Découvrir leur collège comparé aux établissements voisins a été brutal pour les personnels, tout comme l’injuste mise en concurrence avec des établissements du privé qui écartent les élèves moins performants au fil de leur scolarité, élément non pris en compte dans les IVAC.
IVAC : Un mode de calcul opaque…
Si la DEPP avait sorti une note détaillée sur la construction de l’IPS, les informations sur le calcul de l’IVAC sont beaucoup moins transparentes.
En effet, alors que l’IVAC est calculé depuis plusieurs années (et pour la première fois rendu public pour les collèges), les paramètres donnés et les modes de calcul sont évasifs. Ainsi, sans indiquer les coefficients de pondération, le site du Ministère indique que sont pris en compte dans le calcul :
– des facteurs individuels des élèves (âge et sexe, niveau scolaire à l’entrée au collège, etc.) ;
– des facteurs liés à la structure de l’établissement (pourcentage de filles, part d’élèves en retard scolaire, origine sociale des élèves, et score moyen aux évaluations exhaustives de Sixième)
La DEPP détermine une valeur « attendue » pour le taux de réussite au DNB et la moyenne des notes de ses épreuves écrites. Les établissements faisant mieux apporteraient donc une plus-value à leurs élèves mais les autres une moins-value. La valeur ajoutée s’échelonnant de -27 à + 29…
On ne compte plus les titres de presse annonçant la liste des « meilleurs » ou des « pires » collèges du département alors que la DEPP préconise elle-même de considérer ces données avec précaution et précise qu’elles ne doivent pas donner lieu à un classement. Elle cite d’autres facteurs à prendre en compte : la taille du collège, les moyens des établissements, le profil des familles, le climat scolaire, les actions extérieures, la situation géographique…
Des biais importants existent pourtant. Des politiques d’établissements visent à ne pas présenter des élèves au DNB de la série générale, ce qui induit une augmentation des taux de réussite au DNB. En effet, comme moins de 30 élèves par établissement se présentent au DNB pro et au CFG, leurs résultats ne sont pas pris en compte par l’IVAC. Inscrire les élèves en DNB pro ou au CFG permet de les invisibiliser. C’est possible bien sûr pour les élèves d’ULIS mais aussi sur dérogation pour des élèves qui bénéficient d’un PAP, etc. Dans le privé, certains collèges font le vide entre la Quatrième et la Troisième.
Les personnels perçoivent qu’on réduit leur travail et leur engagement à un chiffre qui n’a pas de sens.
Un indicateur au service du néomagement qui participe du marché scolaire
Comme de nombreux indicateurs, l’IVAC est déjà utilisé par des chef·fes d’établissement pour fixer des objectifs de taux de réussite du DNB et faire pression sur les équipes lors du bilan de fin de cycle 4 qui compte pour moitié pour l’obtention du DNB. Le SNES-FSU avait déjà alerté sur la dérive possible de ce dispositif.
Les résultats sont également exploités par des IA-IPR pour remettre en cause les modalités d’évaluation des enseignant·es au motif qu’elles et ils sont au-dessous des attendus fixés pour leur collège.
Ces pressions sont visibles dans les données mises en ligne : les distorsions entre les résultats au DNB et la moyenne des épreuves écrites révèlent les dérives sur l’évaluation locale (bilan de fin de cycle et épreuve orale du DNB).
Nous connaissons déjà les effets de ces pressions en lycée sur les équipes et les premiers témoignages des collègues qui ont pris connaissance de l’IVAC pour leur collège dans la presse montrent les effets néfastes de cet indicateur qui met leur établissement à l’index.
Quant au risque d’une prise en compte de cet indicateur pour la dotation des moyens, certaines académies n’hésitent pas à avoir recours à l’IVAL pour justifier des dotations à des lycées…
Mise en concurrence des établissements
Depuis la parution des IVAC, les classements des collèges fleurissent dans la presse, à l’instar des palmarès des lycées dont le SNES-FSU a pointé les dérives avec l’IVAL.
Les classements sont sans appel et, si plus de 2/3 des collèges REP+ parviennent à dépasser le taux de réussite attendu, 95 % des collèges REP+ se situent dans le quart des collèges ayant les moyennes les plus faibles à l’écrit.
Le message envoyé aux parents est donc clair : loin de montrer que les élèves dans les collèges de l’éducation prioritaire peuvent mieux réussir que ce que l’Institution attend, on affiche que c’est dans les collèges les plus favorisés que l’on réussit le mieux, avec une mise en avant des collèges privés qui peuvent choisir leurs élèves.
Comme pour les lycées, il s’agit de diffuser une vision de l’école fonctionnant comme un « marché », pour habituer les familles à « choisir » entre des établissements qu’on présente comme inégaux, hiérarchisés. Ce sont ces palmarès qui produisent l’image de collèges « haut de gamme » et « bas de gamme ». Le Ministère doit cesser de hiérarchiser les établissements et de les mettre en concurrence, ce qui contribue à saper la confiance des familles.
Pour le SNES-FSU, l’IVAC est un exemple de plus de la politique des indicateurs qui n’a pour finalité que de piloter l’Éducation nationale en s’affranchissant de la question des moyens et en mettant la pression sur les personnels. Il s’agit, une fois encore, selon une stratégie managériale de plus en plus invasive, de renvoyer implicitement la responsabilité d’une valeur ajoutée négative au manque d’implication ou d’efficacité des équipes. C’est inacceptable !
Le SNES-FSU défend et défendra un enseignement et des métiers construits sur le réel et l’humain.