Le ministre de l’Agriculture, emphatique, lance un appel aux personnes désœuvrées afin de « rejoindre la grande armée de l’agriculture française ». À sa rescousse, sa collègue, porte-parole du gouvernement, prend aussitôt un exemple : « Nous n’entendons pas demander à un enseignant qui aujourd’hui ne travaille pas compte tenu de la fermeture des écoles, de traverser toute la France pour aller récolter des fraises ». Énième provocation de Sibeth Ndiaye, probablement pas la dernière. Maladresse pure ou expression de l’inconscient collectif du gouvernement ?
Depuis le début du quinquennat, on sait l’estime dans laquelle le président de la République et son gouvernement tiennent les fonctionnaires, vaine, inutile et trop nombreuse engeance. Les personnels de l’Éducation savent aussi le soutien de leur ministre, jamais avare de nouvelles injonctions. Aujourd’hui, ce dernier est forcé de contredire sa collègue, en rappelant que depuis le début de la crise sanitaire, élèves et enseignants ne sont pas en vacances. Mais, sa communication antérieure a desserré la bride à toute une hiérarchie zélée, plus soucieuse du contrôle des enseignants que du respect des prescriptions sanitaires et de l’intérêt des élèves : présence dans les établissements, outils imposés, enquêtes sur le temps passé à se connecter… Rien ne nous aura été épargné. Les professeurs, eux, ne vont pas aux fraises ! Ils rivalisent d’ingéniosité pour assurer la fameuse « continuité pédagogique » à distance avec leur propre matériel, en dépit des difficultés techniques, ou, dans les établissements, pour assurer la garde des enfants des personnels soignants.
Au lieu de ramener sa fraise, madame NDiaye ferait mieux de saluer l’engagement de nos professions !