Cycle 4
Pour la première fois, les projets de nouveaux programmes incluent une Éducation aux médias et à l’information (EMI). Si cette initiative doit être soulignée, car elle manifeste une prise de conscience de l’importance de l’acquisition d’une culture de l’information par les élèves, elle s’accompagne néanmoins de déceptions.
Alors même, que dans le second degré, il existe des professeurs, experts dans ce domaine, les professeurs documentalistes, aucune référence explicite à leur rôle n’est mentionnée dans le préambule. L’intitulé « Éducation à » – qui a démontré ces dernières années toutes ses limites – ainsi que le renvoi de sa mise en œuvre dans le cadre des enseignements pratiques interdisciplinaires (EPI), ne peuvent qu’interpeller les professionnels de l’information que sont les professeurs documentalistes sur le réel intérêt de vouloir former les élèves pour qu’ils deviennent des citoyens éclairés.
S’il ne fait aucun doute que le programme de l’EMI est ancré dans le nouveau socle commun, la lecture du projet de programme quant à elle, de par sa forme (tableau recensant les compétences à construire, les connaissances associées étant en regard et « en vrac ») place le curseur du côté d’un enseignement utilitariste occultant une partie des enjeux fondamentaux d’une culture de l’information pour les citoyens de demain : la culture informationnelle ne peut se réduire à la bonne utilisation des « réseaux sociaux », à la connaissance et à l’exploitation d’un fonds documentaire, à la conception d’un produit multimédia ou bien encore à la simple information journalistique. Or, le programme tel que formalisé dans le projet présente le risque, non négligeable, de déclinaisons locales : ainsi, chaque établissement peut être amené à choisir, sélectionner parmi les compétences et les connaissances celles qui sont indispensables. Il sera tentant pour les établissements de se contenter de l’acquisition de compétences qui ne demandent aucun moyen humain ou en termes d’horaires. On est donc loin d’un cadre national et d’une garantie que tous les élèves aient le même enseignement.
L’absence de clarté et de hiérarchie dans les connaissances et les compétences à construire, de repères de progressivité rendent ce projet peu exploitable. On peut donc raisonnablement s’interroger sur les objectifs d’un tel programme. Veut-on faire des élèves des citoyens éclairés ou bien des utilisateurs avertis ? Si on ajoute à cela que les professeurs documentalistes ne sont pas particulièrement sollicités pour cet enseignement, il est à craindre que cet EMI, formalisé ainsi, ne soit pas à la hauteur de l’ambition formulée et que l’enseignement de celui-ci dépende uniquement des choix d’établissements.
Si ce projet présente des points positifs et montre une indéniable avancée, il souffre de l’absence d’une architecture structurant le programme, d’éléments permettant une réelle progression tout au long du cycle et une mise en œuvre pour former tous les élèves.


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