Un effectif réduit mais des difficultés plurielles
Comme le montre l’enquête réalisée par le SNES-FSU, lorsqu’il est mis en place, le regroupement des élèves « dits faibles » rassemble souvent des élèves à besoins éducatifs particuliers : grandes difficultés scolaires, situation de handicaps, troubles de l’apprentissage, élèves allophones… Les professeur·es enseignent certes à un groupe réduit (une quinzaine d’élèves en moyenne) mais avec autant de profils et donc d’approches différenciées. Cela tourne vite au casse-tête chronophage.
Stigmatisation des élèves
Le mot d’ordre « nous ne trierons pas nos élèves » a été massivement repris par la communauté éducative. Le fait de soustraire des élèves en difficulté de leurs classes, pendant un tiers du temps d’enseignement, conduit à un sentiment de relégation. Dans les retours de l’enquête du SNES-FSU, des professeur·es signalent les inquiétudes voire les larmes de ces élèves qui sont isolé·es, surtout dans les collèges où les autres demeurent dans leur classe. Cela peut détériorer l’image de soi scolaire de certain·es même si cela génère souvent le développement de stratégies pour préserver l’estime de soi globale, qui viennent entraver les apprentissages : la désidentification vis à vis de l’école (« L’école, ce n’est pas pour moi. »), attribution des difficultés à d’autres causes ou la valorisation auprès des pairs dans des comportements antiscolaires.
Une gestion de classe ardue
L’enquête pointe également la difficulté à de gérer la discipline dans ce type de groupes, parfois destinés à des professeur·es moins expérimenté·es car dernier·es arrivé·es. En effet, y sont souvent rassemblé·es des élèves avec des troubles de l’attention et/ou en conflit avec l’École. À l’inverse, des élèves quasiment mutiques sont invisibilisé·es voire maltraité·es par les autres aux plus « fortes » personnalités. Loin des rares témoignages enthousiastes dans des collèges Potemkine visités par des ministres, la réalité est toute autre avec des groupes sans parité où enseigner est une épreuve. Habituellement, la constitution de classe est un moment où l’on veille à séparer certain·es élèves, qui se retrouvent ensemble du fait du tri scolaire. Les commentaires laissés dans l’enquête indiquent une souffrance des personnels mais aussi des élèves, du fait d’un manque de suivi lié à la multiplicité des professeur·es dans une même discipline. Il devient impossible de mettre en place des fiches de suivi de classe, les échanges avec le reste de l’équipe pédagogique relève de la gageure tant l’effet de groupe influe.
Des regroupements variables dans le temps
Autre sujet épineux : qui entre et qui sort du groupe ? Sur le terrain, des remontées font état d’une forte pression de certaines familles qui demandent des comptes, le plus souvent aux professeur·es principales et principaux ou de mathématiques et de français … .
Comme tout est renvoyé au local, la création et l’évolution des regroupements varient d’un établissement à l’autre. Certain·es personnels de direction se basent sur les résultats des évaluations nationales malgré le consensus des équipes pour dénoncer leur vacuité. Dans d’autres cas, ce sont les moyennes qui sont choisies, sans discussion, pour justifier ces changements.
C’est une difficulté supplémentaire, alors que le conseil de classe perd de son sens (avec certain·es professeur·es qui n’ont que quelques élèves de chaque classe…).
Le mirage des ambitions communes
Enfin, ces regroupements devaient permettre d’arriver au même point mais par différentes méthodes. La réalité, malgré la mise en place de chronophages progressions communes voire « synchrones », est tout autre. Ce type de pratique attaque la liberté pédagogique. Ainsi, dans un article de la presse quotidienne régionale, une rectrice ne semblait pas voir de problème à ce que les élèves du groupe le plus fragile aient des cours de niveau cycle 2. N’est-ce pas la preuve que cette réforme crée une voie de relégation ?
Poursuivre la lutte
En janvier prochain, le SNES-FSU sera toujours au côté des personnels pour obtenir la fin de cette réforme ! Nous avons déjà obtenu une victoire au conseil d’État et l’enquête démontre que la résistance locale a permis de ne pas mettre en place de regroupements homogènes dans la moitié des collèges. La lutte reprend pour la rentrée prochaine. Vous trouverez sur notre site, mais aussi auprès de vos sections académiques, des outils régulièrement mis à jour afin d’informer, de convaincre et de résister.
Dans le contexte politique actuel, tout est en suspens. Le SNES-FSU se souvient d’anciens propos de l’actuel premier ministre sur l’éducation : “rendre ses chances à ceux qui n’en ont pas”.
Chiche : enterrons donc la réforme du “Choc des savoirs” !