Avec la FSU, le SNES a rencontré la nouvelle ministre Anne Genetet, pour une prise de contact, mercredi 2 octobre. Le ton est donné, puisque la ministre a repris les éléments de communication du premier ministre sur le budget (“on ne pourra faire de miracles”) et s’est inspiré de son discours d’arrivée rue de Grenelle pour donner le ton. S’il ne fut pas question de son arbre généalogique comme lors de son discours d’arrivée rue de Grenelle, la métaphore maritime a toujours le vent en poupe “le navire garde le cap, ce que je vais changer, c’est la vitesse du navire“. Savoir que l’Education nationale va heurter l’iceberg dans trois mois plutôt que dans 3 semaines n’est pas le signal exigé par les personnels !
Des ruptures claires exigées et des réponses hors sol !
Le SNES-FSU a rappelé le contexte dans lequel la ministre a été nommée et rappelé que l’accueil reçu renvoie aussi à la crise profonde que traverse l’Education nationale. Une 6eme ministre en deux ans et midi, une Ecole publique à un point de bascule, une crise de recrutement structurelle, des réformes faites contre les personnels, des conditions de travail rendues très difficiles (effectifs chargés dans les classes, vies scolaires sous pression, PsyEN dont le métier est dénaturé etc), la concurrence du privé… Le SNES-FSU a donc exigé des réponses claires aux questions suivantes
Budget 2025, salaires
- Anne Genetet va-t-elle défendre l’Education nationale dans les arbitrages budgétaires à venir ? Le SNES-FSU a rappelé l’absolu nécessité d’augmentation de salaires sans contreparties pour tous les personnels, début, milieu et fin de carrière. Le sketch de la reprise des HSE l’an dernier a montré que l’Education nationale est à l’os. Il n’est donc pas envisageable que l’Ecole publique fasse les frais de l’austérité décrétée par le gouvernement.
La ministre a affirmé vouloir être la ministre qui défend une amélioration du taux d’encadrement. Le SNES-FSU a rappelé qu’en 7 ans, 8 865 emplois d’enseignants ont été supprimés dans les collèges et lycées publics, qui accueillent pourtant 7 441 élèves en plus ! Il faudrait donc créer 10617 emplois pour retrouver le taux d’encadrement de 2017. La ministre s’engage donc sur cette perspective ? Pas de réponse…
Pacte et SNU
- Le bilan du Pacte est sans appel selon les chiffres de la DEPP : 24% des enseignants du public dans le 2d degré ont signé le Pacte. Il est urgent de l’abandonner et d’utiliser ces sommes pour des mesures sans contreparties. Le SNES-FSU a aussi rappelé l’inutilité du SNU, projet dangereux de mise au pas de la jeunesse, qui mobilise des sommes du budget de l’Education nationale dont l’Ecole publique a bien besoin (lire ci-dessous la tribune d’un collectif de responsables politiques de gauche et de représentants des milieux syndicaux, dont le SNES-FSU, et associatifs dans le Monde). Quelle va être la position de la ministre sur ce sujet ?
Aucune réponse n’a été donnée sur le SNU. Le Pacte a fait l’objet d’échanges serrés avec la ministre et son cabinet. Anne Genetet a d’abord mis en avant la nécessité d’avoir des chiffres rigoureux pour faire un bilan. Cela tombe bien, la Depp a publié un premier bilan fin août qui est sans appel. L’équipe de la ministre s’est alors donnée beaucoup de mal pour expliquer qu’il fallait encore attendre avant de prendre des décisions, qu’il y avait des choses très positives sur le Pacte. On notera que l’administration sait faire son propre bilan et en tirer des conclusions, puisque le Pacte a été resserré sur le RCD (remplacement de courte durée) afin de coller à la commande présidentielle. Visiblement, il est plus facile de faire de bilan et de prendre des décisions unilatérales quand il est question des mesures présidentielles à défendre coûte que coûte.
Choc des savoirs
- Des mesures contestées par la communauté éducative dans les mobilisations depuis plus de 6 mois, dans les votes dans les instances représentatives, désavouées dans les urnes et dont l’application à cette rentrée confirme la nocivité. Si près de 2/3 des collèges ne mettent pas en place les groupes de niveaux tels que les avaient imaginés Gabriel Attal, les configurations sont tellement nombreuses qu’il est très difficile de s’y retrouver. Et surtout, les problèmes identifiés par le SNES-FSU se confirment : contraintes d’organisation, sur les emplois du temps, remise en cause de l’identité professionnelle et du coeur de métier pour nos collègues de maths et de français… La poursuite en 6eme et 5eme, et la montée en 4eme et 3eme est inenvisageable. L’exigence d’abrogation du choc des savoirs est donc une urgence ! Comment la ministre se positionne sur ce sujet, que compte-t-elle faire sur le DNB, prévu pour être un barrage à la poursuite d’études au lycée, et les classes prépa 2de, potentiel sas d’éviction des élèves des milieux populaires ?
Face au bilan fait par le SNES-FSU, la ministre et son équipe ont, là encore, argué, qu’il n’était pas possible de détricoter le Choc des savoirs, qu’il fallait encore se donner le temps du bilan et qu’il y avait du positif dans la mise en place des groupes de niveaux. La ministre s’est alors montrée très affirmative sur la poursuite des groupes de niveaux en 6eme et 5eme, un peu moins sur la montée en 4eme et 3eme. Aucune réponse sur le DNB ou les classes prépa 2de.
Formation initiale et continue
- La FSU a rappelé son opposition à la réforme de la formation initiale présentée l’an dernier et dont les décrets n’ont pas été publiés avant la démission du gouvernement de Gabriel Attal en raison d’un blocage à Bercy. La FSU est également revenue sur le dévoiement de la formation continue et les pressions pour basculer cette formation en dehors du temps de face-à-face avec élèves.
La ministre a répondu qu’il fallait voir si cette réforme pouvait encore se faire dans le cadre budgétaire contraint annoncé par le premier ministre. Sur la formation continue, la ministre oscille entre son importance pour les personnels et l’absolue nécessité de ne pas faire perdre des heures de cours aux élèves.
AESH et Ecole inclusive
- Ecole inclusive : la FSU a rappelé son exigence de statut de fonctionnaire de catégorie B pour les AESH, les problèmes posés par les PASS et les défis à relever pour que l’Ecole soit réellement inclusive.
La ministre s’est appuyée sur son expérience de médecin, en pointant surtout le manque de formation des personnels. Après avoir défendu les mesures des précédents gouvernements pour les AESH, elle n’a pas évoqué l’enseignement adapté et ne répond pas aux places manquantes en ESMS.
EVARS, plan d’urgence 93, élèves sous OQTF
Enfin le Snes et la FSU ont pointé la recrudescence des opérations de tractage et de désinformation de collectifs de parents réactionnaires, proches de l’extrême droite, pour contester la mise en place de l’EVARS (éducation à la vie affective, relationnellement et sexuelle). Il est nécessaire de protéger les personnels mais aussi de publier rapidement ces programmes, c’est un impératif éducatif et citoyen. La ministre a affirmé prendre connaissance des programmes et ne pas laisser les collectifs cités dicter l’agenda.
Aucune réponse n’a été apportée à nos relances sur le plan d’urgence du 93, pour lequel les personnels se sont mobilisés pendant de nombreux mois.
Enfin, le SNES a rappelé son engagement auprès des jeunes sous le coup d’OQTF pour défendre aussi la vision d’une Ecole fraternelle et ouverte, à rebours de ce que semble être la position du ministre de l’intérieur aux propos inacceptables tant sur l’Etat de droit que l’immigration. La ministre s’est désolidarisée de la position de Bruno Retailleau et a affirmé qu’elle défendrait l’idée que l’Ecole est bien le lieu qui doit accueillir tous les élèves. Les dossiers de long terme (Education prioritaire, mixité sociale etc) ne semblent pas pouvoir être traités au regard du contexte politique instable et incertain.
Poursuivre et amplifier la mobilisation pour l’Ecole publique
La ministre a donc apporté bien peu de réponses claires et ne semble pas prendre la mesure de l’absolue nécessité de signaux forts en direction de la communauté éducative, à commencer par les questions salariales, budgétaires ou le Choc des savoirs. C’est à la fois une urgence éducative et démocratique tant l’Ecole publique est à un point de bascule. Le SNES-FSU, avec la FSU, poursuivra son travail d’information de la profession pour préparer de larges mobilisations pour nos salaires, nos métiers et l’Ecole publique !