Aucunement guidée par l’intérêt des élèves, cette réforme privilégie l’employabilité au détriment de la formation et s’appuie sur le Pacte pour changer nos métiers et attaquer nos statuts.
Le métier à la main du chef d’établissement
Les CPE directement concerné.es voient des missions du Pacte LP les éloigner de la circulaire de 2015 et d’autres empiéter clairement sur les leurs pour être attribuées à d’autres personnels.
Les pressions des Proviseur·es sur les CPE sont nombreuses pour accepter des « Briques » au prétexte d’une reconnaissance financière d’un travail déjà fait et de dépassements horaires. Mais la remise d’une lettre de missions afférente au Pacte renforce l’emprise des chefs d’établissement. Cette pratique managériale met à mal l’acquis d’un CPE, cadre A, concepteur de son activité. Elle décentre le métier de CPE de ses fondamentaux poussant les personnels à s’engager sur des priorités fixées par la direction.
Toujours moins d’ambitions pour les élèves
La « gratification des périodes de stage » priorise le temps passé en stage au détriment du reste. La formation professionnelle initiale des jeunes ne repose plus sur l’équilibre entre savoirs généraux et savoirs professionnels en établissement. Les mesures fléchées vers l’insertion professionnelle font basculer les jeunes vers l’apprentissage et entravent leur désir de poursuites d’études.
L’objectif à peine masqué est bien de transformer les lycées professionnels en centres d’insertion professionnelle et les personnels, dont les CPE, en agent·es d’insertion.
Pour l’ensemble des syndicats de la FSU, ce renoncement scolaire et social sans précédent est inacceptable. Nous combattons cette réforme qui entend réduire les élèves de LP à l’employabilité au détriment d’une formation ambitieuse.
QUESTIONS À SIGRID GÉRARDIN, COSECRÉTAIRE GÉNÉRALE DU SNUEP-FSU
En quoi la réforme des lycées professionnels est-elle une réforme sociale qui dépasse le seul cadre scolaire ?
La réforme s’inscrit dans un projet global. Au prétexte d’atteindre le plein emploi, Macron et son gouvernement attaquent le travail dans toutes ses dimensions ciblant en priorité les populations les plus fragiles.
La réforme des retraites fera travailler plus tard les « seniors », la réforme du RSA vise les plus éloignés de l’emploi en conditionnant leur allocation à du travail effectif, et la réforme des lycées pro n’a d’autre finalité que d’offrir une main d’œuvre gratuite et immédiatement exploitable aux entreprises. Cette réforme est organisée au prisme des intérêts particuliers du patronat et aucunement dans l’intérêt des élèves. Elle participe aussi clairement à la privatisation engagée du système éducatif avec de nombreux dispositifs qui orchestrent le remplacement de personnels d’éducation des lycées pros par des acteurs du monde économique.
Pourquoi la sécurisation des parcours scolaire et professionnel des élèves passe par un renforcement de la voie pro scolaire?
Les jeunes scolarisés en LP sont majoritairement issus des classes populaires. Cumulant des difficultés sociales, économiques et scolaires, ils sont souvent défiant.es vis-à-vis des institutions. Ils ont plus que d’autres besoin de « plus et mieux d’école » pour reprendre confiance en eux et obtenir un premier niveau de qualification par un diplôme. Or, réforme après réforme, le MEN a renforcé leurs difficultés en réduisant toutes les disciplines à peau de chagrin. Si Grandjean et Attal persistent à vouloir augmenter les stages en Terminale, ils porteront eux aussi la responsabilité de réduire le temps scolaire. Le « choc des savoirs » prôné par le ministre se concrétisera par moins d’école pour nos élèves. Sans formation équilibrée et ambitieuse entre matières générales et professionnelles, c’est l’avenir scolaire et professionnel des jeunes qu’ils mettent en danger tout comme la cohésion sociale de notre pays. La formation professionnelle publique ne peut se réduire à du formatage à l’emploi. Nos élèves ont besoin de savoirs ambitieux et émancipateurs pour devenir les citoyens éclairés de demain.