En huit semaines, le ministre Gabriel Attal prétend avoir réfléchi à un big bang éducatif en s’appuyant sur la mission Exigences des savoirs. Mais ses mesures ne sont pas le résultat d’une quelconque démarche scientifique. La consultation des personnels, sur laquelle il s’appuie, était ouverte à tout le monde (y compris hors Éducation nationale) et chacun·e pouvait y répondre autant de fois que possible. On a vu plus exigeant en matière de rigueur scientifique…Sur le fond, c’est une avalanche de mesures pour le premier degré, le collège et le lycée, qui donne l’impression de partir dans tous les sens tellement elles brassent large.
Mirages et illusions
Des manuels aux programmes, en passant par le DNB et le bac ou encore l’organisation pédagogique du collège, tout est passé sous les fourches caudines du ministre. Derrière les apparentes mesures de bon sens ou visant à lever des tabous qui n’en sont pas, le projet d’École apparaît dans toute sa brutalité. Gabriel Attal dit « groupes de niveaux», tout un chacun entend qu’il y aura des groupes d’élèves fort·es, moins qu’il y aura des groupes d’élèves faibles assigné·es à leurs résultats et tentant de se construire dans l’échec. Qui pour prendre ces groupes ? Qui pour accepter de mettre ainsi ces enfants dans un tel dispositif de relégation? Le ministre dit «dernier mots aux professeurs » pour le redoublement. Tout le monde entend «décision pleine, entière et non contestée du conseil de classe». Mais vu les moyens nécessaires, ce sera en réalité un passage conditionné au suivi d’un stage de remise à niveau de quelques jours. Illusoire pour surmonter les difficultés. Et les élèves concerné·es, faute de dispositif ambitieux de soutien, viendront s’échouer, dans tous les sens du terme, dans la classe supérieure.
En avoir pour son École
Et il y a tout ce que le ministre ne dit pas. Les classes toujours surchargée faute de moyens supplémentaires pour tous les niveaux, les professeur·es toujours non remplacé·es…Mais dans son discours, Gabriel Attal a aussi parlé économie, en rappelant que son cortège de mesures (groupes de niveaux, etc.) devait permettre de« montrer aux Français qu’ils en avaient pour leur argent». Et revoilà la rhétorique que le ministre employait déjà à Bercy, lui qui avait lancé l’opération «en avoir pour ses impôts». Une opération politique centrée sur une approche de rentabilité et une perspective individuelle. Il s’agit bien de construire une école clientéliste dans laquelle certain·es sont sûr·es de s’en sortir parce qu’ils et elles financent l’École publique. Dans un contexte de grave crise démocratique, Gabriel Attal fait un choix dangereux : dans une société traversée par de profondes crises, cette vision de l’École va contribuer à aggraver les fractures et à nourrir le ressentiment social.
À l’opposé, le SNES-FSU défend la logique des services publics, basés sur la solidarité et la redistribution. Ces mesures vont toujours plus dégrader les conditions de travail, instaurer l’École du tri social sans répondre réellement aux problèmes que les personnels rencontrent sur le terrain… c’est trop. Ne nous laissons pas voler notre métier !
Salaires, effectifs : les sujets tabou du ministre
“Je n’ai aucun tabou” claironne Gabriel Attal. Pourtant, son silence sur les questions qui sont les préoccupations premières des collègues est à la fois assourdissant et révélateur. Sur les salaires, le dossier est “clos” selon le ministre. Circulez, il n’y a rien à voir ! Et pourtant, les promesses présidentielles n’ont pas été tenues et on est loin d’un rattrapage des pertes de ces dernières années. Sur les effectifs, le ministre s’en par une pirouette, promettant des moyens nouveaux pour les groupes de niveaux regroupant les élèves les plus faibles. Mais par quel tour de passe-passe alors que le budget 2024 prévoit 484 suppressions d’emplois en collège et en lycée qui viennent s’ajouter aux 8381 suppressions actées depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron ?
Une chose est certaine, il n’y en aura pas pour tout le monde et les effectifs des classes resteront parmi les plus chargées en Europe. Notons d’ailleurs que dans le cadre du chantier attractivité, dans le groupe de travail consacré aux conditions de travail, le ministère n’évoque aucune piste sur les effectifs, préférant s’engager à….faire son possible pour que certains éléments de rémunération soient versés au plus proche de la date d’éligibilité !
Le plan annoncé par le ministre ne permet pas de sortir des difficultés que les personnels rencontrent au quotidien pour faire réussir tous les élèves. Aux problèmes réels vécus dans les établissements, qu’il n’a fait qu’aggraver, le gouvernement répond par l’idéologie.
Rendez-vous en janvier
L’exigence, la nôtre, est celle-ci : tirer vers le haut notre société sur la voie du progrès social. C’est évidemment à l’opposé de la pseudo exigence d’un ministre de l’Éducation nationale plus occupé à se construire une stature politique que de vraiment répondre aux attentes des personnels en matière de salaires et de conditions de travail…
Ni liste au Père Noël, ni bonnes résolutions pas tenues, la feuille de route du SNES-FSU est connue. Avec la FSU, le SNES s’engage dès maintenant dans la préparation des luttes de janvier pour gagner sur nos conditions de travail, nos salaires et nos pensions : campagnes d’heures d’informations syndicales, stages, actions locales contre des DGH rabougries, grève pour nos salaires et nos métiers…Rendez-vous en janvier pour les luttes et… les victoires !
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