Une réforme toujours aussi impopulaire

« C’est une catastrophe, une tragédie, une abomination. En bref, c’est innommable ! ». À l’instar de cette réaction expressive, ce qui revient très majoritairement c’est que les professeur·es vivent « mal » cette rentrée : « Pas content ! personne satisfait ! Nous regrettons même la DGH de l’année précédente et pourtant elle était déjà insuffisante !!! Il faut arrêter ce massacre avant que l’école explose ! »

Sur plus de 2 400 réponses, 8 répondant.es, qui craignaient d’être invisibilisé.es, trouvent des vertus à la réforme. Une écrasante majorité, pour ne pas dire la quasi-totalité, rejette le choc des savoirs après une rentrée qui confirme toutes les prédictions du SNES-FSU.

Une dégradation des conditions de travail : « J’ai le pire emploi du temps depuis des années. »

Les emplois du temps ubuesques, non respectueux des collègues mais aussi des finalités pédagogiques sont abondamment commentés : séances de deux heures consécutives contreproductives, professeur·es en complément de service qui doivent se déplacer pour une heure dans un établissement, multiplications des heures « de trous »…

«  Pour ma part, la dégradation de l’emploi du temps est un réel problème dans le sens où les groupes sont positionnés soit tôt le matin, soit tard le soir et que sur une semaine complète, je compte 9h de trous. »

À cela s’ajoute une surcharge importante de travail notamment pour la mise en place d’une progression commune au détriment de la liberté pédagogique. « Énorme surcharge de travail, un besoin continu de concertation sur du temps personnel ». De nombreux·ses collègues font remonter du travail supplémentaire pendant les vacances, les soirées, sans aucune reconnaissance…

Il faut également déplorer les projets et les voyages pédagogiques en voie de disparition. 

« Beaucoup de bazar pour une usine à gaz que tout le monde espère voir se terminer rapidement. » !

L’action collective pour résister

« Nous sommes satisfaits d’avoir résisté jusqu’au bout : nous n’avons pas appliqué la réforme. »

Loin des annonces ministérielles, la moitié des établissements ne fait pas de groupes de niveau et même un établissement sur dix applique pas la réforme. Il y a alors la satisfaction de l’avoir enrayée, souvent suite à de fortes mobilisations.

« Une grande résistance a été mise en place pour ne pas faire de groupe de niveau. »

Malheureusement, cette résistance n’a pas toujours suffit ou n’a pas été possible dans tous les établissements. Des collègues témoignent des pressions accrues des personnels de direction, voire mêmes des IPR, pour mettre les personnels au pas. « Notre principal a même demandé aux IPR de maths et Lettres de venir “nous redresser les bretelles” pour nous faire rentrer dans le rang. La réunion a eu lieu la semaine dernière et ne s’est pas très bien passée, notamment en lettres. Je suis partie en claquant la porte car je ne supportais plus le discours injonctif de l’inspectrice. »

Les effets de la réforme sur les élèves

« Les élèves ont d’abord été en classe entière, une dynamique de classe et une relation prof/élèves s’est instaurée et a été cassée. »

Les professeur·es vivent mal la souffrance des élèves qui se retrouvent séparés de leur classe ou dont ils ne peuvent assurer le suivi sur l’année. « La mise en place des groupes a été un déchirement pour les professeurs comme pour les élèves qui ont perdu leurs repères dans la matière. »

Quant aux regroupements d’élèves faibles, bien loin d’assurer un cadre d’études serein et rassurant, posent souvent des problèmes de discipline. De plus, chaque élève ayant des difficultés différentes nécessiterait une différenciation personnalisée ; ces groupes n’ayant pas un « niveau homogène » : «  Les groupes à faible niveau sont difficiles à gérer: regroupement d’élèves dys ou/et avec troubles de l’attention ou/et n’ayant pas la volonté de travailler. » ou « Les groupes d’élèves à besoin en français sont difficiles : il n’y a aucune émulation et le travail est très lent, peu efficace. De plus, les élèves sont stigmatisés. Enfin les difficultés sont très diverses (de l’élève dys à celui qui ne sait pas lire ou ne parle pas français) mais l’effectif reste élevé avec 16 élèves en moyenne. Il est évident que les élèves de ces groupes n’auront pas beaucoup progressé en fin d’année et ils auront vu moins de choses donc l’écart se sera accentué par rapport aux élèves restés dans le groupe classe hétérogène. »

Quel suivi ?

« Le suivi des élèves est rendu plus difficile : nous n’avons toujours pas intégré de quelle classe vient tel ou tel élève et qui est son prof principal. Les profs principaux de Sixième et Cinquième sont eux aussi un peu perdus. »

L’éclatement du groupe classe c’est aussi celui de l’équipe pédagogique. Entre les élèves qui changent de professeur.es plusieurs fois dans l’année, les classes qui ont quatre professeur·es de français ou mathématiques différent·es et les professeur·es qui ont un groupe avec des élèves de quatre classes… C’est le suivi sérieux des élèves qui en pâtit. L’impossibilité de pouvoir échanger avec ses collègues sur une problématique collective est patente. « Il n’a pas été facile de récupérer pour ma part des élèves venant de trois classes différentes, car bien que nous avions prévu les séquences, certains points ont été suivis, d’autres non… » ou

« Nous sommes épuisés par la gestion de “groupes” plus conséquents que nos classes de bases, mais qui ne le serait pas ? Nous sommes dans le flou total concernant les rencontres parents professeurs, les conseils de classes et le remplissage des bulletins car sans connaître les élèves, puisque nos groupes changent suivant les besoins, ces tâches semblent difficiles. »

Enfin, la problématique des professeur.es principaux de français ou de mathématiques, qui parfois suivent un·e élève qu’elles ou ils ne voient jamais est fréquemment remontée.

La casse du collectif de travail

« Cela crée aussi des tensions entre les enseignants (diviser pour mieux régner ?) »

Cette réforme, imposée a été la source de nombreuses tensions aussi bien avec les directions qu’entre collègues lors de la préparation de la rentrée puis tout au long de l’année. Les tensions ont été exacerbées quand certain·es chef·fes d’établissement ont tenté de redistribuer les élèves d’un·e professeur·e absent·e dans les autres regroupements. Les équipes de professeur·e ont souvent réussi à peser collectivement pour que cette tentative ne soit pas réitérée.

Des professeur·es témoignent également de ce qu’ils et elles ont perdu dans cette réforme : des dédoublements, des projets… « J’enseigne l’histoire-géo et je ressens une relégation de ma discipline à un rang bien peu important pour mettre en place cette réforme. Je n’ai donc prévu aucun projet pour cette année scolaire, ce qui n’est pas dans mes habitudes. » ou « Sentiment que la politique a pris le pas sur la pédagogie ».

Pas une année de plus : Avec le SNES-FSU, enterrons le « Choc des savoirs » !

Le SNES-FSU a obtenu une première victoire au Conseil d’État et son enquête montre que la mobilisation locale a évité de créer des regroupements homogènes dans la moitié des collèges. Le SNES-FSU pèsera auprès du nouveau ministère pour mettre fin à cette réforme. Si cela ne suffit pas et que de nouveaux textes paraissent alors elle accompagnera la mobilisation des personnels sur le terrain. La lutte reprend pour la rentrée prochaine. Vous trouverez sur notre site, mais aussi auprès de vos sections académiques, des outils régulièrement mis à jour afin d’informer, de convaincre et de résister.

“Choc des savoirs, rentrée 2025 : agissons ensemble contre les groupes de niveau en 6ème et en 5ème

La préparation de rentrée 2025 débute dans les collèges. Alors que le conseil d’État a annulé l’arrêté “collège” instaurant les groupes de niveau, le ministère semble vouloir passer en force pour les maintenir en 6ème et en 5ème.

Le SNES-FSU lance la saison 2 de la mobilisation et vous donne l’ensemble des outils pour informer, mobiliser et agir.


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