Rentrée 2020, Jean-Michel Blanquer dans son interview de rentrée au JDD « A partir de novembre, nous négocierons pour définir une loi de programmation pluriannuelle ».
Un an après, le bilan est révélateur : des promesses non tenues et des annonces qui sont loin de compenser le déclassement salarial de nos professions.
Une loi de programmation pluriannuelle enterrée
La promesse estivale de 2020 n’a pas passé l’hiver. La loi de programmation pluriannuelle promise n’a jamais vu le jour. Pourtant, elle est un élément central de toute politique de revalorisation salariale digne de ce nom : elle doit permettre, comme le demandent le SNES et la FSU d’acter année après année les sommes en jeu en se projetant sur un horizon de moyen terme et de détailler les mesures attribuées à chaque corps enseignant ou CPE ou Psy-EN afin de garantir leur effectivité. L’absence de loi de programmation marque un renoncement à engager une réelle dynamique de revalorisation.
Les annonces de l’été 2021
Le gouvernement refuse toujours de revenir sur le gel de la valeur du point d’indice. La principale annonce de l’été 2021 et la deuxième tranche de la prime d’attractivité.
Pour mémoire, les annonces du a première tranche concernait 31% des personnels. 69% des personnels n’étaient donc pas concernés par une revalorisation que le ministre qualifiait pourtant d'”historique” ! Analyses des premières annonces : “ceci n’est pas une revalorisation”
Prime d’attractivité : toujours les mêmes insuffisances
Les annonces sur la deuxième tranche ont les mêmes défauts : artifices de communication et sommes insuffisantes.
L’enveloppe affichée de 700 millions est un leurre car contenant des mesures actées par ailleurs (200 millions protection sociale complémentaire décision qui relève de la Fonction Publique, passage en année pleine des mesures 2021) . Par ailleurs, 155 millions seront consacrés au financement de mesures catégorielles. Au final, la deuxième tranche de la prime d’attractivité représente une enveloppe de 245 millions d’euros pour 2022, année pendant laquelle elle sera versée à partir de février 2022 et 266 millions en année pleine. 700 millions, 400 millions, 245 millions, les chiffres valsent, mais la réalité devient de plus en plus criante : qu’on est loin des promesses et envolées lyriques sur la revalorisation historique !
Le scénario retenu par le ministère concerne 58% des personnels (échelon 2 à échelon 9), 42% d’entre eux en sont donc toujours exclus. Et les sommes annoncées sont loin de couvrir le déclassement salarial de nos professions.
Echelon | certifiés, CPE, PsyEN | certifiés, CPE, PsyEN | Agrégés | Agrégés |
net annuel | net mensuel | net annuel | net mensuel | |
2 | 684 euros | 57 euros | 684 euros | 57 euros |
3 | 684 euros | 57 euros | 684 euros | 57 euros |
4 | 513 euros | 42,75 euros | 513 euros | 42,75 euros |
5 | 342 euros | 28,50 euros | 342 euros | 28,50 euros |
6 | 342 euros | 28,50 euros | 342 euros | 28,50 euros |
7 | 342 euros | 28,50 euros | 342 euros | 28,50 euros |
8 | 342 euros | 28,50 euros | 342 euros | 28,50 euros |
9 | 342 euros | 28,50 euros | 342 euros | 28,50 euros |
Pour les AESH, après les mobilisations initiées par la FSU, le ministère concède une avancée significative en instaurant une grille à avancement automatique. Mais l’ensemble du dispositif est bien loin de répondre aux revendications des AESH. Voir notre article avec les annonces détaillées et l’analyse du SNES-FSU
Tous les indicateurs montrent pourtant l’urgence de la revalorisation
- Crise de recrutement qui perdure : 650 postes non pourvus aux concours 2021, le SNES-FSU a également estimé qu’en 2020, sur les 13000 postes affichés aux concours du second degré public, un recrutement sur dix n’a pas abouti.
- En septembre 2020, note de la DEPP confirmant que l’inflation, le rétablissement du jour de carence, la hausse de la CSG, l’augmentation de la retenue pour pension civile faisait perdre 1,3 % au salaire net moyen d’un enseignant entre 2017 et 2018
- La rémunération d’un professeur, CPE ou Psy-ÉN, recruté aujourd’hui représente deux tiers de celle perçue au même moment de la carrière par des personnels appartenant à la génération de ses parents
- dossier complet dans l’US Mag (octobre 2020) “la revalo, il la faut”
Redéfinir nos métiers ?
Si Jean-Michel Blanquer a toujours refusé d’utiliser le mot contreparties, il n’a jamais caché sa volonté de redéfinir nos métiers. Le Grenelle, c’est aussi des ateliers ouverts à la société civile (novembre/décembre 2020), une conférence internationale sur ce que doit être l’enseignant du 21eme siècle qui vire au fiasco technique et enfin des feuilles de route RH académiques dont certaines révèlent des véritables dangers pour nos métiers, s’inscrivant dans une logique managériale problématique.
Fin juin/début juillet, le ministère a organisé plusieurs groupes de travail : le premier était essentiellement consacré à la deuxième tranche de la prime d’attractivité, le deuxième s’intitulait “esprit d’équipe” et le troisième “continuité du service public”.
Intituler un groupe de travail “esprit d’équipe” est pour le moins surprenant pour un ministère qui, par ses multiples réformes aux effets délétères, a rendu impossible le travail en équipe ! Le ministère envisage maintenant la création de fonctions mixtes combinant un temps d’enseignement et un temps de mission d’inspection (accompagnements individuels ou collectifs par exemple sur l’évaluation des élèves, participation à l’évaluation des établissements, réalisation du premier rendez-vous de carrière, etc.). Le ministère pose ainsi le cadre pour le développement de hiérarchies intermédiaires contrôlant toujours davantage le travail des professeurs, ce que le SNES-FSU a vivement dénoncé. Ce groupe de travail reprend en septembre, particulièrement autour du rôle de ces chargés de missions et des enjeux de fin de carrière (accompagnement et suivi des collègues).
Le troisième GT a traité de la question des AESH (voir ci-dessus) et des remplacements. Si les remplacements sont rendus plus compliqués aujourd’hui, c’est avant tout en raison de la politique de suppression de postes qui a asséché les moyens de remplace-ment. Encore une fois, le ministère fait fi de cette réalité et propose des solutions qui ne répondent pas au problème posé et vont même entraîner de nouvelles difficultés : utiliser les AED comme moyen de remplacement, demander aux enseignants à temps partiel de faire des heures supplémentaires et développer le numérique. Ce groupe de travail reprend en septembre sur des questions concernant les AESH, en particulier leur formation et leurs parcours professionnels.
Sur la question des salaires, comme sur celles des moyens et de nos métiers,
faisons entendre notre voix le 23 septembre, toutes et tous en grève !