Le CASF pourra mettre en place des dispositifs de contrôle des pratiques professionnelles que le ministère cherche à uniformiser. Une note de service datée du 10 janvier 2023, définit cette « instance stratégique de pilotage pédagogique académique pour l’apprentissage des savoirs fondamentaux ». Signe de l’importance donnée à ce conseil, c’est le recteur ou la rectrice qui devra personnellement le présider. Sa composition reste à la main des recteurs ou rectrices. Des chef·fes d’établissement et des professeur·es devraient y siéger. Aucune place n’est prévue pour les représentant·es élu·es des personnels; se pose donc la question de la légitimité des professeur·es désignés par le recteur. Le CASF sera directement supervisé par la Direction générale de l’enseignement scolaire au ministère.
Chaque CASF devra établir une « feuille de route » sur 5 ans (avec une déclinaison annuelle). Ses missions sont :
→ établir un diagnostic territorial de la maîtrise des savoirs fondamentaux par les élèves,en mettant en place un « outil d’analyse statistique commun » et en s’appuyant sur les évaluations nationales (de nouvelles arrivent en CM1 et 4ème !).
→ déterminer la stratégie académique en matière d’apprentissage des savoirs fondamentaux
→ suivre le déploiement de cette stratégie, en évaluer les résultats et, le cas échéant, en ajuster les modalités.
Le CASF, quels dangers ?
Derrière des objectifs qui semblent très généraux, il s’agit bien d’une attaque organisée contre les disciplines et la liberté pédagogique.
Dans le premier degré, l’accent mis sur les “savoirs fondamentaux” tels que les porte le ministère, c’est-à-dire, « lire, écrire, compter » en privilégiant le décodage, la vitesse de lecture (fluence) ou de calcul et l’automatisation de procédures, a conduit à une vision très étriquée et techniciste des apprentissages en mathématiques et en français et à l’instauration de « normes nationales ». Les préconisations en terme de contenus et de temps passé sur ces apprentissages sont en contradiction avec les programmes.
L’objectif premier des CASF est de mettre en place une « cohérence des méthodes pédagogiques mises en œuvre entre école et début du collège » et de développer « une culture professionnelle partagée pour l’ensemble des équipes pédagogiques ». La perspective d’échanger et de construire de manière collective est un miroir aux alouettes : le risque de désagrégation du métier sous forme d’accumulation de procédures, est, lui bien réel. Les Psy-EN et les professeur·es des écoles résistent déjà au quotidien contre des injonctions technicistes. En dépossédant peu à peu les personnels de leur travail de concepteur, via la « préconisation d’outils, supports et démarches favorables à la réussite des élèves », le CASF risque d’établir une méthode unique à appliquer. Cette démarche de transformation des professeur·es en exécutant·es affecte en premier lieu les enseignements de français et de mathématiques, que le ministère cherche à stéréotyper.
C’est pourtant la diversité des pratiques et des méthodes pédagogiques qui permettent aux élèves d’entrer dans les apprentissages. Le choix des méthodes et des pratiques relève de la liberté pédagogique des professeurs, en fonction du contexte professionnel et des classes dans lesquels ils ou elles exercent
Des certifications, pour contrôler qui ?
Des évaluations et certifications à faire passer aux élèves, souvent sans lien avec nos cours les programmes, s’accumulent : Passeport Educfi, PIX, Ev@lang, ou les évaluations nationales qui vont se généraliser en Quatrième, et bientôt GreenPix, le passeport Educdroit, et une certification de mathématiques en Troisième alors qu’il existe une épreuve terminale au DNB. Cela conduit à déposséder davantage les professeur·es de la maîtrise de leurs évaluations et à dénaturer la valeur certificative du diplôme du DNB, en préparant un portefeuille de compétences pour chaque élève.
Retour de l’inspection dans nos classes
Les CASF se voient doter de la possibilité de « planifier des périodes d’observations en classe » par « des […] inspecteurs d’académie-inspecteurs pédagogiques régionaux (IA-IPR) sur des objets identifiés par le conseil ». Ces périodes d’observations feront « l’objet de bilans communiqués au recteur ou à la rectrice ainsi qu’au conseil ». Le risque est grand que certains inspecteurs viennent dans nos classes pour marteler des prescriptions réductrices et critiquables d’un point de vue pédagogique (par exemple en français et en mathématiques). Cela serait une régression sans précédent bien loin de ce qu’exige la FSU.
Ce que le SNES-FSU revendique :
C’est bien le projet de l’École de Jean-Michel Blanquer et de son Conseil scientifique qui est confortée et accentuée. Le SNES-FSU oppose à cette vision des apprentissages et de l’encadrement des pratiques qui en découle, une culture commune construite sur un réseau de savoirs et de compétences. Elle doit permettre aux jeunes de quitter le système éducatif avec les clés de compréhension du monde, leur permettre émancipation et participation citoyenne, et leur donner les moyens de continuer à se former.
Le SNES-FSU rappelle son attachement à la liberté pédagogique des personnels aussi bien pour concevoir l’organisation et le déroulement des cours que pour l’évaluation des élèves. Il est particulièrement vigilant et inquiet sur les mesures annoncées depuis la rentrée de janvier (parfois par voie de presse). Face à un projet présidentiel qui ne règle en rien le problème de la difficulté scolaire et des inégalités, face à des mesures qui ne portent aucune attention aux conditions de travail des personnels, les syndicats enseignants de la FSU (SNUipp-SNES-SNEP-SNUEP) affirment une toute autre ambition pour l’École : baisse des effectifs, traitement des difficultés scolaires au sein de la classe notamment grâce à des moyens fléchés (enseignants supplémentaires, RASED …), autant de mesures nécessaires pour améliorer l’inclusion. C’est un véritable plan d’urgence qu’il faut pour l’école !
Afin de réfléchir à un nouveau collège à la hauteur des enjeux actuels et permettant véritablement la réussite et l’émancipation de toutes et tous, le SNES-FSU organise un colloque auquel tou·tes les syndiqué·es peuvent participer :
Participer au colloque Collège