C’est le CA, et non le ou la chef·fe d’établissement, qui « fixe les principes de mise en œuvre de l’autonomie pédagogique et éducative dont disposent les établissements […]» (décret de 1985 fixant le fonctionnement des EPLE : article R421-20 du Code de l’éducation). À ce titre, c’est en CA, par un vote des membres de celui-ci, qu’on détermine: « l’organisation de l’établissement en classes et en groupes d’élèves »,« les modalités de répartition des élèves », « l’organisation du temps scolaire » et « l’emploi des dotations en heures d’enseignement » (article R421-2 du Code de l’éducation).
Ces articles, d’un décret codifié, prévalent sur la note de service du 15 mars 2024, qui prétend que « le chef d’établissement arrête l’organisation des enseignements de français et de mathématiques ». L’application des compétences décisionnelles attribuées aux CA par ces articles peut se faire sans contrevenir à l’arrêté du 15 mars 2024 dans ses dispositions sur les groupes de besoin (article 4 de l’arrêté).
Ainsi, un CA peut décider, par un vote, du principe de l’obligation de groupes et classes hétérogènes (s’appuyer aussi sur l’article D332-5 du code de l’éducation).
Ce principe peut être adopté à tout moment avant la rentrée scolaire, donc de préférence avant la fin juin 2024 ou début juillet. Une fois voté, ce principe s’impose au chef ou à la cheffe d’établissement, qui devra les mettre en œuvre dans la répartition des élèves et l’organisation de l’établissement. Dans le cas contraire, elle ou il devrait assumer, comme sa hiérarchie, de se mettre hors la loi, ce qui est inacceptable de la part de u représentants de l’État.
Que la dotation en heures (DHG) ait été déjà répartie ou pas, adoptée ou rejetée par le CA, les décisions adoptées par un CA avant la rentrée de septembre 2024 s’imposent au chef ou à la cheffe d’établissement dans l’organisation des enseignements dès la rentrée 2024.
Avant le CA
– Organiser une heure d’information syndicale pour établir une stratégie d’action en CA en travaillant à associer les autres catégories d’élu·es en CA (ATTEE, représentant·es de la commune et de la CT…).
– Prendre contact avec les représentant·es des usager·es élu·es au CA pour les associer et s’assurer de leur accord afin d’obtenir la majorité des voix.
– Si un CA est prévu par le ou la chef·fe d’établissement sur la mise en œuvre de la réforme et des groupes de « besoin », alors les membres du CA demanderont un vote pour fixer les principes de mise en œuvre de ces groupes au titre des articles R421-20 et R421-2 du code de l’éducation. Le sujet des groupes de besoin ou de l’organisation des enseignements de français et de mathématiques étant à l’ordre du jour initial, le vote est de droit et aucune information préalable n’est légalement requise. En cas de blocage bien indiquer que le ou la représentant·e de l’État se met hors la loi et que tout cela devra être consigné sur le procès verbal du CA. Prendre immédiatement contact avec la section départementale et/ou académique du SNES-FSU. Dans ce cas, un CA extraordinaire est possible (voir infra).
– Si l’organisation des groupes de niveau n’est pas présentée en CA au mois de juin, un CA peut être réuni en séance extraordinaire, sur un ordre du jour déterminé par les requérant·es, à la demande de la moitié au moins de ses membres (article R421-25 du code de l’éducation). Il est donc important d’informer les représentant·es des usager·es (parents et élèves). Écrire un courrier à la cheffe ou au chef d’établissement notifiant l’ordre du jour (annexe 1). La cheffe ou le chef d’établissement devra réunir obligatoirement ce CA en portant à l’ordre du jour la fixation des principes de la mise en œuvre de l’autonomie de l’établissement.
– Par ailleurs, si le CA n’a toujours pas été réuni pour répartir la DHG ou si la dotation a changé depuis février-mars, il faut se saisir du CA qui doit être réuni pour faire adopter les principes précédents. En cas de blocage, en parallèle, faire un demande de CA extraordinaire (voir supra). Là où cela est possible, on peut aussi présenter une contre-proposition à la répartition de la DHG. En effet, après 2 rejets de sa proposition, la ou le chef·fe d’établissement arrête seul l’emploi de la DHG d’où parfois l’intérêt de voter un TRMD alternatif (mais pas dans un vœu) , notamment si le volume de la DHG est identique à l’année précédente ce qui permet de reprendre le TRMD 23/24 sans les groupes de niveau (cf le tableur en ligne modélisant les horaires d’un collège fonctionnant à la rentrée 2023 – attention : le soutien/approfondissement n’existe plus et les classes de 6e fonctionnent avec 25 heures).
Pendant le CA
– Argumenter contre les groupes de niveau du « Choc des savoirs » en expliquant que le besoin des élèves est de travailler dans la continuité de l’année avec leur professeur·e dans chaque discipline et dans leur classe de référence. Avancer les risques connus de stigmatisation, voire de harcèlement, de creusement des inégalités scolaires et sociales, et la place des élèves en situation de handicap qui ont besoin de groupes hétérogènes dans le cadre de l’école inclusive.
– Expliquer en quoi la réforme du « Choc des savoirs » implique une taylorisation du métier de professeur·e, bridant toute liberté pédagogique et appauvrissant donc l’enseignement (cf. vadémécum du ministère).
– Ne pas hésiter à interroger les élèves élu·es au CA sur ce qu’ils et elles pensent du travail en classe hétérogène.
– Veiller à ce que soient mis au vote les principes choisis et, le cas échéant,le TRMD alternatif. Rappeler que ce vote doit être notifié au PV et donner lieu à un acte administratif formel de la part du chef ou de la cheffe d’établissement. Le vote à bulletin secret est de droit (article R421-24 du code de l’éducation).
Après le CA
– Informer dans tous les cas la section départementale et la section académique du SNES-FSU pour qu’elles relayent les décisions du CA dans les instances départementales et académiques.
– Présenter un bref compte-rendu syndical du CA aux collègues.
Annexe 1
Courrier demandant que soit tenu un CA extraordinaire (à adapter à la situation)
Les membres du CA du collège XXX
À XXXX, le XXXX
M. ou Mme XXXX, principal·e du collège XXXX
Monsieur le Principal / Madame la Principale,
En vertu de l’article R421-25 du code de l’éducation, nous demandons la convocation d’un CA extraordinaire pour fixer « les principes de mise en œuvre de l’autonomie pédagogique et éducative » dont dispose l’établissement (article R421-20 du Code de l’éducation) ; principes définis à l’article R421-2 du même code, notamment « l’organisation de l’établissement en classes et en groupes d’élèves », « les modalités de répartition des élèves », « l’organisation du temps scolaire » ( article R421-2 du Code de l’éducation).
Nous vous sommes donc reconnaissant·es de réunir le Conseil d’administration de l’EPLE avec comme ordre du jour : « Fixation par le CA des principes de mise en œuvre de l’autonomie pédagogique et éducative concernant l’organisation de l’établissement en classes et en groupes d’élèves, les modalités de répartition des élèves, l’organisation du temps scolaire. »
Vous assurant notre plus grand attachement au service public d’éducation,
Les membres du CA
Signatures d’au moins la moitié des membres
Annexe 2
Exemple délibération à mettre au vote du CA
Le Conseil d’administration décide qu’à partir de la rentrée 2024-2025, les groupes classes, les groupes en français et mathématiques, au sein du collège …………………………., devront respecter ces principes :
- la constitution des groupes en français et en mathématiques répond aux besoins identifiés par les professeur·es de ces disciplines, conformément à l’arrêté du 15 mars 2024.
- il faut obligatoirement une hétérogénéité de niveaux et de besoins des élèves dans chaque groupe et classe.
- quand cela est techniquement possible, les effectifs de classe dans l’établissement doivent comporter un nombre d’élèves proche.
- au vu des principes fixés ci-dessus régissant la composition des groupes, l’alternance groupes / classes de référence, facultative selon l’article 4 de l’arrêté du 15 mars, n’est pas pertinente dans l’établissement.
Annexe 3
Textes concernés par la mise en place des groupes au collège
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000049286467 https://www.education.gouv.fr/bo/2024/Special2/MENE2407076N
L’ Arrêté du 15 mars 2024 modifiant l’arrêté du 19 mai 2015 relatif à l’organisation des enseignements dans les classes de collège et organisant les groupes de niveau cite les articles de loi (L) et les parties réglementaires (R) du Code de l’éducation dans lequel il s’applique : L’Arrêté du 7 avril 2023 avait déjà modifié l’arrêté du 19 mai 2015 en ajoutant à l’article 3 : « Le chef d’établissement fixe l’organisation et le volume horaire de ce dispositif qui s’applique à tous les élèves. »
L’organisation et le contenu des formations sont définis respectivement par des décrets et des arrêtés du ministre chargé de l’éducation. Des décrets précisent les principes de l’autonomie dont disposent les écoles, les collèges et les lycées dans le domaine pédagogique.
Dans la continuité de l’école primaire et dans le cadre de l’acquisition progressive du socle commun de connaissances, de compétences et de culture, tous les enfants reçoivent dans les collèges une formation secondaire accordée à la société de leur temps. Elle repose sur un équilibre des disciplines intellectuelles, artistiques, manuelles, physiques et sportives et permet de révéler les aptitudes et les goûts. Elle constitue le support de formations générales ou professionnelles ultérieures, que celles-ci suivent immédiatement ou qu’elles soient données dans le cadre de l’éducation permanente.
Les collèges dispensent un enseignement commun, réparti sur quatre niveaux successifs. A chacun d’entre eux, des enseignements complémentaires peuvent être proposés afin de favoriser l’acquisition du socle commun de connaissances, de compétences et de culture et de faciliter l’élaboration du projet d’orientation mentionné à l’article L. 331-7. Au cours de la dernière année de scolarité au collège, ceux-ci peuvent préparer les élèves à une formation professionnelle et, dans ce cas, comporter éventuellement des stages contrôlés par l’Etat et accomplis auprès de professionnels agréés.
Les articles L332-3-1 et -2 concernent les périodes d’observation en milieu professionnel.
Dans les collèges, des aménagements particuliers et des actions de soutien sont prévus au profit des élèves qui éprouvent des difficultés. Lorsque celles-ci sont graves et permanentes, les élèves reçoivent un enseignement adapté. Par ailleurs, des activités d’approfondissement dans les disciplines de l’enseignement commun des collèges sont offertes aux élèves qui peuvent en tirer bénéfice. Des aménagements appropriés sont prévus au profit des élèves à haut potentiel ou manifestant des aptitudes particulières, afin de leur permettre de développer pleinement leurs potentialités. La scolarité peut être accélérée en fonction du rythme d’apprentissage de l’élève.
Des aménagements appropriés et des actions de soutien sont prévus au profit des élèves manifestant des aptitudes sportives particulières, en vue de la pratique sportive d’excellence et d’accession au haut niveau. La scolarité peut être adaptée en fonction du rythme d’apprentissage de l’élève et de ses évènements sportifs. Des actions particulières sont prévues pour l’accueil et la scolarisation des élèves non francophones nouvellement arrivés en France. Pour l’application des dispositions du présent article, des établissements scolaires peuvent se regrouper pour proposer des structures d’accueil adaptées.
La formation dispensée à tous les élèves des collèges comprend obligatoirement une initiation économique et sociale et une initiation technologique ainsi qu’une éducation aux médias et à l’information qui comprend une formation à l’analyse critique de l’information disponible.
I.-Les enseignements obligatoires dispensés au collège se répartissent en enseignements communs à tous les élèves et en enseignements complémentaires définis par l’article L. 332-3.
Les programmes des enseignements communs, le volume horaire des enseignements communs et complémentaires, ainsi que les conditions dans lesquelles ce dernier peut être modulé par les établissements, sont fixés par arrêté du ministre chargé de l’éducation. Cet arrêté fixe également le cadre des enseignements complémentaires dont le contenu est défini par chaque établissement.
Cet arrêté peut prévoir d’autres enseignements pour les élèves volontaires.
II.-Conformément à l’article R. 421-41-3, le conseil pédagogique est consulté sur la préparation de l’organisation des enseignements. En application du 2° de l’article R. 421-2, l’organisation des enseignements est fixée par le conseil d’administration, après avis du conseil pédagogique et conformément au projet d’établissement.
III.-Pour la mise en œuvre du premier alinéa du II dans les établissements d’enseignement privés sous contrat, l’organisation des enseignements est fixée par le chef d’établissement en concertation avec les professeurs. Ces derniers sont informés par le chef d’établissement des suites de cette consultation.
Le collège offre, conformément au principe d’inclusion prévu à l’article L. 111-1 et sans constituer de filières, un enseignement et une organisation pédagogique appropriés à la diversité des élèves, afin de leur permettre d’acquérir, au niveau de maîtrise le plus élevé possible, les connaissances et les compétences du socle commun de connaissances, de compétences et de culture mentionné à l’article L. 122-1-1.
L’enseignement repose sur des pratiques pédagogiques diversifiées et différenciées qui visent à permettre à tous les élèves de progresser dans leurs apprentissages et qui intègrent les aides appropriées aux difficultés rencontrées. Ces pratiques sont régulièrement ajustées pour tenir compte de l’évolution des besoins de chaque élève.
L’arrêté du 15 mars 2024 rappelle aussi dans son préambule qu’il s’applique dans le cadre des articles R. 421-1 à R. 421-53 du code de l’éducation, cités aussi dans les articles ci-dessus.
Deux articles réglementaires (R) précisent l’autonomie de l’établissement et les compétences du Conseil d’administration (CA) en l’occurrence ici celui du collège:
Article R421-2
Les collèges, les lycées, les écoles régionales du premier degré et les établissements régionaux d’enseignement adapté disposent, en matière pédagogique et éducative, d’une autonomie qui porte sur :
1. L’organisation de l’établissement en classes et en groupes d’élèves ainsi que les modalités de répartition des élèves.
2. L’emploi des dotations en heures d’enseignement et, dans les lycées, d’accompagnement personnalisé mises à la disposition de l’établissement dans le respect des obligations résultant des horaires réglementaires.
3. L’organisation du temps scolaire et les modalités de la vie scolaire
Article R421-20
En qualité d’organe délibérant de l’établissement, le conseil d’administration, sur le rapport du chef d’établissement, exerce notamment les attributions suivantes :
1. Il fixe les principes de mise en œuvre de l’autonomie pédagogique et éducative dont disposent les établissements dans les domaines définis à l’article R. 421-2 et, en particulier, les règles d’organisation de l’établissement.
2. Il adopte le projet d’établissement et approuve le contrat d’objectifs qui, lorsque la collectivité territoriale de rattachement n’a pas souhaité y être partie, doit avoir été communiqué à cette collectivité au moins un mois avant la réunion du conseil.
3. Il délibère chaque année sur le rapport relatif au fonctionnement pédagogique de l’établissement et à ses conditions matérielles de fonctionnement. Ce rapport rend compte notamment de la mise en œuvre du projet d’établissement, des expérimentations menées par l’établissement et du contrat d’objectifs. Il comporte également une partie relative à la vie scolaire qui présente un bilan des décisions rendues en matière disciplinaire, élaboré notamment à partir du registre des sanctions de l’établissement, et des suites données par le chef d’établissement aux demandes écrites de saisine du conseil de discipline émanant d’un membre de la communauté éducative.
5. Il adopte le règlement intérieur de l’établissement.
L’article 2 de l’arrêté prévoit que « Des heures de soutien supplémentaires consacrées à la maîtrise des savoirs fondamentaux peuvent être proposées aux élèves dont les besoins ont été identifiés conformément aux dispositions des articles D. 311-12 être proposées aux élèves dont les besoins ont été identifiés conformément aux dispositions des articles D. 311-12 et D. 332-6 du code de l’éducation, dans la limite de deux heures hebdomadaires.»
L’article 4.1 de l’arrêté est ajouté et met en place les groupes en Mathématiques et en Français : « Art. 4-1. – Les enseignements communs de français et de mathématiques, sur tout l’horaire, sont organisés en groupes pour l’ensemble des classes et des niveaux du collège. Les groupes sont constitués en fonction des besoins des élèves identifiés par les professeurs. Les groupes des élèves les plus en difficulté bénéficient d’effectifs réduits.Par dérogation, et afin de garantir la cohérence des progressions pédagogiques des différents groupes, les élèves peuvent être, pour une ou plusieurs périodes, une à dix semaines dans l’année, regroupés conformément à leur classe de référence pour ces enseignements. La composition des groupes est réexaminée au cours de l’année scolaire, notamment à l’occasion des regroupements, afin de tenir compte de la progression et des besoins des élèves.»