La direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) vient de publier deux notes d’informations sur le choix des enseignements de spécialité (ES) et des enseignements optionnels (EO) en terminale pour l’année 2021 :
- https://www.education.gouv.fr/39-des-eleves-de-terminale-generale-suivent-un-enseignement-optionnel-en-plus-de-leurs-deux-323285
- https://www.education.gouv.fr/des-choix-de-specialites-plus-classiques-en-premiere-comme-en-terminale-pour-les-eleves-d-origine-323282
La DEPP s’est concentrée sur la répartition des enseignements de spécialité et optionnels en fonction du genre et de l’origine sociale. Les statistiques officielles viennent ainsi confirmer l’ensemble des analyses du SNES-FSU. On peut ainsi lire notre article de décembre dernier sur le sujet ICI et retrouver ci-dessous la note publiée en avril 2019 sur la base d’une enquête sur les choix d’orientation des lycéens en fin de Seconde.
Une division genrée et sociale des doublettes
Force est de constater que les garçons sont sur-représentés dans les doublettes « science expérimentales » (à plus de 60% alors qu’ils sont 44% de l’ensemble des élèves), tandis que les filles sont plus présentes (75%) dans les doublettes « humanités et sciences humaines ». Une preuve de plus que bac Blanquer ne résout absolument pas la répartition genrée des séries.
Les élèves d’origine sociale très favorisés (38% des élèves de terminale) forment plus de 50% des doublettes « sciences expérimentales », tandis que les élèves d’origine sociale défavorisée (21% des élèves de terminale) forment 28% des doublettes « humanités et sciences humaines ». Là encore, les « lois » de la reproduction sociale ont fonctionné à plein.
Le retour des séries… à l’ancienne!
C’est sans étonnement que la DEPP constate que l’enseignement optionnel « maths expertes » est plus souvent suivie par les garçons (39% des garçons, contre 27% des filles) et par les jeunes issues des classes favorisées (42% contre 24% pour les jeunes d’origine sociale défavorisée). On voit ici se dessiner une voie pour les élites masculines (maths, PC et maths expertes), dont les anciens se souviennent : l’antique bac C ou math’elem…
Dans cette continuité, la doublette « physique-chimie, SVT » est accompagné de l’option « maths complémentaires » pour 76% des élèves. Ainsi les élèves maintiennent les trois disciplines phare de l’ancien bac S. Notons que ce maintien est marqué socialement. Les élèves issues des classes favorisées font plus facilement ce choix (84% contre 74% des élèves d’origine sociale défavorisé).
A l’inverse, l’enseignement optionnel « Droit et grands enjeux du monde contemporain » (suivi par 7% des élèves de Terminale), est choisi par des élèves qui ne font pas de mathématiques en Terminale (78%). 72% des élèves qui suivent cette option sont issue de cinq doublets (HGGSP+SES ; HGGSP+ LLCER ; maths+SES ; HGGSP+HLP et LLCER+SES). Là encore, on voit réapparaitre le spectre des bacs A et B. Surtout lorsqu’on met en parallèle que les enseignements de spécialité artistiques et économique et social sont conservés à plus de 80% entre la Première et la Terminale.
Que le ministre le veuille ou non, les séries se reforment petit à petit, sur le modèle du bac « A, B, C, D etc. » plutôt que les séries « L, S, ES » de 1995. Le discours de la liberté de choix sert ainsi davantage à masquer des discriminations sociales et genrées de plus en plus marquées.
Les mathématiques : une discipline délaissée.
Le constat est alarmant : seulement 59% des élèves (de la voie générale) suivent un enseignement de mathématiques en terminale, contre 84% avant la réforme Blanquer. Si ces abandons n’ont rien de surprenant, compte tenu des programmes de cette spécialité et de la réputation de cette discipline, cela risque de devenir problématique à court terme sur les possibilités de poursuite d’études et plus généralement gréver le niveau moyen de mathématiques de la population.
Le lycée Blanquer n’est pas viable!
Comment appeler officiellement à la démocratisation des enseignements scientifiques quand la réforme du lycée est en train de réduire à néant toutes les politiques éducatives de lutte contre les inégalités en la matière? Comment justifier la poursuite coûte que coûte d’une réforme qui renforce le processus de relégation de ceux qui sont déjà les plus discriminés ? Le SNES-FSU a des propositions pour une organisation transitoire des enseignements avant la remise à plat des réformes. Conserver trois spécialités en Terminale, revoir l’architecture du tronc commun, penser des enseignements nouveaux de mathématiques en Première, proposer un enseignement technologique pour tous en Seconde, financer les options … Il est temps d’arrêter l’engrenage de la disparition des enseignements. Un autre lycée est possible!