Nous nous réunissons aujourd’hui dans le contexte particulier des récents actes de barbarie qui témoignent une nouvelle fois de l’obscurantisme de leurs auteurs. Plus que jamais, c’est notre modèle de société qui est attaqué. Nous réaffirmons notre attachement à la qualité du service public et particulièrement de l’éducation nationale qui doit être conforté pour répondre aux enjeux éducatifs que pose cette actualité tragique. Si le « pacte sécuritaire » en vient à mettre en cause le dogme de la « responsabilité budgétaire », un « pacte éducatif » devrait aussi participer aux réponses apportées. Notre contribution à la transmission des valeurs républicaines est d’autant plus au centre des préoccupations éducatives de tous les personnels et les moyens de la réaliser sont attendus.
Concernant notre métier, le travail constructif mené entre janvier et juin 2014, puis laissé en jachère pendant un an, pour l’actualisation de notre circulaire de missions, a finalement abouti à la rédaction d’un texte globalement ambitieux. Il doit maintenant être décliné dans toutes ses dimensions pour la carrière des CPE : de la mise en conformité des concours de recrutement aux modalités d’évaluation de leur activité professionnelle, en passant par la redynamisation de la formation initiale et continue. Cependant, aucune création de postes de CPE n’est prévue par la loi de finances 2016 pour accompagner cette ambition. Les postes offerts aux concours couvrent juste les sorties du corps. Les rectorats gèrent la pénurie en procédant par redéploiements, certains implantent des postes partagés qui ne répondent pas aux attentes des communautés éducatives. Le manque de titulaires est avéré et les viviers de TZR doivent être renforcés partout. Nous nous interrogeons vraiment sur l’objectivité des critères servant au dialogue de gestion entre les académies et le ministère tant les moyens en éducation sont en dessous des réalités de terrain.
Ces besoins sont pourtant conséquents. A partir d’une évaluation rigoureuse en fonction du nombre et de la taille des établissements sur tout le territoire, le SNES détermine déjà un seuil minimal de 740 créations de postes. Cette évaluation ne prend en compte ni les internats ni le post bac ni les publics à besoin particulier. Ce sont en fait plusieurs milliers de postes qu’il faudrait envisager en comptant un CPE pour 250 élèves.
Dans ces conditions, un texte de missions, aussi volontariste soit-il, ne permet pas aux CPE d’embrasser toutes les dimensions du métier. Trop de collègues sont confrontés à des effectifs d’élèves incompatibles avec l’exercice de leurs fonctions. Les tensions subies au travail concernent une proportion de CPE toujours en augmentation.
Ces tensions sont accentuées par la mauvaise volonté de certains chefs d’établissements. Nous saisissons cette CAPN pour faire remonter à Mme La Ministre la trop grande fréquence des différends entre CPE et chefs d’établissement sur l’application des textes concernant leurs obligations de service. Cette circulaire, contrairement à son objectif et c’est un paradoxe, n’a pas encore réussi à réduire ces tensions. Les interprétations les plus farfelues peuvent conduire à découper la journée des CPE de façon totalement inappropriée, à morceler la semaine de petites vacances, à convertir les quatre heures laissées à leur disposition en heures de réunions, etc… Nous posons la question de la formation des chefs d’établissement tant leur méconnaissance du métier de CPE est source de malentendus et de conflits. Nous observons aussi et ce n’est pas sans lien, une grande frilosité vis à vis de la légitimité des CPE à percevoir des IMP.
Les personnels vivent d’autant plus mal ces tensions que leur salaire reste bloqué et qu’ils voient leur pouvoir d’achat baisser d’année en année. L’alignement de l’indemnité forfaitaire des CPE sur la part fixe de l’ISOE des enseignants annoncé par la Ministre en novembre 2014 est enfin entériné, il reste homéopathique.
La réforme du collège mise en place à marche forcée est une source de désaccord complémentaire. Si nous partageons les objectifs affichés par le ministère de démocratisation et de réussite de tous les élèves,cette réforme ne peut y répondre. Elle ne fera au contraire qu’accentuer les inégalités entre élèves et entre établissements : mise en concurrence des collèges, diminution des horaires disciplinaires, enseignements interdisciplinaires pour lesquels aucun temps de travail commun n’est prévu entre les personnels, création de hiérarchies intermédiaires… Cette réforme prévoit aussi que les CPE puissent investir les EPI, alors même que le cœur des missions de suivi individuel et collectif peine à être rempli devant les sur-effectifs d’élèves à suivre. Les personnels ne peuvent accepter ainsi de voir constamment leurs missions alourdies, leur salaire stagner, et un ministère qui ne semble pas prendre en considération leurs difficultés sur le terrain, en se refusant notamment à créer les emplois indispensables.