Fin juin, dans plusieurs départements, des centaines d’élèves se sont retrouvés sans affectation en lycée professionnel faute de places suffisantes : plus de 600 dans le département d’Ille-et-Vilaine, plus de 1 000 élèves dans le département du Rhône, et ce ne sont pas les seuls touchés.

En Bretagne, la FSU a dénoncé cette situation. Le communiqué de presse a fait la Une du quotidien régional1. Le Rectorat et la Région ont fait valoir un nombre encore important de « places vacantes » au niveau académique. Mais ils ne prennent pas en compte le choix des élèves de 14 ans ni leur mobilité : comment expliquer aux familles que leur enfant doit choisir finalement un lycée maritime parce qu’il reste des places à Paimpol (22) alors qu’au départ ce dernier souhaitait aller dans un Baccalauréat Professionnel « Cuisine » à Rennes (35) ou « Conducteur/trice routier-marchandise » à Guer (56) ?

La mobilité des élèves souhaitant aller vers un lycée professionnel est déjà plus importante que celle des élèves allant en seconde générale et technologique. Celle-ci est souvent discutée en famille, accompagnée par les membres des équipes éducatives tout au long de l’année avec des enjeux financiers et de séparation (internat). C’est toute ce travail de réflexion qui est mis en défaut quand au final, les élèves non pas la place dans la voie de formation choisie. C’est toute une confiance envers les équipes de terrain qui est mise à mal parce qu’en fait, depuis le début de l’année le rectorat et la région savent qu’il n’y aura pas assez de place pour tout le monde en lycée professionnel public.

Difficile de demander à des jeunes de 14 ou 15 ans, majoritairement de milieux populaires, de changer totalement de projet de formation professionnelle en 48h. C’est pourtant ce qui a été demandé aux familles des élèves « sans solution », avec un choix à faire entre le jeudi 29 et le vendredi 30 juin ! Puis en fin août, et à la mi-septembre en postulant sur des places vacantes lors de « Tours AFFELNET ».

Quelle éthique vis-à-vis de ces familles ? Quelle considération pour la jeunesse ?

En Auvergne Rhône Alpes, le SNES-FSU de Lyon a dénoncé une politique d’orientation sous pression qui méconnait le code de l’Éducation, et qui ne laisse aucune place au travail de Psy EN.

Le code de l’Éducation précise dans son article D331-232 que : « l’orientation est le résultat du processus continu d’élaboration et de réalisation du projet personnel de formation [..] que l’élève de collège, [..] mène en fonction de ses aspirations et de ses capacités. [..] », et que « ce projet se situe dans une perspective de développement des potentialités de l’élève ».

Mais, lorsque le seul objectif assigné par l’administration est la gestion des flux pour affecter une cohorte d’élèves, où sont l’élaboration et la réalisation du projet personnel de formation de l’élève ? Que devient le développement de ces dites potentialités ? Qu’en est-il de ses aspirations ?

Et dès lors, quelle place peut occuper le PsyEN, si aucun espace n’est laissé pour conseiller et accompagner l’élève dans l’élaboration de ses projets scolaires et professionnels ?

Depuis des années, la FSU alerte et fait des propositions d’ouvertures de formations sous statut scolaire dans les LP. Ces propositions sont refusées dans de nombreuses régions au motif qu’il faut privilégier l’apprentissage. On en voit le résultat aujourd’hui.

La FSU dénonce ces conditions faites aux élèves, aux familles, ainsi qu’aux équipes éducatives qui les accompagnent.

Surtout, elle exige une autre politique faite de places en nombre suffisant dans les formations en lycée professionnel, afin d’accueillir tous les élèves dans des conditions dignes et une éthique ambitieuse pour chaque élève.

À l’heure où il y a une tendance à faire des enfants des adultes en miniature, il est temps de reconsidérer l’évolution actuelle où les questions d’accès rapide à l’emploi prennent le pas sur les questions de formation et de qualification. En effet, c’est toujours la même volonté d’orienter la dialectique entre rapport aux savoirs et rapport à l’orientation sous une logique d’appariement et d’adéquation formation/emploi. Dans cette politique issue des années 60/70, les résultats scolaires restent le cœur du parcours de chaque élève. Le rôle de tri social du collège entre ceux qui « peuvent » et ceux qui « ne peuvent pas » va être renforcé. La petite musique de la prédiction de l’avenir est de retour avec son champ lexical du déterminisme : ici et là, on propose des journées des « talents », on révèle les « potentiels ».

Ainsi, on arase l’environnement historique, sociologique et psychologique des élèves.

Pour ces enfants/adolescents qui, dès la cinquième ou la troisième, nous expliquent qu’apprendre « c’est trop dur », si la réponse est de leur proposer d’aller vers l’apprentissage professionnel et non plus scolaire, la responsabilité de l’institution est majeure.

L’École ne doit pas être du côté de la prédiction mais au contraire, de ce qui fait a(d)venir en prenant sa part sur toute la complexité et dilemmes que cela engendre.

La FSU sait que ces familles seront accompagnées par les établissements d’origine et les Centres d’Information et d’Orientation qui, s’ils n’ont pas de solution toutes faites à proposer, ne laisseront pas tomber les élèves et leurs familles. Dans ces moments, les CIO sont des lieux ressources où sont écoutées les colères légitimes, les déceptions et où on accompagne et suit un par un, chaque élève afin qu’il y trouve une solution qui lui convienne

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1 https://www.ouest-france.fr/bretagne/ille-et-vilaine/en-ille-et-vilaine-630-collegiens-nont-toujours-pas-trouve-de-place-en-lycee-professionnel-3a39f4a6-1a91-11ee-8c1d-2fa30ad00bee

2 https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000038348655


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