Au-delà du principe de la sélection désormais généralisée à toutes les formations, la mécanique de Parcoursup renforce les logiques de discrimination sociale.
Si la ministre de l’Enseignement supérieur reconnaît aujourd’hui au dispositif le défaut de la lenteur, elle s’enferme dans un discours de déni, répétant à l’envi que le système serait plus « humain ». À ce jour, près de 150 000 candidats ne sont toujours pas fixés sur leur avenir d’étudiant. Certains attendent que leur vœu préférentiel se débloque pendant que les autres sont en attente ou sans aucune proposition.
Orientation par défaut
Prévue dans la loi Orientation et réussite étudiante, une prime à la mobilité, pouvant s’élever jusqu’à 1 000 euros, sera versée à ceux qui seraient contraints d’accepter une affectation hors académie et hors-vœux. Cette mesure, en forme d’aveu, institutionnalise finalement l’orientation par défaut et ne résout aucune des difficultés matérielles auxquelles sont confrontés les jeunes les plus fragiles socialement. Comment trouver un logement en dernière minute ? Comment le financer ? On voit mal comment les CROUS pourraient répondre in extremis à la demande de logement. Combien seront ceux qui renonceront à leur inscription faute de toit ou de revenu ? Les affectations tardives ne peuvent qu’aggraver les problèmes financiers. Pourtant prévisible, la paralysie des listes d’attente condamne ainsi des dizaines de milliers de jeunes à des choix cornéliens : accepter ce qui reste, s’endetter pour une inscription dans une formation privée ou plus simplement renoncer. Le gouvernement peut ainsi se féliciter d’avoir poussé dehors nombre de jeunes bacheliers grâce à un dispositif à la fois anxiogène, dissuasif et bureaucratique. Il a fait ainsi le choix de restreindre l’accès à l’enseignement supérieur.
Machine à trier
En amont, le jeu des classements avait déjà opéré un tri sur la base de logiques de discrimination liées en effet, à l’origine géographique et sociale. Les critères de sélection frappés du sceau du secret de la délibération des jurys sont certes inconnus, hacun a pu constater les grandes disparités de traitement entre les classes issues des lycées de centre-ville et ceux des périphéries. Incontestablement, Parcoursup a renforcé la machine à trier, pourtant dénoncée par le ministre, dans l’opacité la plus totale. Fort de ce constat, le président du Conseil départemental de Seine-Saint-Denis a saisi le Défenseur des droits afin de faire la lumière sur les mécanismes de relégation qui semblent ici à l’œuvre. Élus, organisations syndicales dont la FSU, étudiants de l’UNEF et lycéens de l’UNL, parents d’élèves avec la FCPE, tous ont aussi interpellé les ministres, la CNIL et maintenant le Défenseur des droits pour demander la levée du secret des algorithmes locaux et dénoncer ce qui ressemble bien à un tri en fonction de l’origine sociale et géographique des lycéens. Étant donné le nombre de personnes concernées et les questions de discrimination et de relations des usagers avec le service public qui se posent, le gouvernement est au pied du mur et se doit d’apporter des solutions immédiates.
Le SNES-FSU demande dans les plus brefs délais un bilan de Parcoursup pour une refonte du système d’affectation post-bac et un plan d’urgence d’investissement dans l’enseignement supérieur.