Les arbitrages sont révélateurs du mépris ministériel pour les personnels et les élèves, et d’une ignorance des réalités du terrain : enchaînement des épreuves et des corrections dans des délais très serrés voire qui se chevauchent, contenus évaluables étendus à l’ensemble des chapitres des programmes à traiter tout en préparant le grand oral sans horaire dédié. Le bac 2024 est organisé contre les personnels et les élèves.
Était-ce si insupportable de suivre les analyses de celles et ceux qui connaissent vraiment le système éducatif et le font fonctionner ?
Et pour la session 2025, comment comprendre le maintien du projet de réforme de la voie professionnelle avec un calendrier du bac prévoyant des épreuves en mars ?
Passages en force sur les programmes menant à des impasses
Dès l’annonce du report des épreuves à juin, nos organisations syndicales ont fait des propositions d’aménagements de programmes de spécialités en distinguant programme d’examen et d’enseignement. Tous les élèves, et notamment les plus fragiles, doivent en effet pouvoir bénéficier du temps nécessaire pour réussir à l’examen : définir des étapes dans les programmes permet aux professeur·es de hiérarchiser les priorités pour adapter les progressions à leurs élèves.
Le ministre a fait le choix d’ignorer l’expertise des personnels pour les lancer dans une nouvelle course contre la montre aux effets pédagogiques délétères ! Il n’a même pas su desserrer un minimum le calendrier et supprimer le principe de 2 épreuves écrites sur 2 jours pour un même enseignement, et ce malgré les risques que ce système fait peser sur l’égalité de traitement devant l’examen et avec des modifications de notes à coups de « péréquations massives » à l’insu des correcteurs.
Il faut le dire sans détour : il sera impossible de préparer le grand oral faute de temps et d’attendus clairement ancrés dans les apprentissages scolaires. La voie technologique est une fois de plus oubliée et le projet, cœur des enseignements technologiques, reste impossible à évaluer dans ce cadre.
Pour un calendrier qui respecte le travail de toutes et tous
Les épreuves de français, philosophie, de spécialités et le Grand oral s’enchaînent en quelques jours. Les correctrices et correcteurs vont donc devoir mener de front la correction de plusieurs épreuves tout en assurant les épreuves orales, les épreuves pratiques et les épreuves de contrôle, ce qui compromet grandement leur participation aux réunions d’entente, pourtant indispensables pour l’harmonisation des attentes. Depuis plusieurs années, nous alertons sur les conditions de correction en philosophie et en français. L’action de la FSU avait d’ailleurs contraint le ministère à reconnaître les conditions de travail intenables des collègues jurys en Lettres.
Aujourd’hui, le ministère choisit donc d’ignorer les avis du CHSCT au risque de voir se multiplier les situations à risque pour des personnels déjà éprouvés par une charge de travail toujours plus lourde.
Stop à l’improvisation
Gabriel Attal a aussi décidé, sans aucune concertation, que les élèves de seconde générale et technologique devront faire un stage durant la deuxième quinzaine de juin! Or, à ce stade, rien n’est dit de l’organisation, de la responsabilité, du suivi de ces stages alors que ce type de dispositif constitue toujours un risque supplémentaire de creusement des inégalités scolaires, sociales et genrées. Derrière l’affichage politique, c’est le grand vide ! Nos organisations alertent aussi sur le risque de concurrence avec les élèves de Seconde professionnelle dont 75% sont en stage à cette période, sans compter qu’un autre projet ministériel prévoit d’envoyer en entreprise tous les élèves de Terminale professionnelle sur cette même période dès 2025.
Reprenons la main !
Afin de préserver la santé des collègues et le rythme des apprentissages, nos organisations en appellent à des mesures urgentes.
Dans l’attente d’une refonte des programmes pour les enseignements qui le nécessitent, nos organisations exigent pour cette session 2024 les mesures suivantes :
- suspendre les modalités d’examen parues au BO du 28 septembre afin de consulter les organisations syndicales en vue de publier un calendrier plus respectueux des réalités de terrain et des contraintes organisationnelles.
- décider immédiatement.
- D’allègements ou d’aménagements des programmes d’examen pour chaque épreuve de spécialité,
- Du retour à une épreuve unique par discipline,
- De la transformation du grand oral en épreuve de soutenance de projet dans la voie technologique, et dans la voie générale, en contrôle orale portant sur les mêmes attentes disciplinaires que l’épreuve écrite de spécialité.
À terme, il faudra revoir la totalité de l’organisation du bac et des enseignements en lycée général et technologique.
Cela ne peut se faire que dans le cadre d’une large concertation. Rarement les jeunes n’ont été aussi mal préparé·es à des poursuites d’études.
Cette triste situation est le résultat direct des réformes mises en œuvre depuis 2018 dans lesquelles s’inscrit la réforme de la voie professionnelle que ce gouvernement persiste à vouloir mettre en œuvre, au mépris de l’opposition de toute la profession.