Dénoncés comme conservateurs, privilégiés et élitistes, nous avons été stigmatisés. Le ministre nous
imposait une baisse considérable de salaire (entre 15 et 20% pour la majorité d’entre nous) et une augmentation
de nos obligations de service au nom d’une prétendue justice envers nos collègues de ZEP. Sur le plan
symbolique, c’était pour le ministre l’occasion, conformément à ses déclarations publiques, de remettre en cause
le modèle des classes préparatoires et des grandes écoles.

Alors que le ministre vient d’annoncer la suspension
de son projet et la reprise des négociations à la suite de la mobilisation massive des professeurs de CPGE et à
de nombreux soutiens émanant des Grandes Écoles, du monde économique et de personnalités politiques de
tous bords, nous tenons à affirmer notre fierté à exercer notre métier de professeur et entendons défendre notre
statut et le modèle des CPGE.

Le ministre reproche aux CPGE d’être un système au service des enfants de classes favorisées. Nous affirmons
au contraire que le système des prépas peut être un puissant levier d’ascension sociale car il offre à tous une
formation gratuite, permettant d’accéder sur concours à des écoles prestigieuses et ainsi à des emplois valorisés
socialement. La sélection à l’entrée se fait uniquement sur des critères scolaires et non en fonction des revenus
ou du réseau des parents, les candidats boursiers étant même avantagés à dossier scolaire équivalent. Les
méthodes pédagogiques mises en place en CPGE sont particulièrement adaptées aux élèves issus de milieux
défavorisés (suivi individuel des élèves, conseils personnalisés pour que chacun progresse et accède à un très
haut niveau, entrainement à l’oral, travail sur les méthodes, cohérence des cursus, etc.). Si les élèves issus de
milieux défavorisés sont relativement moins nombreux en CPGE, c’est en raison du tri social qui s’opère en
amont. Intervenant en fin de cycle, nous recevons un faible nombre de bons dossiers venant de ces milieux
sans être en rien responsables d’un état de fait que nous déplorons.
La question que le ministre devrait se poser est celle de savoir comment il est possible d’amener massivement
les élèves issus de milieux défavorisés vers l’excellence en fin de lycée.

Dégrader les conditions de travail des
enseignants de CPGE ne va en rien permettre de faire progresser la démocratisation scolaire ! Si le système des
CPGE est efficace, c’est justement parce que la Nation a consenti à y mettre les moyens. En retour, les CPGE
contribuent à la formation initiale d’une grande partie des chercheurs universitaires français (et la quasi-totalité
des prix Nobel ou Médailles Fields) ainsi que des cadres dont notre pays a besoin pour sa vie économie et
sociale. Au lieu de chercher à détruire ce qui fonctionne, il faut au contraire dénoncer la faiblesse des sommes
investies à l’Université (inférieures à celles de la plupart des pays développés) et dans l’éducation prioritaire.
La décharge accordée à certains enseignants de ZEP est une très bonne chose mais n’est qu’une mesure
cosmétique face au manque de moyens dont souffre l’ensemble du système éducatif.

Nous ne sommes pas des privilégiés, nous ne bénéficions pas d’un statut spécifique par rapport aux autres
enseignants. Le traitement de base d’un professeur est le même qu’il enseigne en CPGE ou en collège. Le
salaire moyen relativement élevé des enseignants de CPGE résulte d’une part du fait que nous avons en
moyenne plus d’ancienneté et sommes presque tous agrégés et d’autre part du fait des heures supplémentaires
que nous pouvons effectuer. Le fait que nous soyons en capacité de travailler plus que notre service normal ne
prouve en rien que celui-ci n’est pas assez lourd contrairement à ce qu’a affirmé le ministre. La charge de
travail que représente un service complet en CPGE est déjà importante entre les cours à préparer et à effectuer,
les copies à corriger, les réunions, les rendez-vous demandés par les élèves, etc. Les heures supplémentaires
sont imposées dans certaines disciplines par les horaires légaux d’enseignement et sont d’une façon générale
volontairement favorisées par le Ministère, afin d’éviter de créer des postes (plus onéreux), même lorsque cela
serait justifié. La rémunération de ces heures n’est comptabilisée ni dans le calcul de la retraite, ni dans les
congés maladie ou maternité. Il est malhonnête de nous reprocher d’effectuer des heures supplémentaires alors
même que les rectorats et les proviseurs nous demandent avec insistance de les accepter afin de pallier un
manque chronique d’enseignants.

Enfin, nous refusons de rentrer dans le jeu du ministre qui cherche à diviser le corps enseignant et affirmons au
contraire haut et fort notre soutien à nos collègues du primaire, du secondaire et de l’Université. Au-delà des
différences de niveau où nous enseignons, nous sommes tous des passeurs de savoirs et demandons à être
respectés, reconnus et valorisés en tant que tels.

Lyon, jeudi 2 janvier 2014


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