Signez et faites signer la pétition sur la réforme du collège
EPI et AP, quésaco ?
Selon la grille horaire et les éléments présentés par le ministère comme base de travail pour la réforme du collège, quatre heures par semaine et par niveau du cycle 4 (5e/4e/3e) seraient consacrées à de « l’enseignement pratique interdisciplinaire » (trois heures au maximum) ET à l’accompagnement dit « personnalisé » (une heure au moins). Ces 4 heures sont partie intégrante des horaires disciplinaires qui figurent sur la grille proposée. Ainsi, le total des horaires disciplinaires sur chaque niveau du cycle 4 représenterait 25,5h DONT 4 heures d’EPI. En 6e, le total des horaires d’enseignement représenterait 25,5 heures DONT 3 heures d’accompagnement.
Une absence de cadrage qui renvoie tout au local
La proposition du ministère consiste à renvoyer l’essentiel du cadrage à l’autonomie de l’établissement, ou plus exactement à l’autonomie du conseil pédagogique. Ce conseil, présidé par le chef d’établissement qui en désigne aussi les membres, sera responsable de « l’identification des disciplines portant les thèmes de travail », des « modalités de regroupement des élèves et de recrutement des élèves », de « la définition de la période de travail » sur tel ou tel thème, du « nombre de thèmes travaillés » sur l’année et du « nombre de thèmes travaillés » sur le cycle. Les EPI devraient en effet s’inscrire dans un total de 8 thèmes s’appuyant sur des éléments de programmes identifiés avec obligation pour les collègues de travailler au moins deux thèmes par an.
Une fois les décisions concernant l’organisation des EPI et de l’AP prises, le conseil pédagogique (pour ne pas dire le chef d’établissement) n’aurait qu’à les « présenter » au conseil d’administration pour information.
On voit là les dangers qui planent sur la liberté pédagogique des collègues qui pourraient se voir imposer des modalités de travail pour l’année (alignements, thèmes de travail, obligation de travailler en interdisciplinarité sur tel ou tel niveau etc.). Le total des heures laissées à la main du conseil pédagogique représenterait environ 20% de la dotation horaire globalisée. Les leviers de pression proposés ici aux directions d’établissement sont énormes et laissent entrevoir de nombreuses possibilités de mise en concurrence des disciplines et des collègues.
L’interdisciplinarité, pourquoi pas ? Mais sous certaines conditions.
Le SNES-FSU est loin d’être opposé au travail interdisciplinaire, entendu comme un moyen pour les élèves de davantage percevoir les liens entre les disciplines et donc de donner davantage de sens à l’enseignement disciplinaire proposé. Il implique donc que des objets d’étude soient repérés dans des programmes disciplinaires cohérents entre eux. L’enseignement interdisciplinaire devrait pouvoir se mettre en place progressivement au fil de la scolarité au collège. Faire travailler les élèves sur des thèmes transversaux, plaqués artificiellement, ne saurait faire davantage sens pour les élèves et est donc une méthode à bannir. Or, pour l’heure, si le ministère nous indique travailler en lien étroit avec le Conseil supérieur des programmes chargé de leur écriture, nous ne disposons toujours pas des nouveaux programmes, travaillés dans l’opacité. Ils devraient être connus au plus tôt en avril et en consultation au cours des mois d’avril et de mai 2015, c’est-à-dire au moment de la présentation de la réforme du collège au Conseil supérieur de l’éducation.
Ensuite, le travail interdisciplinaire nécessite un investissement important des collègues et ne saurait se faire que si les personnels sont volontaires, bénéficient de moyens de concertation fléchés et sont décemment formés. Les hypothèses qui consisteraient à faire former les hiérarchies intermédiaires (chefs d’établissement et IPR) avant la rentrée 2016 pour ensuite leur demander de former les personnels dans les établissements ne nous semble ni sérieuses, ni acceptables.
Un bilan catastrophiste et unilatéral
Si l’enseignement interdisciplinaire nous semble loin d’être inutile, il ne saurait être la panacée à tous les problèmes que connaît le collège. La ministre s’est employée à présenter le collège sous un jour très sombre et caricatural : selon elle, le collège « aggrave la difficulté scolaire », serait « profondément inégalitaire », « monolithique dans son approche disciplinaire », susciterait « l’ennui, voire la perte du goût pour le travail et l’effort », serait « inadapté », « peu efficace » et « peu motivant », « anxiogène » …. N’en jetez plus !
A la limite de l’insulte pour les professionnels que nous sommes, la ministre fait soigneusement l’impasse sur des années de coupes claires dans les dotations d’un maillon du système éducatif qui était déjà notoirement sous-doté. Exit l’augmentation continue des effectifs par classe, la diminution des moyens pour le travail en groupes, le manque de cohérence des programmes, la multiplication des réunions et des prescriptions, la mixité sociale et scolaire de plus en plus faible, l’absence de moyens pour la concertation et le travail collectif, la formation initiale et continue des enseignants en berne…