Quitter précocement l’école pour aller travailler, parfois gratuitement, deviendrait le seul horizon pour les jeunes les plus fragiles, privés de toute formation générale et professionnelle.
Aucun projet de texte n’est encore paru mais la ministre déléguée C. Grandjean, sous la double tutelle des ministères du travail et de l’Éducation nationale, engage les LP à déroger aux grilles horaires et à se défaire de l’organisation des enseignements pour adapter le bac professionnel aux besoins locaux des entreprises. Au prétexte d’augmenter les périodes de stage de 50 %, le gouvernement espère ainsi transférer la formation aux savoirs professionnels vers les entreprises. Les secteurs économiques qui peinent à recruter (hôtellerie-restauration, métiers de bouche, bâtiment, accompagnement en santé et social…) pourraient ainsi élargir, à moindre coût, leurs viviers de main d’œuvre. Et à la clé, moins d’heures de cours pour les élèves et de nouvelles suppressions de poste en LP !
Selon les territoires, les domaines professionnels en tension, les intentions des entreprises, les enseignements et les parcours en LP pourraient donc être bien différents avec des cartes de formation, toujours à la main des Régions, dépendantes des besoins immédiats de l’économie locale. En plus d’un diplôme à géométrie variable, la formation professionnelle diversifiée et réfléchie pour faciliter les adaptations des futurs salariés aux évolutions des métiers est bel et bien remise en cause.
Pression sur l’orientation
Les PsyEN et les professeurs principaux de collège ne seraient pas à l’abri de pressions pour encourager les élèves et leur famille à s’engager dans des domaines qui n’attirent pas les jeunes. La demi-journée hebdomadaire d’initiation aux entreprises dès la classe de cinquième s’inscrit pleinement dans cette perspective. L’engouement de certaines fondations d’entreprises ou de branches professionnelles à se présenter devant des jeunes de moins de 15 ans n’est en rien désintéressé. Il s’agit d’attirer, en supprimant des heures de cours, l’attention de certains jeunes quitte à les soustraire à terme à la formation sous statut scolaire pour une sortie précoce vers l’apprentissage.
Le lycée GT transformé
Refus ou crainte d’exposer trop tôt des mineurs au monde du travail, accès discriminatoire à l’apprentissage qui statistiquement disqualifie les filles et les minorités visibles ou resserrement prévisible des places offertes en lycée professionnel, le réflexe de repli vers le lycée général et technologique est pour le moment l’angle mort du projet de réforme. Comment accueillir et faire réussir ces jeunes dans des classes de seconde déjà surchargées avec des programmes lourds et bien peu conçus pour la poursuite vers la voie technologique ? Alors qu’elle a déjà pâti des réformes Blanquer au lycée, la voie technologique serait encore sous tension avec des effectifs à la hausse en pré-bac et un effondrement en BTS des cohortes de bacheliers professionnels.
Grève unitaire le 18 octobre
L’organisation du second degré dont l’unité avec les 3 voies au lycée assure à chaque jeune une formation qualifiante, diplômante, émancipatrice et qui ouvre des poursuites d’études, est en jeu. Pour sauver les lycées pros, le SNES-FSU a appelé à participer à la journée de grève unitaire du 18 octobre aux côtés du SNUEP-FSU.