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Tandis que le ministère instrumentalise la suppression des correctifs académiques au DNB auprès des médias, la seule question qui importera aux parents d’élèves sera bientôt celle-ci : « Mon enfant pourra-t-il entrer en Seconde ? »

À partir de la session 2025, le DNB serait obligatoire pour passer en Seconde. Il s’agit là d’une régression historique. Si le DNB est un examen qui a régulièrement évolué au cours des décennies, c’est la première fois qu’il deviendrait obligatoire pour passer en Seconde générale, technologique ou professionnelle. L’enjeu serait de taille pour éviter la case « prépa-Seconde » dont les horaires d’enseignement général ne permettraient pas de préparer une entrée au lycée dans de bonnes conditions, mais plutôt l’expulsion du système scolaire à 16 ans.

Fin de la « tricherie générale » ?

Plusieurs mesures du « Choc des savoirs » se conjuguent à court et à plus long terme.

Les médias découvrent une méthode cosmétique qui existe depuis longtemps sans que la plupart des professeur·es en aient même conscience. Les résultats finaux du DNB de l’ensemble des élèves de chaque académie sont souvent rehaussés par les rectorats. L’application de ce correctif académique serait interdite par le ministère dès la session 2024, soit à la fin de cette année.

Par ailleurs, le poids des épreuves terminales augmenterait pour atteindre 60% du score total ; or les résultats des épreuves écrites sont plus faibles que le score du bilan de fin de cycle 4.

Enfin, le bilan de fin de cycle 4, évaluation transversale des domaines du socle, correspondant à la partie « contrôle continu » de l’examen, serait abandonné pour un retour aux moyennes disciplinaires. Le bilan de fin de cycle assurait 80 points sur un total de 800 points pour les élèves les plus fragiles. Les enjeux d’une orientation réussie vers des voies professionnelles dans lesquelles le taux de pression est important ainsi que la déconnexion entre le bilan et les disciplines ont le plus souvent bénéficié aux élèves. Les moyennes disciplinaires risquent d’être moins favorables au candidat.es. Depuis la réforme du collège 2016, le SNES-FSU demandait l’abandon du bilan de fin de cycle 4, interprété de façon différente dans chaque établissement et illisible pour les familles. Cette mesure aurait pu redonner du sens à ce premier examen de la scolarité de l’élève, comme expérience symbolique, mais aujourd’hui, il se transforme en couperet.

A plus long terme, les regroupements de niveau devraient eux aussi participer à la chute du taux d’obtention du DNB en creusant les écarts entre les élèves selon le niveau de leur regroupement.

Si le DNB restait facultatif pour poursuivre ses études au lycée, on pourrait débattre de l’utilité ou non du correctif académique, tout en gardant en tête qu’un·e jeune sans diplôme reste plus longtemps sans emploi qu’un·e jeune qui a obtenu le DNB. Dans le cas présent, le ministère estime – et G. Attal assume – que la réforme du « Choc des savoirs » augmentera le taux d’échec du DNB de 10% à 20%. A court terme, un·e élève sur cinq se verrait privé·e d’un accès à la classe de Seconde ! Cette proportion est énorme !

Géographie des Prépa-Seconde

Nombreuses seraient les « prépa-Seconde » que le ministère devrait ouvrir pour recevoir 20% d’élèves sortant de Troisième. 

Plus nombreuses encore seraient-elles dans les départements les plus socialement défavorisés et donc avec les taux de réussite les plus bas. C’est en éducation prioritaire que s’abattrait davantage l’interdiction d’étudier au lycée. Les jeunes seraient alors orienté·es de façon prioritaire vers l’apprentissage puisque le gouvernement souhaite 300 000 apprentis de plus (20 heures d’enseignements généraux et 7 heures « articulées avec les enseignements et la dimension professionnels du parcours envisagé, pouvant inclure des séquences d’observation en milieu professionnel »).

Un leurre ministériel…

Le ministère dirige actuellement les projecteurs médiatiques sur les correctifs académiques pour que l’opinion publique oublie la question du tri des élèves dès la Sixième. En effet, depuis la rentrée des vacances d’hiver, des parents d’élèves participent à des opérations de type « collèges morts » pour signifier leur rejet des groupes de niveau et leur indignation face aux manques de moyens alloués aux établissements.

La vraie question est de savoir pour quelle raison le DNB deviendrait obligatoire pour entrer en Seconde. Il n’y en a aucune de rationnelle si on pense l’Éducation nationale comme un domaine d’investissement pour l’avenir. En revanche, pour un gouvernement néolibéral qui vise à saborder le service public pour favoriser la marchandisation de l’École (secteur privé favorisé et développement des cours particuliers privés), cela prend tout son sens. Il s’agit de faire faire des économies à l’Éducation nationale même si les dépenses étatiques en direction des entreprises pour qu’elles emploient des apprenti·es sont plus importantes que celles de la scolarisation des mêmes élèves.

A terme, ce détournement d’élèves permettrait de multiplier les suppressions d’emplois en lycée. C’est un nouveau plan social qui s’y annonce.

En attendant, l’organisation de la prépa-Seconde renvoyée au local permettrait de servir de variable d’ajustement des services. Et des professeur.es se retrouveraient en difficulté dans des classes (sur)chargées d’élèves, humilié·es d’être relégué·es dans une classe de transition.

pour flatter les professeur·es

Le ministère cherche aussi à rallier des professeur·es en prétendant haut et fort leur redonner la main sur une évaluation d’examen alors qu’il la leur reprendra au quotidien.

Les évaluations nationales standardisées se multiplient en effet (en Sixième et Quatrième, et en mathématiques en Troisième) et les certifications hors programme foisonnent (Educfi, Educdroit, Pix, Ev@lang,…). Dans le projet gouvernemental, ce sont elles qui vont piloter la vie pédagogique des collèges puisque les nouveaux programmes seront écrits en lien avec celles-ci, avec des objectifs annuels voire infra-annuels. Il est prévu qu’elles soient décisives pour la distribution des élèves dans les regroupements de niveau. Elles risquent de conduire rapidement au « teach to the test » dont on a observé les effets pervers au Royaume-Uni.

Plus largement c’est tout l’enseignement qui se trouverait caporalisé avec des méthodes imposées comme « bonnes pratiques » (fluence, méthode dite de Singapour…) et des manuels labellisés.

Ces orientations sont proprement inacceptables pour les élèves et leurs familles comme pour les personnels !

Le SNES-FSU appelle à la grève le 2 avril, actions locales et avec les parents, réunions publiques. L’appel du congrès de la Rochelle est clair : « Nous ne trierons pas nos élèves ! », « Nous ferons échec au Choc des savoirs ! »


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