Méthodologie
Enquête déclarative en ligne, menée du 5 au 18 septembre 2016. 1112 répondants (certains n’ont pas renseigné toutes les questions). Le ministère annonce 5290 collèges publics en 2015.
Questions 6 à 11 et 35 : les moyens et les conséquences sur les postes et les élèves
Q7 : La réforme du collège s’est traduite dans votre établissement par:
Q10 : Dans votre établissement, la préparation de la rentrée a-t-elle entraîné des compléments de service ?
Q35 : Des dispositifs particuliers ont-ils été supprimés au motif que l’emploi du temps des élèves ne peut dépasser 26 h hebdomadaire ?
La Ministre avait annoncé qu’aucun établissement ne perdrait des moyens avec la réforme du collège 2016. Ce discours a vite été nuancé dans les différents comités techniques, les services revoyant les clés de dotation des établissements.
Au final, l’opacité a été grande dans la répartition des moyens, près de 4 collègues sur 10 ne pouvant identifier clairement les effets de la réforme sur la dotation dans leur établissement.
Si pour 43 % des établissements, le nombre d’heures par élève (h/e) est resté au même niveau que pour la rentrée 2015, 24 % des établissements ont connu une baisse de leurs moyens.
Les conséquences sur la vie des établissements sont lourdes en cette rentrée. Si peu de postes ont été supprimés (un établissement sur cinq a été touché), c’est à une multiplication de compléments de service que les équipes doivent faire face avec plus de 60 % des établissements touchés avec en première ligne l’allemand, l’espagnol, les sciences physiques, la technologie et les lettres modernes qui connaissent des compléments de service dans un tiers des collèges. La suppression des classes bilangues et des sections euro, le passage à 2h30 par classe pour l’espagnol, puis la suppression de l’ATP, la baisse des heures en latin et les menaces sur les groupes en sciences ont encore alourdi la charge charge de travail de nos collègues. Avec la multiplication des affectations sur deux établissements, ils subissent deux manières de fonctionner et de mettre en place une réforme !
Pour les élèves, outre les conséquences des compléments de service sur l’investissement des collègues dans leur établissement, les dotations n’ont pas pu permettre de maintenir des dispositifs (remédiations, aides, prises en charge d’élèves à besoins spécifiques) d’aides aux plus faibles, que l’AP ne remplace pas!
Questions 12 à 14 : les sciences et la technologie en Sixième
Q12 : Comment sont réparties les quatre heures en sixième de sciences et technologies ?
En Sixième, l’Enseignement intégré de sciences et de technologie (EIST), porte ouverte à la polyvalence des professeurs, a fait peu d’émules : 6 % des enquêtés répondent que ce dispositif est mis en place. Alors qu’elle est fondée sur le volontariat, environ 1/3 des équipes se sont vues imposer cette organisation.
Dans 1/3 des établissements, des collègues non formés enseigneront deux disciplines sur les trois. Pour de nombreux collègues, de zone rurale notamment, cela permet d’éviter un complément de service dans un établissement éloigné où les progressions pédagogiques seront différentes. Les collègues en sont réduits à ces arrangements de circonstance dans un contexte général de dégradation de leurs conditions de travail!
En termes de répartition des 4h de Sciences et Technologie, la gestion de la pénurie a primé. Les Sciences physiques et chimiques, dernières arrivées, récupèrent la part du pauvre avec 1h voire 1/2h hebdomadaire en classe entière. 10 % des collèges ne les mettent pas en place en Sixième. Autre situation, ces enseignements deviennent trimestriels ou semestriels, instaurant de fait une annualisation du temps de travail non conforme au décret 2014-940 sur les ORS (9 %), mais aussi des conditions pédagogiques inefficientes.
Questions 15 à 19 : les langues vivantes
Q16 : Si le collège avait une classe bilangue, a-t-elle été maintenue ?
Dans près de 80 % des collèges existait une section européenne ou une classe bilangue avant la réforme, nombre réduit à 50 % en cette rentrée. Ce pourcentage s’explique par deux phénomènes : quelques académies ont maintenu leurs sections européennes à titre provisoire (afin que les élèves de Quatrième euros puissent terminer leur cursus cette année) et la réforme prévoit le maintien, en Sixième uniquement, d’une bilangue de continuité pour les langues débutées en primaire. A cela s’ajoute des autorisations supplémentaires de maintenir des bilangues en éducation prioritaire, pour préserver une certaine mixité sociale et scolaire.
L’enquête révèle que l’espagnol est la LV2 majoritaire et que l’allemand et l’italien ont été proposés en LV2, en lieu et place des anciennes bilangues. Quant aux autres LV2, comme le chinois, le russe ou les langues régionales, leur étendue reste très limitée. En ce sens, la réforme du collège ne permet pas la moindre nouvelle diversification de l’offre linguistique (dans presque 89 % des collèges, aucune nouvelle langue a été proposée).
16 % des collègues de langues vivantes disent avoir reçu des pressions pour exercer des heures supplémentaires. Il s’agit notamment des enseignant-es de LV2 puisque leur service à 18h ne correspond pas à l’horaire disciplinaire prévu (5 groupes x 2,5h = 17h30 ou 6 groupes x 2,5h = 20h).
Questions 20 et 21 : langues anciennes
Q20 : L’enseignement des LCA (langues et cultures de l’antiquité) est-il maintenu dans votre collège ?
Contrairement à ce que prétend la ministre, la réforme a frappé de plein fouet l’enseignement des langues anciennes. En effet si 63 % des réponses disent qu’il a été maintenu dans les collèges, c’est dans 32 % des cas avec un nombre moindre de groupes, donc pour moins d’élèves. 5 % témoignent même d’une suppression des cours de langues anciennes dans leur collège. Le plus grand flou persiste d’ailleurs quant aux moyens alloués : si 23,5 % signalent qu’une dotation fléchée a permis ce maintien, 30 % disent que ce n’a pas été le cas. C’est donc sur la marge de 2h45 que les moyens ont été pris. 47 % des collègues sont dans l’incapacité de répondre, ce qui montre combien la transparence n’est pas de mise dans ces établissements…
Les conséquences de la réforme touchent donc aussi les conditions de travail des enseignants de lettres classiques avec 15 % des réponses indiquant une perte de poste dans la discipline mais elles sont encore plus grandes en lettres modernes : 26 % des réponses indiquent une suppression de poste et 28 % un complément de service. Ceci était prévisible puisque le maintien des cours de latin (et parfois de grec) oblige à conserver un poste en lettres classiques, avec moins d’heures de latin le plus souvent et plus d’heures de français. C’est donc un poste de lettres modernes qui est menacé, d’autant que la suppression de l’ATP en Sixième a aussi touché la discipline.
Voir aussi ici.
Questions 22 à 26 : les enseignements artistiques
Q25: Comment est prise en compte la chorale dans le service des enseignants ?
Dans 93 % des cas, les arts plastiques et l’éducation musicale n’ont pas été globalisés (contrairement à ce que la réforme permet). Lorsque l’organisation est globalisée, plusieurs cas de figure sont possibles : 2 heures d’éducation musicale en semaine 1, deux heures d’arts plastiques en semaine 2 ; 2 heures d’éducation musicale le premier semestre et 2 heures d’arts plastiques au second, par exemple.
En général, les enseignants ont donné leur accord.
Concernant la chorale, seuls 10 % des collègues continuent d’avoir deux heures dans l’emploi du temps pour une heure effective. Pour les autres, la situation est en régression : 2 h de chorale effective comptabilisée 2 h dans l’emploi du temps, 1 h comptabilisée 1 h 30, bénévolat, chorale assurée sur des heures d’atelier, voire supprimée…
Questions 27 à 34 : l’organisation de l’accompagnement personnalisé (AP) et des Enseignements pratiques interdisciplinaires (EPI)
Q30 : Les EPI et/ou l’AP sont-ils mis en place au détriment des dispositifs précédents (groupes de sciences, etc.) ?
Q33 : Comment ont été utilisées les heures de marge ?
AP et EPI étaient présentés par le ministère comme les grandes innovations de la réforme, qui allaient permettre de réduire (ou supprimer) l’échec scolaire en obligeant les enseignants à travailler en équipes pluridisciplinaires. Qu’en est-il ?
Dans la moitié des cas, AP et EPI ont entrainé la suppression des dispositifs d’aide précédents. En outre, 54,7 % des sondés disent avoir fait l’objet de pressions pour accepter de participer aux AP et EPI. Mais il semble que la plupart des établissements aient appliqué la réforme avec modération. Seuls 14,5 % font apparaitre les EPI dans l’emploi du temps des élèves. Les heures d’AP, elles, sont fléchées totalement pour 41 % des collèges et partiellement pour 21 %. Mais 55,5 % des sondés remarquent qu’il se fait en classe entière. La co-intervention intervient dans 28 % des cas. Les collèges ont également, majoritairement, fait le choix de ne pas trop perturber les emplois du temps, mais 22 % changent d’organisation à chaque trimestre ou semestre, en raison des EPI et AP, rendant illisible l’année pour les élèves et les parents.
La réforme prescrit donc des “usines à gaz”, et localement les collègues ont cherché à limiter la casse, ce qui en l’absence de cadrage national produit de grandes disparités d’un collège à l’autre.
Question 36 : les emplois du temps
Q36 : Observez-vous une dégradation des emplois du temps suite à la mise en place de la réforme ?
59 % des professeurs interrogés perçoivent une dégradation des emplois du temps dans leur collège. 9 % estiment ne pas avoir la visibilité nécessaire pour répondre à cette question. En effet, la multiplication des barrettes horaires pour permettre de former des groupes d’AP ou d’EPI complique la confection des emplois du temps, augmentant l’amplitude des journées de travail dans des salles des professeurs souvent sous-équipées et parfois étriquées. A cela s’ajoute la prise d’initiative de certains établissement qui instituent des emplois du temps trimestriels ou semestriels en sus des habituelles semaines A et B. Un professeur et donc un élève pourront donc pratiquer jusqu’à 6 emplois du temps différents dans l’année ! Le SNES-FSU rappelle que l’annualisation du temps de travail n’est pas réglementaire.
Questions 37 – 38 : les manuels
Q38 : Tous les élèves ont-ils reçu leurs manuels à la rentrée ?
La dotation d’État de 54,30 € tout compris (manuels, reprographie et droits de reprographie) était insuffisante. Un manuel papier coûte environ 20 €, sa version numérique 5 à 7 € par an. Le coût des équipements numériques et l’amortissement des manuels papiers rendent ces derniers beaucoup plus compétitifs.
Voir aussi ici.
Questions 39-40 : LSUN, livret scolaire unique numérique
Q39 Avez-vous eu une présentation du nouveau livret scolaire unique numérique (LSUN) ?
Annoncé avant les vacances d’été, LSUN (dont nous n’avons pas pu avoir la présentation d’une version opérationnelle) devrait être prêt pour le premier trimestre de cette année scolaire. Support de l’évaluation de la fin des cycles du nouveau collège (ainsi que des bilans trimestriels), mais aussi du nouveau brevet, il aurait dû être déjà présenté à l’ensemble des collègues dès la rentrée. D’autant qu’il intègre le bilan de l’évaluation de tous les nouveaux dispositifs qui accompagnent la réforme : AP, EPI, parcours, points de programme étudiés… Or, près de 85 % des collègues qui ont répondu à l’enquête n’ont pas eu de présentation de LSUN à ce jour ! Du coup, en fonction des informations parcellaires qu’ils ont pu glaner, près de 80% d’entre eux considèrent, au vu du souvenir laissé par LPC, que LSUN va augmenter leur charge de travail. On a vu le ministère plus efficace en matière de communication…