La note de service parue au BO du 18 mars, organisant les enseignements de français et de mathématiques en groupes de niveau au collège, décrit le cauchemar à venir pour tout·es les professeur·es, à commencer par celles et ceux des prétendus “ savoirs fondamentaux ”.

Retour en arrière pédagogique et politique

Ce serait un cauchemar pédagogique, car il faudrait atteindre des attendus affichés comme identiques mais avec des pédagogies rudimentaires et mécanistes pour les un·es et une approche d’ambition et d’excellence pour les autres, confirmant la dualité paradoxale déjà en germe dans la note de service de janvier 2023 “ Une dynamique nouvelle pour les mathématiques ”.
 Le pilotage par les évaluations nationales, voire internationales, définissant des attendus au rabais par rapport aux ambitions des programmes actuels, voire en contradiction avec certains de leurs objectifs, placerait nos collègues face à toujours plus d’injonctions paradoxales. 
Les groupes fluctuants en cours d’année entraveraient toute progression cohérente, toute dynamique de classe, toute stabilité pourtant indispensables à de jeunes adolescents et adolescentes, affectant l’ensemble des enseignements suivis au collège.


Ce serait ensuite un cauchemar politique et un retour en arrière sans précédent, une rupture avec plus de 60 ans d’ambition éducative. En effet, l’institution de groupes de niveaux s’oppose à l’idée même de faire société dans une émulation, une coopération, une entraide, des mises en commun au sein de la classe. Les professeur·es devraient ainsi devenir les agentes et agents actifs du tri social, participant chaque jour à l’injustice d’une relégation des plus faibles élèves scolairement et socialement dans un entre-soi ne pouvant générer qu’humiliation et violence.

Un fort impact sur nos pratiques…


Enfin ce serait un cauchemar professionnel où le plaisir d’enseigner, intrinsèquement lié à celui de concevoir son enseignement, serait annihilé par la multiplication de tâches d’évaluation automatisées conçues par d’autres et par des dispositifs pédagogiques clés en main. Les progressions communes, qui s’imposeraient nécessairement sans aucune possibilité d’y déroger, nuiraient considérablement à l’autonomie professionnelle et à la liberté pédagogique. Le pouvoir renforcé des chef·fes d’établissement dans l’organisation du service introduirait annualisation, co-enseignement imposé, flexibilité managériale, intervention des professeur·es des écoles dans les classes dans les cours de français et mathématiques.

… tout prêt à se déployer !

Ce pilotage, s’appuierait sur les évaluations nationales démultipliées, sur le déploiement offensif de méthodes pédagogiques standardisées présentées comme la réponse systématiquement adaptée à toutes les situations de classe, comme celle dite de “Singapour” ou encore l’enseignement explicite québécois. Dans la droite ligne des orientations déjà présentes dans le Guide du pilotage du plan mathématiques au collège, ou prônées par le Conseil Scientifique de l’Éducation Nationale (CSEN), ce pilotage renforcerait notablement le pouvoir des chef·fes d’établissement en matière de pédagogie et de contrôle des pratiques. Cela ouvrirait la porte au renforcement de leurs pratiques managériales, ruinant les espaces de conception de réponses pédagogiques adaptées à la réalité de chaque classe et à la main des collègues, chacun·e n’étant plus qu’un·e exécutant·e de procédures pédagogiques formatées, donc aisément remplaçable.

Prépa-Seconde : l’illusion de la remédiation

Les IA de type MIA en Seconde auraient la capacité d’occuper les élèves sans intervention d’un·e enseignant·e expert·e de ses contenus disciplinaires et de sa didactique.
La “prépa-Seconde” obligerait les professeur·es exerçant en lycée, déjà écrasé·es par la charge de travail, à maitriser et faire atteindre aux élèves aussi les attendus du Socle commun au cycle 4 et à « enseigner » des compétences méthodologiques en lieu et place de savoirs émancipateurs. En outre, ces objectifs limités, joints à la perspective d’une simple attestation de fin de cycle se substituant à l’objectif pour les élèves de représenter et réussir le DNB, risquent de peu motiver les élèves et de renforcer les abandons du système de formation sous statut scolaire.

Toutes et tous concerné·es !


En fait, ce cauchemar ne menace pas seulement les professeur·es de lettres et de mathématiques. Certaines de ces logiques, notamment le recours aux évaluations et certifications externes, sont déjà à l’œuvre par exemple en langues vivantes. Il préfigure ce que ce gouvernement veut faire de notre métier demain : un métier excessivement flexible et interchangeable, un métier au service d’une politique conservatrice attachée à l’essentialisation des destins sociaux et au renoncement à toute forme d’émancipation hors d’une employabilité volatile, un métier de simples exécutant·es peu regardant sur les contenus disciplinaires et leurs vertus structurantes.

Réveillons-nous, maintenant !

Nous ne voulons pas que ce cauchemar devienne réalité ! Le SNES-FSU participe à réveiller les révoltes chez les collègues, chez les parents, dans l’opinion publique. Non, nous ne trierons pas nos élèves ! Oui, nous travaillerons à la réussite de tous et toutes ! C’est le sens de notre métier, le métier dans lequel nous nous épanouissons, le métier dans lequel nous sommes fier·es de nous engager tous les jours. Face à la violence du choc des savoirs, nous n’allons pas chercher comment nous adapter ; nous y ferons échec !


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