Les textes de cadrage de la session du bac 2020 mettent en place les critères d’attribution du bac sur la base d’un jury d’examen qui englobe l’harmonisation des notes, le tout étant apprécié au regard des classements des lycées en fonction des résultats du bac des trois années précédentes. Ce sont donc bien des épreuves terminales et nationales du bac qui servent de jauge à ce bac au contrôle continu. Sans la boussole des épreuves terminales, que resterait-il du diplôme national ? Pas grand chose. En témoignent les actuelles discussions au sein de nombreux lycées afin d’établir des stratégies de modification des notes trimestrielles et de préserver leur place dans la concurrence qui peut se jouer entre privé et public, notamment dans les grandes agglomérations.

La note de service prévue à la publication pour le 4 juin précise la mise en œuvre du décret et de l’arrêté. On peut retrouver ICI les éléments qu’elle contient.
Décret bac GT au Contrôle continu session 2020
Arrêté Bac GT session 2020

1- Le décret qui chapeaute l’ensemble fixe le cadre général et une conception du contrôle continu qui doit coller aux « indicateurs de performance » caractérisant les établissements.
Le jury a donc pour fonction essentielle de procéder à un alignement statistique sur les résultats des années précédentes. Les propos ministériels du 9 avril dernier devant les sénateurs, en écho aux inquiétudes du directeur du Lycée Stanislas, ont précisé que les jurys seront attachés à réévaluer les notes des élèves des établissements où le contrôle continu les lèserait.
Extrait du décret :
« Ces épreuves sont remplacées, sous réserve de certaines conditions, par la prise en compte des notes de contrôle continu obtenues par le candidat. Ce décret prévoit également que les candidats qui ne peuvent prétendre à la prise en compte de leurs notes de contrôle continu passeront, au début de l’année scolaire 2020-2021, les épreuves de remplacement, dont les modalités ne sont pas modifiées. » Les coefficients propres à la série s’appliquent à chaque moyenne de contrôle continu.
-Si les notes de l’année ne sont pas en nombre suffisant (une seule note), la note de contrôle continu est fixée par le jury. Le jury appréciera, en cas de dossier trop lacunaire, la pertinence de statuer ou de renvoyer aux épreuves de remplacement: “Si le livret scolaire du candidat ou le dossier de contrôle continu en tenant lieu ne permet pas au jury de se prononcer sur son niveau de connaissances, de compétences et de culture défini par les programmes du lycée, le candidat se présente aux épreuves de remplacement prévues ».
Par ailleurs, les indicateurs généraux des établissements sont fournis au jury : « Des informations administratives sur l’établissement d’origine du candidat, notamment les taux de réussite et de mentions attribuées pour la session 2019 du baccalauréat général et technologique. »
Le jury a toute latitude pour modifier les notes et valoriser «l’engagement, le progrès, et l’assiduité du candidat : « Les notes définitives résultent de la délibération du jury. Ce dernier peut procéder à une revalorisation des notes de contrôle continu du candidat lorsqu’il dispose, pour l’établissement d’origine de ce dernier, des informations mentionnées au 5°. Le jury peut également, pour l’établissement des notes définitives, valoriser un engagement, les progrès et l’assiduité du candidat. »
« A titre exceptionnel, le jury peut autoriser un candidat ayant obtenu une note inférieure à 10 à l’issue des épreuves du second groupe à se présenter aux épreuves de remplacement ».

2-Le troisième trimestre de la présente année scolaire est en partie neutralisé et les notes sont arrondies au point supérieur.
“La note retenue au titre de chacune des épreuves du premier groupe pour les candidats disposant d’un livret scolaire ou d’un dossier de contrôle continu est la note moyenne annuelle de l’enseignement correspondant obtenue en classe de terminale et inscrite dans le livret scolaire ou le dossier de contrôle continu, que l’épreuve soit écrite, orale ou pratique.
La valeur de chaque note moyenne annuelle du livret scolaire ou du dossier de contrôle continu est obtenue par la moyenne des moyennes trimestrielles ou semestrielles, exprimée par une note variant de 0 à 20. Les notes attribuées durant la fermeture administrative des établissements et, le cas échéant, après leur réouverture ne sont pas prises en compte.
La note moyenne annuelle est prise en compte par une note en points entiers, arrondie à l’unité supérieure.

Chaque note est affectée du coefficient prévu par les dispositions des arrêtés susvisés.” (Arrêté, article 3)

Le principe de la moyenne des moyennes est décliné, les SELO (Sections euros et langues orientales) et DNL (Disciplines non linguistiques). L’article 7 (arrêté) concerne la situation des candidats qui n’avaient pas passé les EAF en Première (renvoi à l’arrêté du 15 septembre 1993).
Mais dans le JDD du 10 mai, le ministre expose une conception élargie de l’évaluation : « A partir du 11  mai, les professeurs peuvent de nouveau évaluer, même en cas d’enseignement à distance. Pour les classes à examen (troisième, première et terminale), ces notes ne comptent pas pour le contrôle continu mais elles donnent lieu à  une appréciation des professeurs pour éclairer les jurys d’harmonisation sur la motivation et l’assiduité des élèves. »

En clair (ou presque): La note devant figurer dans le livret scolaire (ou le dossier de contrôle continu) devrait correspondre à une moyenne des notes délivrées jusqu’au jour du confinement.
Il n’y a pas de prise en compte des évaluations pendant la période de confinement, mais en même temps, le ministre considère qu’on peut reprendre les évaluations à partir du 11 mai, même en distanciel, les notes ne rentrant pas dans la moyenne mais pouvant fonder le niveau d’investissement et d’assiduité. Il semble que la notion d’évaluation soit flottante dans la tête du ministre.
Ce discours ambivalent laisse le champ à toutes les interprétations possibles sur le terrain et on constate déjà que dans nombre de lycées, des proviseurs demandent aux enseignants de « fabriquer » une note de 3ème trimestre pour augmenter la note moyenne figurant sur le livret.

3- Le dossier de contrôle continu remplace le livret scolaire quand ce dernier n’existe pas.
La formulation alambiquée des textes renvoie en fait à la prise en compte des candidats issus des établissements hors contrat. En théorie soumis au régime des candidats libres, les élèves du hors contrat auraient logiquement dû passer les épreuves en septembre. Le ministère a fait le choix de les traiter comme tous les autres candidats des lycées publics et lycées sous contrat en imposant le dossier de contrôle continu.
Arrêté article 2 « Le dossier de contrôle continu tenant lieu de livret scolaire est établi conformément au modèle de l’annexe 1 du présent arrêté. L’établissement dans lequel le candidat est scolarisé transmet ce dossier au recteur qui vérifie l’éligibilité de l’établissement d’inscription du candidat, la complétude du dossier de contrôle continu sur les informations concernant le candidat et les notes et appréciations sur les différents enseignements qu’il a suivi durant l’année scolaire 2019-2020 »
Les critères d’appréciation du dossier de contrôle continu renvoient clairement à l’évaluation de l’établissement avec ce que ça implique en terme de jugement sur les pratiques professionnelles de chaque enseignant (Communication d‘exemples d’évaluation, bilan de la progression pédagogique…). C’est une procédure de contrôle à destination des établissements hors contrat. Le Recteur vérifie en amont la recevabilité du dossier du candidat.

4- Les jurys d’examen ont pour fonction d’harmoniser les notes.
L’organisation de chaque jury pourra être différente selon les académies : le recteur « PEUT » organiser ses travaux en sous-jury… La composition exacte de ces jurys et sous-jurys ainsi que leur fonctionnement demeure à ce jour assez confus.

5-Un calendrier maintenu pour l’essentiel
Les décisions des jurys de bac seront publiées le 7 juillet et des épreuves de rattrapage organisées entre 8 et 10 juillet. Pour l’instant, les modalités des épreuves de rattrapage ne sont connues que via la FAQ du site ministériel: “des consignes seront données par note de service aux interrogateurs pour que les élèves ne soient interrogés que sur ce qui a été effectivement traité en classe avant la fermeture des établissements et, le cas échéant, après leur réouverture”.
Le calendrier de Parcoursup sera adapté pour prendre en compte les lauréats de la session de septembre. Il aurait été souhaitable, dans ce cas , que le ministère garantissent la validité des propositions d’affectation dans le supérieur jusqu’aux résultats définitifs du bac pour ceux qui passeront les épreuves de septembre.

Dans l’immédiat, le SNES-FSU a demandé des clarifications sur les modalités de réunion et de travail des jurys, Il demande que soit prise en compte la situation des candidats directement recalés par le jury sans possibilité de passer les épreuves de rattrapage. Compte tenu de la situation exceptionnelle et des difficultés que les doublants auront à gérer à la fois la crise sanitaire et les changements de programmes, le SNES-FSU propose que tous les candidats recalés en juin puissent au moins passer les épreuves de septembre.
La session 2021 connaît aussi son cortège d’incertitudes. Les épreuves orales de Français ont certes été supprimées mais les épreuves communes de contrôle continu largement contestées et inutiles, sont maintenues de force et l’organisation de l’année prochaine dont le calendrier devra forcément être revu demeure hypothétique.
Cette situation de crise ne saurait servir de laboratoire à quelque expérience qui pourrait présager de modifications des missions et du métier d’enseignant. Car les ministères de l’Education nationale et de l’enseignement supérieur, sous couvert de « continuité pédagogique », sont en train de profiter de la crise sanitaire pour faire avancer leurs « réformes » , celle du bac , et celles de l’enseignement en distanciel et de la télé-évaluation . On voit bien comment la crise économique pourrait amener à accélérer dans ces voies délétères, en creusant toujours plus les inégalités sociales d’apprentissage et de formation, alors qu’il s’agit bien plutôt aujourd’hui de permettre aux acteurs d’envisager de manière sereine la rentrée de septembre.
La crise contraint à penser autrement. Le SNES-FSU exige dès maintenant un retour à la raison avec une réflexion sur l’organisation transitoire des examens et des enseignements pour l’année prochaine, et pour l’avenir, une autre réforme du bac et du lycée.

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