Métier : la coupe est pleine

Augmentation du temps de travail, sentiment d’épuisement et d’impossibilité de tout faire… au moins 60 % des collègues interrogé·es partagent ces constats, un taux persistant quatre ans après notre première enquête sur le métier. Avec le Pacte, le ministère fait fi de l’état de saturation de la profession et s’apprête à l’aggraver. Dans l’enquête, nombre de collègues précisent les parades pour résister ou se protéger en prenant des temps partiels ou en renonçant à tout engagement additionnel. Or le Pacte, à rebours de ce besoin de temps qui s’exprime unanimement, porte en lui un alourdissement de la charge de travail. D’une part, la plupart des missions incluent un rapport d’activité pour justifier sa rémunération, ce qui entraînera un contrôle sourcilleux des hiérarchies. D’autre part, toute mission payée au forfait dérivera vers l’annualisation et un risque d’être corvéable à merci. Le statut, qui garantit un service hebdomadaire sans devoir en rendre compte en permanence, est la force de nos métiers. Défendons-le collectivement contre la logique de contrat du Pacte ! Plus de 77 % des collègues répondent avoir le sentiment de perdre la main sur leur métier du fait de l’accumulation des injonctions. Rechercher des volontaires pour le remplacement au pied levé, c’est attaquer le cœur de nos métiers, ce lent travail d’apprentissage dans la classe qui exige maîtrise de la progression disciplinaire, choix des activités et lien de confiance à construire avec les élèves. Notre professionnalité pourrait se trouver menacée par des injonctions d’uniformiser les pratiques, de standardiser le travail pour être « remplaçable » à tout instant par tout·e collègue volontaire, voire un·e AED sommé·e de surveiller une séquence numérique. Les coordinations financées par le Pacte (Découverte des métiers, suivi des élèves à besoins éducatifs particuliers, SNU en Seconde) représentent aussi un risque de hiérarchies intermédiaires qui trouveront dans la lettre de mission reçue du chef d’établissement une autorité sur leurs collègues. Reprendre la main sur le métier La campagne initiée par le SNES-FSU pour informer et mobiliser contre le Pacte a permis dès le mois de juin d’opposer aux directions un refus des équipes. Ce premier succès doit se prolonger en une résistance, collective, à toute nouvelle dégradation des conditions et de la charge de travail. Revendiquons une revalorisation des salaires sans aucune contrepartie et le respect de nos métiers, qualifications et statuts. Et en prenant ou reprenant votre adhésion au SNES-FSU, vous vous donnez les moyens de porter haut et fort cette exigence.

Temps de travail : c’est aussi l’inflation !

Comme les enquêtes du ministère de 2022, l’enquête du SNES-FSU révèle qu’une majorité des personnels sont encore confrontés à un accroissement accablant de la charge et du temps de travail. En 2023, comme en 2019, plus de 80 % des collègues déclarent un accroissement de leur temps de travail au cours des dernières années. La hiérarchie des causes varie un peu selon les métiers ou le type d’établissement. Mais aux premières positions, on trouve l’« augmentation de nombre d’élèves à prendre en charge » (enseignant·es et AESH), les « exigences liées aux missions » (Psy-ÉN et CPE), « la prise en compte de l’hétérogénéité des élèves ». Pour les professeur·es en lycée, « l’application de la réforme du lycée » est bien évidemment l’élément majeur. L’augmentation du nombre de réunions, les projets ou des outils numériques imposés sont aussi évoqués et participent à l’augmentation du temps de travail. Mais celle-ci reste principalement liée au cœur des métiers qui, dans les conditions actuelles (effectifs, « redéfinitions » de missions…), exigent davantage de temps. Dans les réponses ouvertes, nombre de collègues pointent également les heures supplémentaires imposées, la disparition des dédoublements, la multiplication de niveaux d’enseignement, les services partagés et les contraintes liées au nouveau bac. Faire moins bien « pour tenir » ? Pour faire face à l’alourdissement de la charge de travail, c’est l’augmentation de son temps de travail qui est la première réponse mentionnée, évidemment avec des limites physiques. 43 % des collègues admettent également devoir faire les tâches de manière moins approfondie. En outre, les réponses ouvertes mettent en lumière des renoncements : moins d’engagements volontaires ou de missions choisies, une qualité du travail sacrifiée « pour tenir ». Le vocabulaire utilisé traduit bien souvent le déchirement enduré. Ces réponses démontrent, non pas une insuffisance personnelle généralisée, mais un « management » inepte et ses effets, que le Pacte prolongerait. Avec le SNES-FSU, les personnels pourront le combattre et s’en protéger.

Collectifs de travail : à revitaliser

La partie du questionnaire sur l’évolution des relations sociales au travail ces dernières années livre un constat inquiétant. 53 % des répondant·es déclarent rencontrer moins leurs collègues, contre 12 % davantage ; 28 % décrivent un intérêt moindre des échanges contre 16 % un intérêt croissant ; 36 % ont vu les conflits augmenter et 2 % seulement diminuer. 3 880 collègues ont ensuite complété la question pour exposer selon elles et eux deux causes à ces évolutions, ce qui en fait la réponse ouverte la plus documentée. Ce sont évidemment les facteurs de dégradation qui dominent largement et certains éléments sont même cités dans plusieurs centaines de réponses : manque de temps, (sur)charge de travail, concurrence entre disciplines pour la part libre de la DHG, individualisme et comportements individualistes… On voit à quel point l’alourdissement de la charge de travail et la perturbation récurrente des équilibres dans l’organisation nuisent aux collectifs de travail pourtant essentiels à l’exercice de nos métiers.

Temps partiel : des stratégies individuelles qui alertent

Plus de deux collègues sur trois déclarent se sentir débordé·es plusieurs fois par semaine, voire tous les jours, ne pas arriver à effectuer tout ce qu’ils et elles ont à faire. Et pourtant, beaucoup de collègues sondé·es expliquent, dans les réponses ouvertes annexes, avoir rogné leur temps de loisir et de vie privée pour faire face à leur charge de travail. En outre, une stratégie semble en expansion : le choix du temps partiel pour parvenir à faire la totalité du travail malgré la perte financière que cela provoque. Les témoignages s’enchaînent : « J’ai pris un temps partiel pour avoir un jour complet pour travailler à la maison », « Je n’y arrivais pas à temps plein », « Je suis passée à temps partiel pour tout faire correctement, donc je perds de l’argent ». Changer de paradigme Cette enquête et les paroles des collègues confirment que le gouvernement est en complet décalage avec la réalité vécue sur le terrain : le Pacte et ses missions complémentaires sont à l’opposé des attentes de la profession. L’urgence est à une véritable revalorisation et à une diminution de la charge de travail.


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