Suite à la lettre de saisine du ministre Pap Ndiaye de juin 2023 (lire notre analyse), un projet de
programme d’EMC de l’élémentaire à la Terminale a été rendu public par le CSP (Conseil supérieur des programmes) le 30 janvier 2024.

Une consultation de la profession à repenser

Une courte phase de “concertation” a alors commencé, au moyen d’un questionnaire en ligne ne permettant pas de remettre en question les choix de contenus. Ce questionnaire, auquel y compris le grand public pouvait répondre, a fait l’objet d’une communication très aléatoire de la part du Ministère et des Rectorats. Ainsi, lors d’un premier groupe de travail au Ministère avec les organisations syndicales, le 7 mars 2024, nous apprenions que la consultation en ligne n’avait reçu que 550 réponses. La DGESCO (Direction générale de l’enseignement scolaire) nous assurait que les corps d’inspection avaient également contribué à organiser les retours de la profession sur le projet de programme. Cette présentation ne correspondait pas à ce dont nombre de collègues avaient témoigné.
S’appuyant sur le travail de son secteur Contenus, et sur les différentes listes disciplinaires concernées par l’enseignement de l’EMC, le SNES-FSU est donc intervenu en groupe de travail ministériel puis au CSE (Conseil supérieur de l’Éducation) pour porter ses analyses critiques et faire évoluer ce texte à bien des égards problématique.

Des améliorations…

En rupture avec une habitude bien installée depuis 2017, nous avons constaté, lors de la présentation du programme au CSE du 22 mai 2024, que certaines de nos demandes avaient enfin été entendues. Le SNES-FSU peut se féliciter d’avoir fait ajouter la féminisation (partielle) du programme : le terme “citoyennes” a été ajouté à plusieurs reprises à celui de citoyens (ainsi que la locution “les lycéennes et les lycéens” dans l’introduction de la partie lycée. L’écriture du programme au “masculin universel” nous paraissait en totale contradiction avec le sens de l’EMC, mais la “lourdeur” d’une écriture plus inclusive a été évoquée par nos interlocuteurs pour expliquer l’absence de féminisation systématique.
Le SNES-FSU a également obtenu que l’attribution aux enseignant·es d’histoire-géographie de l’enseignement de l’EMC au collège soit rappelé. Notre inquiétude était vive de voir l’horaire d’histoire-géographie-EMC amputé d’une demi-heure hebdomadaire désormais mentionnée dans les nouvelles grilles horaires du collège.

Dans sa réécriture le Ministère a supprimé une partie des lourdeurs du projet du Conseil supérieur des programmes. En effet on trouvait pour chaque niveau d’enseignement un tableau à 4 colonnes : les « notions abordées », les « contenus d’enseignement » (soit des chapitres, deux ou trois par année), des « propositions de démarches et de situations d’apprentissage », et des « références, dispositifs, éléments extérieurs à prendre en compte ». Cette dernière colonne fourre-tout permettait de mentionner l’EMI, l’EDD, les liens avec la vie collégienne ou lycéenne, les liens avec les « éducations à », les Grands Textes, les journées commémoratives (ex Journée de la Laïcité le 9 décembre), les concours… Le tableau se terminait par des « Textes à lire » chaque année. La FSU lors du premier groupe de travail de mars 2024, a souligné la longueur et la difficulté de ces textes et remis en cause la pertinence de certains auteurs (trois autrices en tout et pour tout). Au final le Ministère les a supprimés, ainsi que la 4e colonne initiale, dont le contenu a été en partie repris en préambule du programme.
Enfin, le SNES-FSU a insisté pour que les horaires désormais indiqués pour chaque thème sont bien indicatifs.

… qui restent insuffisantes

Ces programmes, qui doivent s’appliquer dès la rentrée 2024 en Cinquième et en Seconde, demeurent très denses et ne pourront qu’être survolés. D’autant que l’horaire d’EMC reste à 18 heures par an au lycée ou 0,5 heure par semaine au collège (loin des annonces mensongères de « doublement » des heures) pour un enseignement en classe entière, avec des effectifs croissants. Quid de la pratique du débat, de la recherche documentaire, de l’étude de situations réelles ? Le SNES-FSU n’a cessé, depuis la mise en place de l’EMC, de souligner l’écart grandissant entre les ambitions que le Ministère donne à cet enseignement et les moyens qui lui sont accordés.

Autres sources d’inquiétudes : la référence à une « compétence civique » aussi vague que tentaculaire, allant jusqu’à la nécessité de « respecter son corps » ; ainsi que les références insistantes au SNU et aux classes engagées. Le SNES-FSU a fait voter des amendements au CSE pour les retirer.
Surtout, ce programme a bien été pensé pour que « la démocratie scolaire ne se vive pas dans le cadre de l’EMC » comme nous avons pu l’entendre de la part d’un inspecteur général. Les pratiques démocratiques auxquelles les élèves peuvent se frotter au collège comme au lycée dans le cadre de la démocratie scolaire sont marginalisées dans les contenus de l’EMC (lire l’analyse du secteur CPE du SNES-FSU)

De nouveaux bougés sont attendus d’ici la parution au Bulletin Officiel, les textes ayant été rejetés au CSE du 22 mai – Contre : 51 voix, Pour : 4, Abstention : 10.


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