Une promesse mensongère de Pap Ndiaye
“Attentif aux inquiétudes que vous avez pu exprimer, j’ai veillé à garantir les meilleures conditions de passation de ces épreuves et décidé de resserrer, de manière pérenne, les programmes d’examen dont la nouvelle version sera publiée sous huitaine au Bulletin officiel. Ces programmes d’examen ne remettent nullement en cause les programmes d’enseignement eux-mêmes qui seront étudiés jusqu’à la fin de l’année scolaire.” Le ministre faisait une promesse aux enseignant·es dans sa lettre du 22 septembre, cette dernière étant communiquée à tous les élèves de terminale et à leurs parents par leurs établissements. En découvrant le Bulletin Officiel du 30 septembre 2022, les professeur·es d’histoire-géographie ont constaté avec colère que leur programme pour l’examen n’était absolument pas modifié. Pire encore, le texte officiel rappelle la règle de l’alternance des 4 chapitres (sur 6 au total) à traiter obligatoirement pour l’écrit, en fonction des années paires et impaires.
Comme si cette règle était nouvelle ! Qui le ministère espère-t-il tromper avec sa manœuvre ? Certainement pas les élèves, ni leurs enseignant·es, tous et toutes parfaitement au courant que 4 thèmes sont à traiter pour les épreuves écrites. Si ce programme resserré pour l’écrit existe, c’est qu’il a été rendu indispensable par la décision de Jean-Michel Blanquer de placer les épreuves de spécialité en mars, même si cette décision s’est heurtée à la crise COVID lors de la première session du “bac Blanquer” en 2021. Au moment où les programmes avaient été écrits, en 2019, le calendrier du nouveau baccalauréat n’était pas encore fixé !
Le mépris des contenus et des objectifs pédagogiques
Depuis la mise en place du programme d’Histoire-géographie, géopolitique et science politique, la majorité des professeur·es enseignant la spécialité s’accorde à le trouver tout à la fois passionnant, ET exigeant ET… impossible à “boucler” en six mois (de septembre à mars). Certes les élèves choisissent leur enseignement de spécialité, le plus souvent par intérêt pour son contenu. Mais ils et elles font face à la nécessité d’acquérir des connaissances très pointues, pour certaines jamais abordées à aucun autre moment de leur scolarité. Ils et elles doivent aussi se familiariser avec les méthodes des deux exercices de l’écrit : la dissertation (qui n’existe pas dans le tronc commun en histoire-géographie), et l’étude de document. C’est ce temps des apprentissages, ce temps de formation précieux qui est volé aux élèves de terminale avec des épreuves écrites placées au mois de mars. Et pour quelle raison ? Pour permettre l’utilisation des notes des épreuves écrites au service de la machine à filtrer l’accès à l’enseignement supérieur : Parcoursup.
Plutôt que de demander aux correcteurs et correctrices du baccalauréat de faire preuve de bienveillance, pourquoi ne pas en avoir pour les élèves AVANT les épreuves avec un programme faisable qui permette à tous et toutes des respirations et du plaisir ? Donner le choix entre deux sujets de dissertation ne saurait permettre cela. En refusant de considérer le réel vécu par les professeur·es et leurs élèves dans les classes de terminale, le ministre Pap Ndiaye ainsi que l’ensemble de l’administration de l’Éducation nationale continue de s’enfermer dans sa réalité alternative, comme Jean-Michel Blanquer avait coutume de le faire. Résultat de ce coupable entêtement : la décrédibilisation de la parole publique auprès d’une jeunesse à qui l’on fait des promesses sans les tenir. Quant à la crédibilité auprès des personnels, il y a bien longtemps qu’elle s’est évanouie. Qui, parmi eux, pourrait sans rire (jaune) lire Mme Caroline Pascal, cheffe de l’Inspection générale de l’Éducation, du Sport et de la Recherche, se féliciter du “travail de dentelle” de l’IGESR sur ces programmes “resserrés” ?
Face à ce mépris, l’intersyndicale SNES-FSU, SNEP-FSU, SNALC, CGT, SUD, SE-UNSA appelle à signer largement une pétition pour le report des épreuves de spécialité en juin 2023.