Alors que le dialogue social est à l’arrêt sur le sujet de la réforme de la formation des enseignant·es, un document a fini par fuiter. Quatre mois depuis la dernière réunion sur le sujet, aucun retour n’a été fait après ce premier tour de concertation avec les organisations syndicales. Les ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur et de la recherche ont donc poursuivi leur travail en privilégiant un seul scénario parmi plusieurs envisagés et le pire a été retenu. Tout a été fait pour exclure les organisations syndicales représentatives de ces discussions.
Le contenu du diaporama qui circule, même s’il est qualifié de document de travail par les ministères, est révélateur des projets gouvernementaux. La volonté qui s’en dégage est claire : évincer les universités, reprendre complètement en main la formation des enseignant·es, la formater, revoir les concours et développer des « bonnes pratiques » : en un mot déqualifier nos métiers et attaquer les statuts.
La création de nouvelles structures, les Écoles Normales Supérieures du Professorat (ENSP), aux côtés des INSPE pose la question cruciale de leur articulation. Il n’y aura pas de moyens supplémentaires dédiés à la formation des enseignant·es, des CPE et PsyEN. Les formateurs et formatrices seront dépossédé·es de leur liberté pédagogique, transformés en applicateurs de maquettes provenant « d’en haut » et ne répondant pas aux enjeux.
Dans le premier degré la licence PPPE devient quasi la seule voie d’accès au CRPE. Les modalités d’accès à la fonction de formateurs relèvent d’une opacité totale renforçant un peu plus les notions subjectives de mérite et attaquant violemment le fonctionnement universitaire.
Ce document révèle un mépris total du métier d’enseignant·e et de la formation exigeante à laquelle ils et elles doivent avoir accès. Les ENSP constituent un projet d’école qui renonce à la professionnalité des enseignant·es, à une école émancipatrice sans tri social.
Ainsi, les enseignant·es, CPE et PSY-EN ne seront plus concepteurs et conceptrices de leur métier. Dans le cadre du « choc des savoirs », ils et elles transmettront des « fondamentaux » en appliquant des méthodes pédagogiques hors-sol, même s’ils ne sont pas explicitement nommés, c’est nécessairement cette même logique qui s’appliquera aussi pour les PsyEN.
Enfin, il est complètement méprisant et irresponsable de vouloir mettre en place cette réforme pour la session 2025 à moins de cinq mois de la rentrée alors qu’aucune maquette de licence n’est prête et que les programmes des concours n’ont pas été dévoilés. Le ministère prétend renforcer l’attractivité, mais avec ce projet, c’est le contraire qui va se produire en aggravant encore davantage la crise d’attractivité actuelle ! La FSU exige un autre projet de réforme sur la base d’un dialogue social sincère et sérieux.
Bagnolet le 3 avril 2024