L’ONISEP promeut ainsi le programme Avenir qui « a pour ambition d’initier chacun à la compétence à s’orienter et à se réorienter tout au long de la vie, de façon à anticiper, plutôt que de subir l’évolution des métiers et de l’emploi ».

Pourtant, l’approche par les compétences, présentée comme allant de soi, ne fait pas consensus sur le plan scientifique (cf article du SNES-FSU du 6 sept 2023[1]). Ne s’appuyant aucunement sur des travaux en psychologie ou en sociologie, la notion de « compétences à s’orienter »  fonde son « idéologie » uniquement sur les recommandations de l’Union européenne (2007/2008) dont l’objectif est de faire sortir l’orientation du champ scolaire pour la rapprocher du monde de l’entreprise.

Dans une logique interministérielle, le programme Avenir devra mettre en interconnexion jusqu’en 2030 les différents référentiels du collège, lycée, enseignement supérieur avec ceux de France Travail, ROME 4.0. Bienvenue dans le monde merveilleux de Big Brother !

Cette idée de traçabilité du collège à France Travail doit nous interroger en tant que psychologue.

Quel usage sera-t-il fait de ce passeport numérique, nouveau livret « ouvrier » qu’il faudra présenter à chacune de ses démarches, entretiens d’embauche ? Ne risque-t-il pas d’être utilisé pour conditionner l’accès à l’emploi ? Quel bénéfice pour les élèves, au risque d’une instrumentalisation et d’un contrôle social renforcé ? Les citoyen·es qui n’auront pas validé leurs compétences porteront la responsabilité individuelle de leur incompétence et de leur échec.

L’ONISEP met en avant l’étroite interaction du numérique et de l’accompagnement humain avec des parcours guidés par l’intelligence artificielle et, en permanence, un recours possible aux conseiller·es de « Mon orientation en ligne »… La belle affaire !

Mais la complexité des projets d’avenir à l’adolescence, leurs liens avec la construction de l’identité, et l’importance des biais sociaux et de genre sont exclus du logiciel. Il y a donc un vrai risque de formatage dans le but d’aller vers l’orientation statistiquement la plus probable laissant, volontairement, peu de place à la découverte et à l’imprévisibilité du Sujet. En réalité, sur le fond il s’agit toujours du même appariement « profil de personnalité / profession », à peine relooké par la novlangue et le numérique.

Dans cette approche, le Sujet est considéré comme transparent à lui-même et un être uniquement rationnel.

Seul le modèle cognitif est pris en compte, uniquement basé sur une conception normative du bon comportement à adopter pour une adaptation maximale dans une logique d’appariement de profils. Objectif à atteindre par les élèves : appropriation de l’adéquation formation-emploi recherchée dont Lucy Tanguy a montré l’illusion depuis 1986 !

C’est par leur approche globale des jeunes et le respect simultané de leur individualité que les PsyEN prennent bien en compte les déterminismes sociaux, familiaux, etc. qui influent sur les choix, notamment d’orientation.



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