
« Historique » de la réforme
Globalement, le projet de nouveau CAPES de physique-chimie est tout-à-fait dans la continuité de la politique éducative des différents gouvernements successifs d’Emmanuel Macron depuis 2017, du « Grenelle de l’Éducation » au « Choc des savoirs ».
Il faut noter qu’un « projet » de maquette avait « fuité » en avril 2024 en même temps que celles d’autres CAPES, suscitant l’opposition du SNES-FSU mais aussi d’organisation d’association de professeurs – y compris l’UDPPC (Union des professeurs de physique-chimie). Cela avait permis d’obtenir la suspension de la réforme … La Conférence des associations des professeur·e·s spécialistes reste opposée en 2025 au projet de réforme du recrutement et a publié un communiqué à ce sujet.
A vrai dire il y a quelques différences entre le projet et la maquette publiée, mais l’architecture globale reste la même.
- première épreuve d’admissibilité : poids de la partie sur la discipline majeure augmenté (14 points au lieu de 12) et celui de la partie sur la discipline mineure diminué (de 8 à 6).
- première épreuve d’admission : 2 h de préparation au lieu de 3 et 20 minutes d’exposé au lieu de 30 (le reste est inchangé [échange de 30 minutes]. Durée totale 2 h 50 au lieu de 4 h dans le projet.
- seconde épreuve d’admission : précision sur la mise en situation qui doit se faire en deux temps : le premier « porte sur l’appréhension des valeurs de la République, dont la laïcité, afin de vérifier la capacité du candidat à les transmettre et les incarner. Le deuxième temps porte sur l’aptitude du candidat à :
- Se projeter dans le métier de professeur ;
- Transmettre et incarner les exigences du service public (droits et obligations du fonctionnaire dont la neutralité, lutte contre les discriminations et stéréotypes, promotion de l’égalité, notamment entre les filles et les garçons) (NDR : reformulé par rapport à avril 24) ;
- Comprendre les grands enjeux liés à la transition écologique ;
- Appréhender l’épanouissement de l’élève dans toutes ses dimensions. »
Les « valeurs de la République » et de la laïcité sont encore davantage mises en exergue.
Nouveauté : disciplines majeure et mineure
Le nouveau CAPES de physique-chimie réserve un certain nombre de surprises, à commencer par le choix, au moment de l’inscription, de la discipline – physique ou chimie – qui fera l’objet de l’évaluation la plus approfondie. Cette discipline est qualifiée de majeure, l’autre étant qualifiée de mineure.
Ce parti-pris interroge. La physique-chimie est un enseignement bi-disciplinaire qui impose que le niveau des professeur·e·s soit élevé en physique et en chimie. Un niveau d’évaluation différencié de chacune de ces deux disciplines au concours ne va pas dans ce sens. La maîtrise des savoirs disciplinaires est le gage d’une autonomie professionnelle qui risquerait d’être fragilisée si l’une des disciplines devenait « mineure ». Le nouveau CAPES pourrait-il aboutir à terme à remettre en cause le droit pour un·e professeur·e certifié·e de physique-chimie d’être affecté·e en lycée aussi bien qu’en collège ? Enfin, si ce choix de « mineure/majeure » devait aboutir, y aura-t-il une clé de répartition pour définir un nombre de lauréats par majeure ? Rien n’est précisé à ce stade.
Le document publié indique que « le programme des épreuves d’admissibilité et de la première épreuve d’admission fait l’objet d’une publication sur le site internet du ministère chargé de l’éducation nationale. »
Le projet de 2024 précisait que le « Programme commun à tous les candidats » serait celui des enseignements de physique-chimie de Seconde générale et technologique, de spécialité de la voie générale (Première et Terminale) ainsi que de l’enseignement scientifique du cycle terminal de la voie générale (Première et Terminale). Nulle mention des séries technologiques (STL, ST2S ou STI2D). Il listait aussi les notions censées être maîtrisées par les candidats, en plus du programme commun et selon le choix de la majeure ou mineure. Le niveau de maîtrise attendu pour la majeure serait celui d’une licence de physique ou de chimie. Il faudra observer si des changements auront été décidés ou non.
La formation en M1 et M2 des lauréat·e·s du CAPES sera-t-elle différenciée selon le choix de la majeure ? Leur permettra-t-elle d’atteindre le niveau de maîtrise disciplinaire que l’on attend d’un·e enseignant·e de physique-chimie appelé·e à exercer son métier en collège ou en lycée ?
Pour le reste, il peut être utile de comparer la maquette actuelle avec celle du futur CAPES.
Comparaison CAPES actuel/CAPES réformé
ADMISSIBILITÉ | |
Maquette actuelle | Projet de réforme |
Épreuve disciplinaire Durée : 5 heures – Coefficient 2 L’épreuve vise à évaluer les compétences disciplinaires et la capacité à mettre en œuvre une démarche scientifique accordant une part à l’activité de modélisation. L’épreuve comporte deux parties d’égale importance, l’une à dominante physique, l’autre à dominante chimie. Les candidats rendent deux copies séparées pour chacune des deux parties de l’épreuve. L’épreuve est notée sur 20. Une note globale égale ou inférieure à 5 est éliminatoire. | 1ère épreuve Durée : 4 heures – Coefficient 3 L’épreuve consiste en plusieurs exercices. Elle vise à évaluer les connaissances et compétences disciplinaires en physique et en chimie, notamment la capacité à mettre en œuvre une démarche scientifique. Elle est constituée de deux parties : une première partie portant sur la discipline majeure ;une deuxième partie portant sur la discipline mineure. L’épreuve est notée sur 20. La première partie compte pour 14 points, la seconde pour 6 points. Une note globale égale ou inférieure à 5 ou une note de zéro à l’une des deux parties sont éliminatoires. |
Épreuve disciplinaire appliquée Durée : 5 heures – Coefficient 2 L’épreuve s’appuie sur un corpus varié de documents (extraits d’ouvrage, d’article, productions d’élèves, etc.). Elle vise à évaluer les capacités d’analyse critique de documents puis l’aptitude des candidats à mobiliser des savoirs disciplinaires et didactiques dans le cadre de la construction d’une séquence d’enseignement au niveau du collège ou du lycée, pouvant revêtir un caractère expérimental. L’épreuve porte sur les deux parties (physique et chimie) du champ disciplinaire du concours. L’épreuve est notée sur 20. Une note globale égale ou inférieure à 5 est éliminatoire. | Seconde épreuve d’admissibilité Durée : 3 heures – Coefficient 2 L’épreuve consiste à répondre d’une façon argumentée à un questionnement construit autour d’une problématique précisée dans le sujet, en s’appuyant sur un corpus de documents. Elle vise à évaluer l’aptitude du candidat à mobiliser des savoirs disciplinaires en exploitant des documents de natures diverses (résultats expérimentaux, graphiques, textes issus de la littérature scientifique ou de vulgarisation, pouvant relever de la culture scientifique ou de l’histoire des sciences). L’épreuve est notée sur 20. Une note globale égale ou inférieure à 5 est éliminatoire. |
Bilan pour les épreuves d’admissibilité : la durée des épreuves baisse alors que le coefficient de l’épreuve disciplinaire augmente pour afficher le souci d’une maîtrise disciplinaire accrue.
ADMISSION | |
Maquette actuelle | Projet de réforme |
Épreuve de leçon Durée de la préparation : 3 heures Durée totale de l’épreuve : 70 minutes (présentation : 30 minutes maximum, entretien : 20 minutes maximum, traitement d’une question courte et échange avec le jury sur la question : 20 minutes maximum) Coefficient 5 L’épreuve est notée sur 20. La note 0 est éliminatoire. L’épreuve a pour objet la conception et l’animation d’une séance d’enseignement. Elle permet d’apprécier la maîtrise disciplinaire, la maîtrise de compétences pédagogiques et de compétences pratiques. Le candidat élabore et présente une séance pédagogique à caractère expérimental à dominante physique ou chimie sur un sujet proposé par le jury. Il met en œuvre des expériences de manière authentique, dans le respect des conditions de sécurité, et en effectue une exploitation pédagogique pour les classes de collège ou de lycée. Une au moins de ces expériences doit être quantitative et une au moins doit mobiliser l’outil numérique pour l’acquisition ou le traitement de données. L’entretien avec le jury qui suit la présentation du candidat permet à celui-ci de justifier ses choix scientifiques, didactiques et pédagogiques. L’épreuve s’achève par le traitement sans préparation d’une courte question à enjeux didactiques ou pédagogiques (analyse d’un protocole expérimental, d’un exercice, d’une production d’élèves, etc.) proposée par le jury dans la partie du champ disciplinaire (physique ou chimie) n’ayant pas fait l’objet du sujet de la leçon, suivi d’un échange avec le jury sur cette question. | Première épreuve d’admission Durée de la préparation : 2 heures. Durée de l’épreuve : 50 minutes (exposé : 20 minutes, échange : 30 minutes). Coefficient 5. L’épreuve consiste en un exposé suivi d’un échange avec le jury. L’exposé permet de réaliser une présentation orale des résultats expérimentaux obtenus en préparation. Le travail réalisé en préparation s’appuie sur un énoncé qui définit une problématique relevant de la discipline majeure, et qui précise les protocoles expérimentaux à mettre en œuvre. Pendant son exposé, le candidat présente la démarche suivie et précise l’exploitation des résultats expérimentaux qu’il a obtenus en préparation. Le candidat est interrogé sur ses résultats et sur des notions connexes ; il peut être amené à reproduire un ou plusieurs gestes expérimentaux. L’épreuve vise à apprécier les capacités expérimentales du candidat. Elle évalue également la capacité du candidat à faire un exposé clair et argumenté, à communiquer et à interagir avec le jury. L’épreuve est notée sur 20. La note globale de 0 est éliminatoire. |
Épreuve d’entretien Durée de l’épreuve : 35 minutes Coefficient : 3 L’épreuve est notée sur 20. La note 0 est éliminatoire. L’épreuve d’entretien avec le jury porte sur la motivation du candidat et son aptitude à se projeter dans le métier de professeur au sein du service public de l’éducation. L’entretien comporte une première partie d’une durée de quinze minutes débutant par une présentation, d’une durée de cinq minutes maximum, par le candidat des éléments de son parcours et des expériences qui l’ont conduit à se présenter au concours en valorisant notamment ses travaux de recherche, les enseignements suivis, les stages, l’engagement associatif ou les périodes de formation à l’étranger. Cette présentation donne lieu à un échange avec le jury. La deuxième partie de l’épreuve, d’une durée de vingt minutes, doit permettre au jury, au travers de deux mises en situation professionnelle, l’une d’enseignement, la seconde en lien avec la vie scolaire, d’apprécier l’aptitude du candidat à : s’approprier les valeurs de la République, dont la laïcité, et les exigences du service public (droits et obligations du fonctionnaire dont la neutralité, lutte contre les discriminations et stéréotypes, promotion de l’égalité, notamment entre les filles et les garçons, etc.) ;faire connaître et faire partager ces valeurs et exigences. | Seconde épreuve d’admission Durée totale de l’épreuve : 35 minutes Coefficient 3 La seconde épreuve d’admission consiste en un entretien avec le jury. Elle comporte un premier temps d’échange d’une durée de quinze minutes débutant par une présentation, d’une durée de cinq minutes, par le candidat de sa motivation et des éléments de son parcours et des expériences qui l’ont conduit à se présenter au concours en valorisant notamment les enseignements suivis, les stages, l’engagement associatif ou les périodes de formation à l’étranger. Cette présentation donne lieu à un échange avec le jury pendant dix minutes. L’épreuve se poursuit, pendant vingt minutes, par un entretien avec le jury. L’échange suivant la présentation du candidat et l’entretien en tant que tel s’organisent, au travers de questionnements divers (dont une mise en situation), en deux temps, l’un porte sur l’appréhension des valeurs de la République, dont la laïcité, afin de vérifier la capacité du candidat à les transmettre et les incarner. L’autre porte sur l’aptitude du candidat à : Se projeter dans le métier de professeur ;Transmettre et incarner les exigences du service public (droits et obligations du fonctionnaire dont la neutralité, lutte contre les discriminations et stéréotypes, promotion de l’égalité, notamment entre les filles et les garçons) ;Comprendre les grands enjeux liés à la transition écologique ;Appréhender l’épanouissement de l’élève dans toutes ses dimensions. Elle est notée sur 20. La note 0 est éliminatoire. |
Bilan pour les épreuves d’admission :
Le projet de « première épreuve » va dans le sens de l’enseignant exécutant plutôt que concepteur de son métier.
Quant à la « seconde épreuve », il n’y a guère de changement, à part la mention de la transition écologique (s’agira-t-il de vérifier que le candidat s’inscrit bien dans le « greenwashing » ministériel ?) et de ce qui fait référence aux « soft skills » et aux compétences psychosociales (voir ici et là).
Globalement, le projet de nouveau CAPES de physique-chimie porte en germe de nombreux problèmes et ne contribuera sans doute pas à résoudre la crise d’attractivité du métier d’enseignant·e. D’autres solutions existent, imposons-les ensemble, avec le SNES-FSU !
CAPES de PC “rénové” à BAC+3 : https://www.devenirenseignant.gouv.fr/les-epreuves-du-capes-externe-bac3-section-physique-chimie-1463
CAPES externe de PC actuel à BAC+5 : https://www.devenirenseignant.gouv.fr/les-epreuves-du-capes-externe-et-du-cafep-capes-section-physique-chimie-550
Programme de la session 2025 https://www.devenirenseignant.gouv.fr/les-programmes-des-concours-d-enseignants-du-second-degre-de-la-session-2025-1374