SNES-FSU assemblée nationale

La note de service publiée au B.O. n°26 du 29 juin 2023 a institué une « labellisation classes engagées et lycées engagées » qui s’ajoute à de nombreux labels déjà existants dans la thématique de l’engagement au sens large. L’appel à projet a été renouvelé pour 2024-2025 par une note de service parue au BO n°17 du 25 avril 2024. Les textes réglementaires de 2023 et de 2024 font le lien entre la labellisation, les contenus de l’enseignement moral et civique (programme d’EMC entièrement renouvelé, voir plus loin) et l’organisation du SNU. Sur la page Eduscol dédiée dès les premières lignes un encadré renvoie vers le site du SNU.

Les thématiques retenues pour le label (« défense et mémoire, sport et Jeux olympiques et paralympiques, environnement, résilience et prévention des risques. ») sont extrêmement larges pour coller à l’actualité et permettre à des projets déjà portés dans les lycées de s’y inscrire. C’est un nouveau « levier de pilotage » offert aux personnels de direction.

Mais il s’agit surtout de mieux vendre le séjour SNU inclus dans le package. Il faudra en effet que les élèves participent à un « séjour de cohésion » du SNU qui pourra être organisé sur le temps de cours « L’intégration du séjour de cohésion du service national universel (SNU) sera une des constituantes et un pilier du projet pédagogique de la classe engagée.» Sur les deux semaines de ce séjour, seuls trois jours seront réservés au projet pédagogique, mais seul le professeur référent “engagement” a le droit d’être présent alors. Par ailleurs, les groupes d’élèves qui ont participé au dispositif en 2023-2024 ont été beaucoup plus souvent issus de classes différentes que de la même seconde : il suffit de 15 élèves recrutés par le même établissement pour se targuer d’avoir une « classe engagée »…

Les académies gardent la main sur l’organisation, et sur la programmation dans les centres de SNU. Mais il existe un programme-type national (voir page Eduscol mentionnée plus haut), qui s’articule entre des jours consacrés au « socle commun » du SNU, et des modules liées à la “coloration” choisie par l’équipe pédagogique du lycée.

Contraindre à l’engagement « volontaire »

Les classes engagées coexistent avec l’engagement individuel dans le SNU. Pour ce dernier, les séjours de cohésion ont lieu pendant les vacances scolaires. Mais pour forcer le volontariat individuel, le séjour de cohésion et la mission d’intérêt général dans le cadre du SNU ont été prévus comme dérogations possibles à la « séquence obligatoire d’observation en milieu professionnel » de juin en Seconde. Un autre moyen employé par certains établissements est de coupler le dispositif “classe engagée” avec celui de la classe “Prépa-Seconde” (lire notre analyse).

Par ailleurs, comment s’assurer du volontariat des élèves pour les séjours SNU dans le cadre des projets de « classes engagées » ? Pour le MEN, il faudrait “amorcer la pompe au collège » en assurant le recrutement. La participation au dispositif pourrait constituer un élément dans le choix du lycée à l’issue du collège. L’objectif serait d’avoir 100% d’accords au collège sur le label engagement et le SNU avant d’entrer au lycée. Il ne peut exister d’obstacle financier puisque, contrairement à un voyage scolaire tout aussi facultatif, le séjour SNU est entièrement pris en charge par l’État.

Le Ministère est cependant en difficulté quant au statut des élèves étrangers. Le SNU et son séjour de cohésion à candidature individuelle leur sont en effet interdits, car réservés aux jeunes de nationalité française1. Comment pourraient-ils alors y participer dans le cadre d’une « classe engagée » ? Le MEN entretient un flou volontaire sur cet obstacle juridique.

L’enseignement moral et civique pour promouvoir le SNU

L’administration ne craint pas d’encourager les élèves à manquer deux semaines de cours en partant en « séjour de cohésion ». En effet, explique la FAQ, il n’y a aucune inquiétude pour les cours à rattraper car « Durant le séjour de cohésion SNU, les jeunes apprennent en faisant, par l’expérience, dans une pleine complémentarité avec les enseignements dispensés au lycée, en particulier l’enseignement moral et civique. » Bien au contraire, il est demandé aux équipes pédagogiques de s’adapter pour éviter les redondances entre les contenus du SNU et leurs cours. « Le séjour s’inscrit dans un continuum d’apprentissages au sein du projet d’engagement de la classe et plus largement de l’établissement. A ce titre, la collaboration entre le ou les professeurs et les encadrants du séjour est essentielle pour éviter les redondances entre les activités. La complémentarité des approches sera recherchée. »

Dans cette logique, les nouveaux programmes d’EMC font une place officielle à la promotion du SNU, dès le préambule, et particulièrement en Troisième (thème de l’engagement) et en Première (Défense et sécurité nationale). En Seconde les “démarches et situations d’apprentissage” proposées pour le thème Droits et responsabilité : l’exemple de la protection de l’environnement et de la sauvegarde de la biodiversité « peuvent s’inscrire dans les projets des classes engagées et être valorisées lors des séjours de cohésion du SNU ».

Refuser le SNU : un combat syndical

La vision d’un « réarmement civique » portée par Emmanuel Macron et son camp politique, même s’il n’est jamais parvenu, depuis 2017, à créer les conditions d’une généralisation du SNU, est à l’opposé de notre conception d’une École émancipatrice pour toutes et tous. Comme le montre la tribune publiée le 2 octobre 2024, dont le SNES-FSU est signataire, de nombreux responsables politiques, ainsi que des représentant·es syndicaux et associatifs, demandent au gouvernement l’abandon du service national universel, « outil vide de sens mais gonflé de moyens financiers et humains ».

Les “classes et lycées engagés” ne sont là que pour donner un vernis pédagogique aux séjours de cohésion, et pour favoriser la communication (pour ne pas dire la propagande) auprès des lycéennes et lycéens. Le SNU peut rencontrer au sein de la jeunesse le désir sincère d’être utile ou de servir, mais il ne restera qu’un simulacre : simulacre d’exercices militaires, simulacre d’engagement républicain pour la collectivité, simulacre de mixité sociale. En un mot, il s’agit d’imposer une opération de militarisation de la jeunesse et de l’École publique, tout en discriminant les élèves qui n’ont pas la nationalité française. En cela, le SNU prolonge et permet de développer le dispositif déjà bien implanté depuis 2005 des « classes de défense et de sécurité globale », sans information claire dans les établissements et les médias. Le SNES-FSU rappelle son opposition de principe aux « classes défense » et autres projets de même type reposant sur un partenariat entre École et armée. Il soutient les collègues refusant de les mettre en place. Le SNES-FSU rejette l’utilisation de la participation aux classes engagées et/ou au SNU, pour renseigner Parcoursup : il s’agit d’une instrumentalisation de l’engagement qui sert de moyen de pression sur la jeunesse.

1Le rapport de la Cour des comptes sur le SNU paru le 13/09/2024 souligne d’ailleurs « l’incertitude » quant au « public-cible » du SNU, qui ne peut pas être, pour l’heure, l’ensemble d’une classe d’âge.


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