Mise à jour le 12 avril
Le ballon d’essai lancé dans le Parisien sur le coefficient de l’épreuve ressemble surtout à une tentative de bricolage pour sauver à tout prix le Grand oral !
Communiqué en date du 8 avril
A deux mois et demi des épreuves, le Grand Oral ne tient plus qu’à un fil : la volonté du ministre de l’Education nationale de tenir quoi qu’il en coûte l’épreuve phare de sa réforme du baccalauréat. Pourtant cette épreuve pose de nombreux problèmes que le Snes-FSU, le SIA (syndicat des inspecteurs d’académie), le SNPI-FSU, le Snetap-FSU pour l’enseignement agricole,n’ont cessé de pointer, aussi bien sur le fond de sa conception que sur les modalités de sa mise en œuvre.
Une épreuve floue et mal pensée
Le « Grand Oral » est adossé aux enseignements de spécialité et le B.O. précise que, lors de la deuxième partie de l’épreuve, le jury « peut interroger le candidat sur toute partie du programme du cycle terminal de ses enseignements de spécialité et évaluer ainsi la solidité des connaissances ». La grille d’évaluation indicative jointe au B.O., cependant, met beaucoup plus largement l’accent sur la forme que sur le fond et la conception qui semble s’imposer, notamment au travers des quelques formations qui ont été mises en place dans les académies, est bien celle d’une épreuve essentiellement rhétorique.
Compte-tenu de ces contradictions manifestes, comment savoir quelle préparation mettre en œuvre ?
Par ailleurs, l’abondance de productions issues des collèges académiques d’inspecteurs autant que des différentes inspections générales disciplinaires, loin de répondre à l’ensemble des questions, finit par semer le trouble chez les professeurs.
Nos organisations sont bien convaincues qu’il est important de renforcer le travail autour de l’oral. Mais elles estiment que cela n’a de sens que si la maîtrise de l’oral est au service de l’exposition claire et fluide de connaissances précises et bien assimilées. Or, le « Grand Oral » tel qu’il est actuellement conçu s’inspire ouvertement d’épreuves du supérieur (Science Po ou l’ENA…) et n’en retient qu’une caricature formelle qui ne peut en aucun cas servir à faire avancer le travail sur l’oralité au lycée.
Le développement d’un vrai travail sur l’oral, réellement adossé aux disciplines, suppose que les professeurs soient formés (et pas quelques mois seulement avant la passation de l’épreuve !) et que les moyens leurs soient donnés de travailler réellement l’oral en classe avec leurs élèves. Comment travailler l’oral avec un groupe de 35 élèves sans qu’aucun dédoublement ne soit prévu à cet effet ?
Dans les conditions actuellement prévues, loin de réduire les inégalités sociales, l’épreuve du « Grand Oral » va conduire à avantager les élèves les «mieux dotés» et risque d’être le symbole même du caractère inégalitaire du nouveau baccalauréat !
Des inégalités aggravées par la crise sanitaire et sa mauvaise gestion
Si, dès sa conception, la mise en œuvre de cette épreuve était approximative et précipitée, la crise sanitaire a encore aggravé les conditions de préparation : un troisième trimestre de première chamboulé, le passage à l’hybride dès le mois de novembre dans certains lycées puis le passage à l’école à distance depuis quelques jours.
En novembre, les ministres ont autorisé le passage à l’hybride sans réel cadre national en dépit des alertes de nos organisations syndicales sur les implications de ce manque de cadrage. Résultat, dès le mois de novembre les lycées se sont organisés différemment les uns des autres entraînant une réelle rupture d’égalité devant l’examen. Aujourd’hui, les deux semaines d’école à distance vont renforcer les inégalités.
Enfin, dans des circonstances sanitaires qui ont des effets reconnus sur la psychologie des jeunes, comment envisager que les élèves de terminale soient prêts à aborder la partie 3 de l’épreuve qui leur demande de se projeter dans l’avenir et d’évoquer leur projet d’orientation ?
L’urgence est d’envoyer un message clair à l’ensemble de la communauté éducative : dans le contexte d’incertitude et de bouleversement lié au Covid, il faut ramener de la sérénité.
Nos organisations, Snes-FSU, Snetap-FSU, SIA (syndicat des inspecteurs d’académie) et SNPI-FSU, affirment que la neutralisation du Grand Oral est un impératif absolu pour la session 2021.
Pour les sessions suivantes, dans le cadre d’une redéfinition des épreuves du baccalauréat, les épreuves orales devront être elles-mêmes redéfinies, en concertation avec les personnels.
Nous demandons une réponse rapide : il n’est pas entendable de rejouer la mauvaise série à rallonge de l’an dernier sur l’oral de français où les lycéens et les professeurs ont dû attendre jusqu’au 28 mai la décision du ministre de l’Education nationale. Il faut laisser aux professeurs et aux élèves la possibilité de consacrer le peu de temps qui reste à un travail utile autour de savoirs disciplinaires solides.
L’obstination ministérielle sur de nombreux sujets a mis sous tension le système éducatif. Aujourd’hui, l’heure n’est plus à s’accrocher au totem d’une réforme contestée mais à faire preuve de responsabilité en prenant la décision qui s’impose : la neutralisation du « Grand Oral».