La consultation du Conseil Supérieur de l’Education (CSE) le 1er avril 2025 sur les textes réglementaires instituant cette épreuve a été l’occasion d’une présentation de son cadre général, tel qu’il se dessine :

  • une épreuve de 2h, programmée sensiblement dans la même période que les Épreuves Anticipées de Français (EAF), en fin de Première, correspondant à ce que le SNES-FSU avait porté ;
  • une épreuve avec un coefficient 2 pour le Bac, ces points étant pris sur coefficient du le Grand Oral, qui passe de 14 à 12 en voie générale et de 10 à 8 en voie technologique ;
  • une première partie d’épreuve, probablement un QCM, portant sur les enseignements de mathématiques de Première, et comportant deux parties : une vérification des « automatismes » (qui seront à définir en voie générale d’où ils sont pour le moment absents), comptant 8 points sur 20 environ, et qui seront identiques pour tous les élèves, quels que soient leur parcours au LGT en mathématiques ; une partie portant sur des exercices en lien avec les programmes suivis par les 3 profils d’élèves retenus par le ministère : le programme de tronc commun en voie technologique (et donc ne tenant pas compte parties du programme se trouvant, en STI2D et STL, dans la Spécialité Mathématiques-Sciences Physiques) ; le programme de Spécialité pour les élèves de la voie générale l’ayant choisie ; le programme de l’enseignement spécifique de mathématiques intégré à l’enseignement scientifique pour les élèves de la voie générale non spécialistes ;
  • une interdiction de la calculatrice sur la totalité de l’épreuve, et qui pourrait par ailleurs être corrigée en partie automatiquement par une IA ;
  • une mise en place dès la session de Juin 2026, (concernant donc les actuels élèves de Seconde qui vont donc la découvrir prochainement), que nous avons demandé de retadrer d’un an.

Maquette à revoir pour le SNES-FSU

Sans être demandeur d’une telle épreuve, le SNES-FSU a depuis plusieurs mois porté ses analyses et revendications la concernant. Le moins que l’on puisse dire est que, malgré la dissipation du brouillard qui planait sur cette épreuve, rien n’est réglé…

Malgré notre demande de ne pas la positionner ainsi, il paraît acquis à ce jour que cette épreuve aura bien lieu en fin de Première, ce qui pose la question de son sens pour tous les élèves qui poursuivront des mathématiques et y seront évaluées une nouvelle fois au baccalauréat en Terminale, y compris le plus souvent à l’écrit : les élèves de voie technologique sont dans ce cas (avec la prise en compte des notes du tronc commun de Terminale dans le contrôle continu, et par un tiers environ de la note de Spécialité Mathématiques-Sciences Physiques en épreuve écrite terminale), mais aussi les élèves de la voie générale (ceux suivant la Spécialité en Terminale passent l’épreuve de mathématiques associée ; ceux poursuivant en Mathématiques Complémentaires ont une note d’option, et ceux ayant totalement arrêté les mathématiques en fin de Première seront donc évalués par l’épreuve anticipée en plus du contrôle continu …).

La communication aux élèves et parents du poids des mathématiques dans le cadre du baccalauréat se complexifie donc, et devient affaire de spécialistes, surtout quand on se risque à distinguer – ce que l’honnêteté commande – suivant les profils d’élèves : la clarté n’en sort pas gagnante, quand J.M. Blanquer promettait un « choc de simplification » du baccalauréat …

Il n’est pas interdit de penser également que le fait d’être débarrassé de cette nouvelle épreuve, comme de connaître les notes obtenues, auront un impact significatif sur l’engagement dans les apprentissages en mathématiques en Terminale qu’il est en revanche assez facile de prévoir … Le ministère indique que les notes ne seront pas communiquées avant la mi-juillet aux élèves pour ne pas peser dans les choix d’enseignement en Terminale : c’est probablement une bonne chose pour stabiliser la constitution des groupes, mais cela ne règle rien au plan pédagogique et didactique …

Demandes d’aménagements de la future maquette

Le SNES-FSU a demandé plusieurs aménagements de l’épreuve ainsi instaurée, sur la base des éléments envisagés connus à ce jour :

  • la définition d’automatismes propres à chaque profil d’élève (trois au moins : un pour toutes les séries technologiques, deux en voie générale selon que les élèves sont spécialistes ou non), et un sujet qui porte sur ces automatismes spécifiques, plutôt qu’un fourre-tout de questions trop basiques qui consacrera les différences de maîtrise de notions mathématiques entre des élèves dont on sait déjà qu’ils n’ont pas la même réussite ni surtout les mêmes possibilités de retravailler ces automatismes dans des temps et des programmes différents ;
  • que seule la partie « automatismes » soit traitée sans calculatrice, qui doit pouvoir être utilisée dans la partie de résolution d’exercices, comme en classe et comme dans les épreuves terminale de spécialité sur certains problèmes et type d’exercices. Sans cela, ce sont les élèves a priori les moins en réussite en mathématiques qui se verraient imposer les conditions de passation les plus restrictives dans le cadre de l’examen : un comble !
  • l’absence de toute correction automatisée, et encore moins par une IA : s’agissant d’une épreuve d’examen, qui plus est universitaire, il n’est pas envisageable de traiter ainsi des candidat·es. Le ministère argumente sur le gains de temps pour les correcteurs·trices (sur une correction d’un QCM, rappelons-le …), et sur la faiblesse de leur nombre dans la discipline, puisqu’ils sont retenus par la correction des spécialités et le Grand Oral ;
  • un poids de maximum 5 points sur la partie « automatismes », afin de permettre de valoriser un travail rédigé de restitutions de techniques, de recherches et de réflexion mathématiques, qui sont les objectifs du lycée, et doivent pouvoir être évalués sur suffisamment de questions, de type varié et couvrant largement plusieurs parties du programme.

Le SNES-FSU a également déposé, sans succès, un amendement en CSE, visant à renommer l’épreuve, qui porte officiellement le nom d’ « Épreuve Anticipée de Culture Mathématique » (EACM), formulation qui peut ouvrir la porte à des dérives du type de celles relevées dans les évaluations internationales, qui de fait ne permettent pas d’évaluer tout un pan de l’activité mathématique telle que pratiquée en classe en France (et notamment la démonstration et l’argumentation).

Des conditions d’instauration de l’épreuve très révélatrices

Plusieurs mois (et ministres …) étaient passés au printemps 2024, soit près de 6 mois après l’annonce de G. Attal, laissant croire à son enterrement, lorsqu’elle a ressurgi avec la saisine du Conseil Supérieur des Programmes (CSP) par N. Belloubet, lui demandant de produire un cadre à cette nouvelle épreuve, et de cerner les évolutions de programmes éventuellement nécessaires en amont que pourrait entraîner sa mise en place.
Jusqu’à juillet 2024, rien n’a filtré et aucune concertation n’a été organisée sur l’épreuve elle-même. Il en a d’ailleurs été ainsi jusqu’à fin janvier 2025, nourrissant de fait le questionnement des collègues.
A ce jour, rien n’a non plus filtré sur les aménagements de programmes à venir : le monologue de la DGESCO se poursuit donc.

Mais en juillet 2024, le Conseil Scientifique de l’Education nationale (CSEN), installé par J.M Blanquer et présidé par S. Dehaene, avait tenu à produire une note de cadrage « spontanée », dans laquelle il plaidait pour une épreuve unique, commune à tous les élèves, quelques que soient leurs profils, se présentant comme une certification, sans doute sur le modèle de PIX, et introduisant possiblement une correction automatisée par IA dans la définition des questions posées aux élèves, à partir d’une estimation initiale de leur niveau sur les premières questions (sujet un modèle adaptatif donc). Cette irruption soudaine dans le débat est passée relativement inaperçue, mais au vu des informations diffusées à l’occasion du CSE, on voit qu’elle a hélas pesé dans les choix finaux … bien que se démarquant assez nettement de la commande ministérielle, et venant piétiner largement les prérogatives du CSP.
Le CSEN, qui entendait probablement continuer à peser lourd sur l’avenir du baccalauréat à cette occasion (voir à ce sujet nos analyses) s’est donc une nouvelle fois révélé être un continuateur du blanquérisme éducatif, sur ce sujet comme sur d’autres.

Rappelons que cette intrusion du CSEN dans la conception de l’épreuve n’était pas neutre pour le SNES-FSU, qui défend un baccalauréat crédible, premier grade universitaire, pourtant devenu largement illisible pour les élèves et les familles depuis l’introduction d’une dose massive (40%) de contrôle continu. La place écrasante prise par Parcoursup et l’extension de la sélection à l’entrée du Supérieur est en effet telle, que nombre de formations y avaient depuis longtemps plaidé pour un moyen de relativiser l’appréciation de dossiers basées sur le contrôle continu du lycée, en disposant de nouvelles notes nationales : les E3C devaient initialement jouer ce rôle, fragilisant encore le baccalauréat dans son rôle de premier grade universitaire, permettant à ce titre l’accès à l’université sans autre forme de sélection.
Les E3C emportées par la forte contestation de la profession initiée par le SNES-FSU, on a même vu apparaître en mathématiques un test privé de mathématiques, payant, et censé servir d’appui aux dossiers que des candidats veulent valoriser dans les formations les plus sélectives. Alertée dès sa mise en place, l’Inspection générale l’a heureusement marginalisé, en demandant à ce que ce test ne fasse l’objet d’aucune publicité et ne soit pas proposé aux élèves, ni pris en compte dans les processus de sélection de Parcoursup. À ce jour, il n’y a plus que certains élèves de l’enseignement privé qui le passent, de manière heureusement assez marginale : mais pour certains, il y a un vide à combler…

Il est donc difficile de ne pas voir dans cette nouvelle épreuve de fin de Première un retour par la fenêtre des E3C sorties par la porte en 2020/2021… On voit aussi là que les intentions de G. Attal de provoquer un « choc des savoirs » prolongé jusqu’au baccalauréat n’est pas sans lien avec un renforcement possible d’une sélection déjà largement installée à l’entrée du supérieur. Ce dernier vient d’ailleurs d’appeler à un « Choc des Savoirs dans le Supérieur », y promettant sans doute derrière une sélection toujours plus renforcée, dans une forme de continuum instaurant, de la sixième à l’université, un système toujours plus élitiste et plus discriminant, et ce dès le plus jeune âge.

Vote en opposition au CSE

En CSE, le SNES-FSU a pointé le non-sens d’une telle épreuve au milieu du cycle terminal, au risque de démobiliser les futurs élèves de Terminale des séries technologiques qui poursuivent la discipline ou des élèves de la voie générale tentés de renoncer à l’option de mathématiques, avec les effets sur l’orientation post-bac. Il estimé aussi que les orientations qui pourraient découler de sa mise en place ne feraient qu’aggraver les défauts du lycée actuel.
Dans ce cadre, l’épreuve anticipée de « culture mathématique » de fin de Première est en effet à la fois un verrou qui empêche pour le moment toute mise en place d’un enseignement de « mathématiques pour tous et toutes » que porte le SNES-FSU sur la totalité du cycle terminal, mais surtout un critère supplémentaire de sélection dans Parcoursup. Pour contourner ces évolutions accroissent les dérives déjà à l’oeuvre, le SNES-FSU continue de porter l’exigence d’une remise à plat du lycée et du Bac Blanquer : il demande ainsi de manière transitoire le déplacement de cette épreuve en fin de Terminale, en lui conservant bien entendu son caractère national et anonyme.

Sur la base de ces analyses, un seul avis s’imposait pour le SNES-FSU, qui a donc voté en CSE contre la mise en place de cette épreuve.


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