Quand le ministre assure son service après-vente
Depuis plus d’un an, le ministre Blanquer ne cessait de promettre « une revalorisation historique ». Des chiffres ont couru, censés donner une idée du montant des sommes qui seraient engagées. Les milliards ont fondu et le montant inscrit au final au budget 2021 est de 400 millions d’euros. Les différentes annonces et mesures du ministère sont loin du compte. Elles ne renvoient qu’à des indemnités, primes et heures supplémentaires et ne concernent en rien une augmentation pérenne de la rémunération (carrière, avancement…).
Rappelons que la catégorie des CPE est particulièrement impactée par la politique salariale du gouvernement à l’endroit des fonctionnaires d’Etat. Quand le ministre affirmait précédemment que les personnels de l’éducation nationale peuvent bénéficier d’heures supplémentaires défiscalisées afin d’améliorer leur pouvoir d’achat, il semble ignorer que de nombreuses catégories de personnels, dont les CPE, sont exclues de ce dispositif qui n’est d’ailleurs pas une revendication syndicale. Pour les CPE, seule l’augmentation du point d’indice permet de limiter la perte de pouvoir d’achat, abyssale depuis 2010, et le déclassement social.
« Prime d’attractivité » ou la revalorisation fantôme
L’arrêté du 12 mars 2021 mentionne bien au titre des bénéficiaires les CPE. Cette prime dite « d’attractivité », d’une centaine d’euros mensuels au tout début de la carrière et dégressive jusqu’à une trentaine d’euros, versée aux personnels d’enseignement, d’éducation, d’orientation et de psychologie ayant 15 ans de carrière, est créée. Les stagiaires sont exclus du bénéfice de cette prime alors qu’ils en ont le plus besoin. Rien n’est prévu pour les AESH.
Au final, seuls 31% des personnels titulaires sont concernés. 69% des personnels titulaires ne connaîtront aucune augmentation en 2021. Les montants annoncés ne permettent même pas de rattraper les pertes dues à l’inflation. Rien pour les collègues en milieu et fin de carrière si ce n’est une légère augmentation du ratio de promotions à la hors classe très insuffisante.
Une loi de programmation pluriannuelle, seule à même de donner une visibilité et des garanties sur la pérennité et l’amplification des mesures prises en 2021, n’est toujours pas actée. Le ministre entend jouer la carte de l’opinion en mettant en avant son Grenelle de l’Éducation pour justifier des transformations de nos métiers.
Augmentation du taux de l’indemnité forfaitaire CPE : une revalorisation loin du compte
La mobilisation à l’initiative du SNES-FSU a fait bouger les lignes. Après avoir écarté les CPE du bénéfice de la prime d’équipement informatique, le ministre a fait le choix d’une augmentation du taux de l’indemnité forfaitaire allouée aux conseillers principaux d’éducation et aux personnels non titulaires exerçant les mêmes fonctions. L’arrêté du 12 mars 2021 mentionne, pour les CPE, une hausse de 236,44 euros de l’indemnité sur l’année. L’indemnité forfaitaire actuellement de 1213,56 € passe à 1450 €. Dans son message aux CPE, Blanquer met en avant notre travail « remarquable », notre rôle « indispensable », « central », notre « investissement au service de l’éducation ». Que de flatteries ! Quel brillant conseiller se cache derrière ce courriel flagorneur ? La grandiloquence s’arrête au vocabulaire, l’augmentation de la prime, elle, est beaucoup plus raisonnable : 19,70 euros par mois. Se moque-t-il quand il dit que « cette revalorisation marque la juste reconnaissance de [nos] missions et de [notre] rôle éducatif ? Lors du Comité Technique Ministériel (CTM) du 09 février, le SNES-FSU a néanmoins soutenu l’augmentation proposée par l’arrêté, aussi minime soit-elle, l’heure n’est pas à refuser l’aumône qu’on nous fait ! Le lien que le ministère fait entre prime informatique et indemnité forfaitaire démontre, s’il en était besoin, qu’aucune augmentation de la charge de travail des CPE ne peut être exigée en contrepartie de cette évolution de l’indemnité forfaitaire. Le SNES-FSU restera très vigilant quant au respect des obligations réglementaires de service des CPE.
Une communication ministérielle tronquée
Dans sa communication à la profession, le ministre se garde bien d’évoquer le décret 2021-275 du 12 mars 2021 également publié au journal officiel du 14 mars. Ce texte impose la désindexation de l’indemnité forfaitaire de la valeur du point d’indice de la Fonction publique rompant encore un peu plus le lien entre rémunération indiciaire et indemnités. Façon de récupérer d’une main une partie de la revalorisation accordée de l’autre.
Pour le SNES-FSU, la revalorisation de nos salaires est indispensable, après des années de perte de pouvoir d’achat qui ont conduit à un décrochage salarial sans précédent. Salaires, conditions de travail, budget 2021, conditions sanitaires, la politique ministérielle forme un ensemble cohérent qu’il faut combattre.