Le 12 septembre , la commission pilotée par Chantal Manes-Bonnisseau, IGEN d’anglais et Alex Taylor, journaliste, a publié les résultats de son enquête Propositions pour une meilleure maîtrise des langues vivantes étrangères accompagnés de recommandations pour améliorer l’enseignement des LV en France. http://www.education.gouv.fr/cid133908/propositions-pour-une-meilleure-maitrise-des-langues-vivantes-etrangeres.html Le tout anglais La première constatation que nous pouvons faire est que l’anglais est considéré comme la langue prioritaire, malgré l’insistance sur la diversité des LV enseignées et le plurilinguisme. Ainsi l’anglais serait obligatoire pour tous les élèves. Comment encourager l’apprentissage d’autres langues ? Que deviendront les langues régionales dans un tel contexte ? Les spécialités au Bac ne sont annoncées que dans 4 langues : l’anglais, l’allemand, l’espagnol et l’italien. Drôle de conception du plurilinguisme. Pire, aucune analyse de la place hyper-centrale de l’anglais qui est pourtant le véritable nœud de réflexion concernant l’apprentissage des langues en France. Le rapport semble préférer lui accorder encore une place plus grande, voire à part ! La formation Le rapport met l’accent sur la nécessité de formation des enseignant·e·s, en particulier dans le premier degré et pour les professeur·e·s de disciplines non linguistiques, notamment grâce à la mobilité. Sur quel temps cette formation se ferait-elle ? Quelles répercussions aurait-elle sur leur vie privée et familiale ? Cette formation semble être un élément clé pour assurer la réussite des élèves. L’organisation des enseignements Un autre élément-clé serait la mise en réseaux à tous les niveaux, entre élèves, entre enseignant·e·s, entre établissements, entre pays. Cela nécessiterait, sans doute, une réorganisation importante du travail et aurait une incidence considérable sur les emplois du temps. Une des propositions du rapport est une répartition différente des périodes d’enseignement (15 à 20 minutes par jour dans le premier degré, cinq séances de 45 minutes en sixième ; à partir de la cinquième, quatre séances hebdomadaires de 45 minutes en langue vivante 1. Aligner autant que possible les horaires de langue vivante 2. Cette organisation rendrait l’exposition à la langue quasi-quotidienne mais comment s’articulerait-elle avec celle des autres disciplines ? Il est à déplorer, que cette solution, régulièrement avancée par les corps d’inspection, ne prenne en compte que le ratio actuel insuffisant horaires/nombre d’élèves que l’on essaie de masquer par une simple réorganisation du temps. Par ailleurs, cela montre aussi la méconnaissance du terrain : que faire en 45 minutes quand on sait le temps que prend la mise en activité des élèves de collège, hétérogènes, parfois en difficulté pour entrer dans les apprentissages, parfois avec des besoins éducatifs particuliers, etc. Et, quid du lycée ? Le rapport propose que l’exposition à la langue soit également renforcée hors de l’établissement. Cela suppose une égalité d’accès aux ressources diverses pour tous les élèves. Or, on sait que cela n’est pas miraculeux non plus ; le propre rapport le mentionnant lui-même. Les effectifs La seule mention des effectifs ne concerne que la terminale : prendre en considération la demande des enseignant·e·s de plafonner les effectifs à 20 élèves en terminale. Cela signifie-t-il qu’un effectif de 36 élèves, voire plus, est acceptable pour les autres niveaux ? Ne serait-il pas utile de réduire les effectifs le plus tôt possible pour justement permettre aux élèves de pratiquer des langues dans de meilleures conditions ? Les contenus et les pratiques En ce qui concerne le contenu des enseignements, la commission souligne les effets bénéfiques de l’approche actionnelle. Or, comme son nom l’indique et comme le rappelle le CECRL, cette approche n’est pas une méthode particulière. Dans les faits, elle recoupe de nombreuses pratiques. Par ailleurs, comme l’ont montré les travaux de C. Puren, cette perspective (plus qu’approche) ne s’oppose pas aux autres méthodes. Elle les complète et les interroge. Pourtant, comme dans le rapport de 2012 de S. Halimi, nous retrouvons dans ce rapport les mêmes « recettes » : le numérique, l’e-twinning, etc. Comme si tous les outils remplaçaient une formation et des conditions d’enseignement dignes. Nous aurions aimé d’ailleurs que des bilans ou des recherches soient cités pour étayer des « vérités » nombreuses assénées dans ce rapport. Par exemple, concernant l’âge où il faut commencer les LV et comment les apprendre. En effet, aucun débat sur la didactique d’une langue (l’anglais) ou des langues en primaire, rien ou presque sur la formation initiale et continue des enseignant·e·s, rien sur le simple fait que de nombreux et nombreuses enseignant·e·s de langues n’ont appris les langues qu’ils et elles enseignent que lors de leurs études secondaires, rien ou presque sur le contexte monolingue français dans les médias. De plus il est recommandé de mettre l’accent sur les compétences orales en anglais en cycles 3 et 4. La progression proposée, qui ne concernerait que l’anglais, serait la suivante : – niveau A1 du CECRL dans cinq et A2 dans au moins deux activités orales de compréhension et d’expression en fin de cycle 3 ; – anglais LV1 : A2 dans les deux compétences écrites (compréhension et production) et B1 dans les trois activités orales de compréhension de production et d’interaction en fin de cycle 4 ; – anglais LV2 : A2 dans deux activités langagières orales. Or, cet accent est celui qui est déjà demandé dans les programmes actuels. Bref, là encore, rien de nouveau. Quant à l’élévation des niveaux, pourquoi pas, si les conditions d’apprentissage sont améliorées, sinon ce serait encore mettre les élèves les plus fragiles en plus grande difficulté . Si l’intérêt de l’approche actionnelle est certain, il est rappelé qu’il n’est pas interdit de faire de la grammaire. Il resterait à en définir la forme et la progressivité. Pour le SNES-FSU, les pratiques évoquées ne sont pas nouvelles. Il rappelle son souhait de voir les expérimentations mises en place réellement évaluées afin d’en démontrer l’efficacité. L’évaluation Un des points importants concerne l’évaluation : la nécessité affichée de changer le format des épreuves du bac et l’attestation d’un niveau du CECRL. L’insistance sur une certification à reconnaissance internationale n’est pas anodine. Une telle certification impliquerait que les enseignant·e·s soient correcteurs et évaluateurs, mais qui certifierait ? Le SNES-FSU dénonce le recours à des organismes certificateurs privés qui verraient là un marché extrêmement lucratif. Nous savons que les contrats signés pour les seules certifications en seconde coûtent déjà des millions d’euros à l’Education Nationale. Dans ce contexte, les discours prônant les économies et justifiant les manques de moyens sont d’autant plus inacceptables.

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