps attendre (les réunions de juillet avaient été annulées), alors que les annonces de la DGRH et de la DGESCO, en présence de la DGSIP, sont conformes aux premières déclarations des Ministres le 20 février, et aux rumeurs qui circulaient depuis… Les ministres n’ont pas mis à profit ce long délai pour tenir compte des avis exprimés par les syndicats de la FSU !
Maintien de la réforme pour la session 2022 du CAPES, du CAPET et du CPE
Les nouveaux concours doivent avoir lieu à la session 2022. L’agrégation n’est pas concernée. Les documents présentés le 20 novembre et la discussion n’ont pas porté sur le concours CPE (ni sur ceux des PEPS et PLP), sur lesquels la DGRH va « revenir rapidement ».
Le nouveau concours aura lieu en fin de M2, ce qui signifie que les master MEEF ad hoc doivent ouvrir en M1 à la rentrée 2020. Tous les syndicats de la FSU demandent le report de la mise en œuvre de la réforme. Mais la DGSIP estime qu’il n’y aura pas de difficulté : les conditions d’accréditation des maquettes seront « assouplies », il suffira d’un « dossier léger », et la fiche décrivant le contenu du concours donne « de larges pistes pour préparer les maquettes ». Le DGESCO M. Geffray explique, de son côté, qu’il faut se garder « d’accorder une prééminence au format du concours pour concevoir la maquette de formation », et qu’il a « presque envie de dire : ne les préparez pas au concours ».
Un master en alternance et très professionnalisant
Pourtant, le futur « master MEEF professionnalisant rénové [est la] voie d’excellence pour devenir professeur ». Ce nouveau MEEF « « prédispose à réussir [les nouvelles] épreuves » du concours (M. Geffray), surtout parce qu’il généralise le parcours en alternance. « Le fait d’être en situation, objectivement, prépare ». Sous statut contractuel de droit public, une part importante des étudiant-e-s de M2 MEEF 2021-2022 sera en établissement, pour l’équivalent d’un tiers de service. Les rectorats identifient, nous dit-on, depuis début novembre leurs « souhaits d’accueil ». Toutes les disciplines devraient être concernées. Le Ministère de l’Éducation nationale travaillera à « une égale répartition de la ressource [des berceaux d’accueil] dans le territoire », afin que les étudiants n’aient pas l’obligation de quitter leur académie pour trouver un support. La DGRH et la DGESCO estiment « raisonnable » de tabler sur un total de 10 à 12000 supports (1er et 2nd degrés), mais à quelle échéance : dès 2021-2022, ou plus tard ? Le 20 novembre, ce n’était pas très clair. Ces alternants seront en responsabilité de classe (stage filé ou massé, ce n’est pas fixé). La question de la rémunération n’est pas tranchée, il faudra qu’elle soit « compétitive » (DGRH).
Un concours très professionnalisé, qui laisse trop peu de place aux savoirs disciplinaires
Le schéma global du concours doit assurer au Ministère « que les compétences professionnelles sont bien détectées au travers des épreuves » :
– les deux épreuves écrites ne compteraient plus que pour 30 % de la note finale ;
– seule la première de ces épreuves est exclusivement disciplinaire ; une note éliminatoire d’au moins 5/20 serait cependant fixée, dans chaque section du CAPES et du CAPET.
– l’autre épreuve écrite, et la première des épreuves orales, sont des épreuves de « mise en situation professionnelle » (E. Geffray) : une épreuve de leçon, à l’écrit (les le/la candidat-e-s seraient muni-e-s « d’une tablette ou d’un ordinateur afin d’accéder à internet pour utiliser toute ressource qu’il juge pertinente ») ; une épreuve orale « de conception et d’animation d’une séance d’enseignement ou l’exploitation d’un support permettant d’apprécier à la fois la maîtrise disciplinaire et la maîtrise de compétences pédagogiques » ;
– la seconde épreuve orale est un entretien « sur la motivation du candidat et sa connaissance de l’environnement et des enjeux du service public de l’éducation, sa capacité à incarner [sic] et verbaliser les valeurs de la République et à se positionner en fonctionnaire. L’oral d’entretien doit permettre au candidat de faire valoir son parcours, mais aussi de valoriser ses travaux de recherche ».
La composition des jurys doit être modifiée, pour disposer « d’un regard croisé, avec des personnes nouvelles, RH par leur parcours professionnel antérieur », explique Mme Dubo, qui précise qu’il s’agira malgré tout de fonctionnaires.
Ce schéma doit être décliné dans les disciplines du second degré, l’IGESR est, dit le Ministère, déjà au travail. Il n’est pas question de toucher aux sections des concours (pas de modification des champs disciplinaires, donc), ni de supprimer les programmes de concours dans les sections où ils existent.
Une année de fonctionnaire-stagiaire à temps plein
Pour le SNES-FSU, le Ministère franchit une ligne rouge en prévoyant une mise à temps complet pour les stagiaires lauréat-e-s des concours, lorsqu’ils-elles sont issu-e-s des master MEEF, même s’il a été rapidement question de « travailler la formation » pendant l’année de T1. Celle-ci donnera-t-elle lieu à une petite décharge ? Rien n’est précisé. Répondant à notre opposition à la mise à temps plein des professeurs-e-s stagiaires, et au rappel du désastre qu’elle avait entraîné entre 2010 et 2015, M. Geffray argue que « 30 % en M2, c’est moins que 50 % en M2 aujourd’hui. Il y aura beaucoup d’observation en M1, c’est donc une progressivité favorable ». Les stagiaires qui ne seront pas passé-e-s par les MEEF, seraient affecté-e-s à mi-temps.
Les stagiaires seraient bien affectés temporairement dans une académie pour leur année de stage, avant une affectation définitive après la titularisation.
Le SNES-FSU s’oppose donc à cette réforme.
Sa mise en œuvre à marche forcée et l’absence de mesures transitoires vont aggraver ses effets aux sessions 2021 et 2022, puisque deux promotions d’étudiant-e-s seront empêchées de s’inscrire et/ou d’avoir une préparation en MEEF, d’où un nouvel effondrement du recrutement « sang neuf ».
Un concours trop professionnalisant diminuera très fortement et durablement le vivier de candidat-e-s, les contraindra à passer par la case « contractuel » et tendra à formater le profil des futurs fonctionnaires.
La fabrication d’un volant supplémentaire de précaires « en formation » entraînera une nouvelle baisse des postes aux concours.
Un service en responsabilité avant le concours est inacceptable et renforce la surcharge que tout le monde dénonce actuellement : l’année de M2 sera impossible à gérer pour les étudiant-e-s (service à tiers temps, master et mémoire à valider et concours à réussir).
Pour le SNES-FSU, la plus grande partie du master doit être consacrée à la maîtrise des disciplines à enseigner. L’essentiel de la formation professionnelle doit s’effectuer après réussite au concours. L’année de stage doit s’effectuer avec au maximum un service à tiers temps en responsabilité.